Rudolf Franz Ferdinand Hoess (né le 25 novembre 1900 à Baden-Baden et exécuté le 16 avril 1947 à Auschwitz pour crimes contre l'humanité) a été un officier SS et un rouage de premier ordre dans le génocide des Juifs de l'Europe occupée.
En tant que premier commandant du camp de concentration et d'extermination d'Auschwitz-Birkenau, le plus vaste du système nazi, du 1er mai 1940 jusqu'au 1er décembre 1943, puis de nouveau en poste entre mai et septembre 1944, quand la déportation massive des Juifs hongrois portait la machine de mort à son plus haut rendement, il mit en œuvre l'élimination industrielle des déportés juifs en utilisant le Zyklon B dans un ensemble de chambres à gaz doublées de fours crématoires destinés à détruire les corps.
Il supervisa également les traitements inhumains et meurtriers infligés dans son camp aux résistants notamment polonais, aux Tziganes, aux prisonniers de guerre soviétiques, aux « asociaux » et aux victimes d'expériences pseudo-médicales. Responsable de la mort de près d'un million d'êtres humains (dont 90 % de Juifs), ses mémoires constituent un document historique d'une importance reconnue pour la connaissance de la Shoah, de l'univers concentrationnaire et de la mentalité des bourreaux. Fils d'une famille catholique de Baden-Baden, son père nourrit le souhait de voir son fils devenir prêtre et l'éleva dans ce but avec autorité ; Rudolf ira au Collège des Pères. Il voit l'arrivée de la guerre avec beaucoup d'enthousiasme et s'engage dans sa ville comme brancardier des blessés du front. A trois reprises, il tenta de s'infiltrer sur le front par le train, mais il est renvoyé chez lui en raison de son jeune âge. Après la mort de son père, Hoess s'engage en août 1916 dans l'armée, plus précisément dans la cavalerie chez les Dragons, grâce à sa rencontre du Capitaine Günther, qui l'estime beaucoup, alors qu'il n'a pas encore 16 ans.
Il est envoyé servir dans l'Empire ottoman, en Irak, puis en Palestine, et à 17 ans, il est déjà sous-officier décoré de la Croix de fer de 2e et 1re classes. En 1919, après la Première Guerre mondiale, il s'engage dans une troupe paramilitaire nommée Roßbach et part combattre dans les territoires allemands près de la Baltique, dans la Ruhr et en Haute-Silésie. Libéré de cette troupe, il s'inscrit au parti nazi comme SA en 1922. Ayant participé au meurtre du communiste Walter Kadow, il est condamné à 10 ans de prison, mais est libéré en 1928 grâce à une amnistie. C'est notamment ce séjour en prison qui conduira Himmler à le choisir pour diriger le camp d'Auschwitz-Birkenau. Cet emprisonnement fera de lui un expert dans la psychologie des prisonniers, c'est de lui que viendra l'idée de maquiller les chambres à gaz en douche pour que les gazages se fassent sans rebellion de la part des détenus.
À la suggestion de Heinrich Himmler, il demande à faire partie des SS en 1933 et est accepté l'année suivante. Le 1er décembre 1934, il devient membre du Totenkopfverbände (l'unité "tête de mort"). Il sert ainsi au camp de Dachau. Promu SS Hauptsturmführer en 1938, il est candidat pour être commandant au camp de Sachsenhausen. En 1940, devenu membre des Waffen-SS l'année précédente, il est nommé commandant du camp d'Auschwitz, où il reste jusqu'en 1943. Il y met en place un premier camp Auschwitz 1 puis un second Auschwitz 2 Birkenau qui sera celui de l'extermination massive des populations juives d'Europe. Jusqu'alors (dans d'autres camps notamment), les gazages étaient effectués avec des gaz d'échappement.
