publié le 31/07/2013 à 20h41 par Fabrice Tassel
INTERVIEW
L’ex-sénateur Didier Boulaud a longtemps côtoyé Bérégovoy : Didier Boulaud a travaillé dix ans au côté de
Pierre Bérégovoy à Nevers. Lui-même maire pendant dix-sept ans de la ville où l’ancien Premier ministre a mis
fin à ses jours, député puis sénateur, il est président de la communauté d’agglomération de Nevers.
Pierre Bérégovoy vous parlait-il parfois de son rapport à l’argent ?
Non, ce n’était pas un sujet qu’il abordait fréquemment, parfois il me faisait remarquer que j’étais économe. Lui-même mettait toujours un point d’honneur à payer, au restaurant, au café, même
quand son chauffeur allait acheter les journaux, il le remboursait au centime près. «Un sou est un sou», disait-il.
Vous avait-il parlé de l’affaire Pelat ?
Plusieurs mois avant que le Canard enchaîné ne révèle son prêt, à l’automne 1992, il m’avait expliqué qu’il avait fait un emprunt sans me dire auprès de qui. Sa famille souhaitait déménager, il
ne trouvait pas ce qu’il voulait, alors il avait accepté cet emprunt. Je pense qu’au fond de lui, ça le gênait que ce soit un prêt sans intérêts, car c’était ça le fond du problème. Mais quand je
repense à la somme issue des fonds secrets supprimés ensuite par Jospin, qui se trouvait dans le coffre de Matignon à son départ… Il y avait plusieurs fois le montant du prêt. Si Pierre Bérégovoy avait voulu en mettre un peu de côté tous les mois, comme d’autres l’ont fait ou comme vient de le
montrer l’actualité autour de Claude Guéant, il n’aurait pas eu besoin d’emprunter.
Est-il l’homme de gauche qui a eu le rapport le plus sain à l’argent ?
C’est délicat de comparer avec d’autres. Mais je l’ai vu évoluer, de maire à ministre, puis Premier ministre et son mode de vie n’a jamais changé. J’ai une photo où il porte une veste à carreaux,
il l’aimait et l’a gardée pendant des années. Quand il est arrivé à Nevers, il a vécu un an dans un studio de 25 m2 avec sa femme. Puis, lorsqu’ils ont acheté un appartement de quatre pièces, le
promoteur a voulu se le mettre dans la poche en lui offrant une cuisine équipée «pour Madame» : Bérégovoy a
refusé tout net.
Quel regard aurait-il porté sur l’affaire Cahuzac ?
Il aurait été scandalisé, évidemment. Il ne faut pas oublier qu’il avait placé son travail à Matignon sous le signe de la lutte contre la corruption, et des progrès ont été faits en matière de
transparence. Au final, tout cela s’est retourné contre lui.
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«A Nevers, il a vécu un an dans 25 m2 avec sa femme»
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