La particularité de l'extermination mise en place par Hoess a été d'utiliser le Zyklon B. Les tous premiers essais de gazages au Zyklon B (acide prussique dont l'utilisation normale était celle d'insecticide) ont lieu à Auschwitz 1, fin 1941. Au printemps 1942 les déportations en masse commencent et Hoess met en place deux lieux de gazage provisoires à Birkenau avant de faire construire au printemps 1943 quatre crématoires (on appelle crématoires des bâtiments qui comprenaient à la fois une salle de déshabillage, des chambres à gaz et les fours crématoires proprement dits). Hoess a donc, sur ordre de Himmler, organisé la Solution finale à Auschwitz en améliorant ses méthodes entre la fin 1941 et le printemps 1943 : le but en était le meurtre de masse d'un maximum de Juifs en un minimum de temps.
Du 1er décembre 1943 au 8 mai 1944, il est remplacé par Arthur Liebehenschel, dont il reprend les postes au Amstgruppe D du Wirtschaftverwaltungshauptamt des SS. Himmler le renvoie à Auschwitz pour mettre en place l'« Aktion Hoess », c'est-à-dire la machine de mort du camp d'Auschwitz II Birkenau qui visa des juifs de Hongrie. Capturé le 11 mars 1946 par la police militaire britannique, il témoigne pendant les procès de Nuremberg contre Ernst Kaltenbrunner, Oswald Pohl et la firme IG Farben. Il est transféré aux autorités polonaises le 25 mai 1946. Il est jugé par le Tribunal suprême de Pologne du 1er au 29 mars 1947. Condamné à mort le 2 avril 1947, son exécution par pendaison a lieu le 7 avril près du crématorium du camp d'Auschwitz 1 et de la maison qu'il a occupée avec sa famille durant toutes les années pendant lesquelles il a dirigé le camp.
Pendant son interrogatoire, cet homme ne se croyait en aucun cas coupable et répétait constamment qu'il avait obéi à des ordres. Pendant son emprisonnement, il rédigea une autobiographie publiée en 1958 sous le titre Rudolf Hoess - Le Commandant d'Auschwitz parle. Il s'y présente comme un homme élevé dans l'obéissance aux ordres. Il y exprime son antisémitisme et son dégoût pour les Tziganes comme des évidences. En 1952, l'écrivain français Robert Merle publia une biographie romancée de Hoess (Rudolf Lang dans le récit), la Mort est mon métier. Ses sources ont été l'autobiographie de Hoess et ses états de services au sein de l'armée allemande et du parti nazi. De plus, il s'est basé sur le résumé des entretiens de Hoess avec le psychologue américain Gustave Gilbert qui l'interrogea dans sa cellule au moment du procès de Nuremberg. L'auteur concentre son attention sur les raisons qui peuvent pousser un homme à exécuter des ordres menant au massacre des 2,5 millions de déportés qui lui furent imputés (c'était la propre estimation de Hoess). Plus de la moitié du récit est donc consacrée à l'éducation du jeune Hoess, à ses multiples frustrations et au mouvement qui le rapproche des SA, puis des SS.
La seconde moitié du roman est un véritable travail d'historien : Merle y décrit avec précision la mise en place de la Solution finale à Auschwitz de même que l'implacable organisation nazie qui, en segmentant les tâches jusqu'au moindre détail, interdit à Hoess toute maîtrise de ses actes et toute prise de distance, ne serait-ce que de conscience. En 1985, l'écrivain italien Primo Levi, lui-même ancien déporté à Auschwitz, rédige une préface à l'édition italienne de l'autobiographie de Hoess. Cette préface figure dans l'ouvrage de Levi L'asymétrie et la Vie. En 2006, dans son livre les Les Bienveillantes, Jonathan Littell évoque à de nombreuses reprises la rencontre entre Rudolf Hoess et son héros, Maximilien Aue. Par la voie narrative et par les thèmes abordés, les deux ouvrages furent directement associés. Mais à la différence de Robert Merle, Jonathan Littell nous présente Rudolf Hoess comme un fonctionnaire corrompu et sans intelligence.