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Eichmann Adolf

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Né le 19 mars 1906 à Solingen en Allemagne, Adolf Eichmann est le fils d’un industriel et homme d’affaires, Adolf Karl Eichmann, et de Maria née Schefferling. 

Eichmann Adolf

En 1914, après la mort de Maria, la famille Eichmann déménage à Linz en Autriche. Durant la Première Guerre mondiale, le père d’Eichmann sert dans l'armée austro-hongroise. À la fin de la guerre, il retourne à Linz et reprend les rênes de l’affaire familiale. Le jeune Eichmann quitte l’école (Realschule) sans diplôme et débute l’apprentissage de la mécanique qu’il abandonnera également. En 1923, il commençe à travailler pour la compagnie minière de son père. De 1925 à 1927, il travaille comme vendeur pour Oberösterreichische Elektrobau AG, ensuite il travaille comme agent régional de la Vacuum Oil Company AG, une filiale de la Standard Oil jusqu’au printemps 1933 où il retourne en Allemagne.

Adolf Eichmann épouse Vera Liebl le 21 mars 1935. Le couple aura quatre fils, Klaus, né en 1936 à Berlin, Horst Adolf né en 1940 à Vienne, Dieter Helmut né en 1942 à Prague, et Ricardo Francisco né en 1955 à Buenos Aires. Il a ses premiers contacts avec le parti Nazi lorsqu'il rejoint le mouvement des Wandervogel, classé de nos jours dans le courant idéologique de l'anarchisme de droite, qui entretient des relations troubles avec le milieu antisémite. À 26 ans, en 1932, il est invité avec son père à une réunion du parti nazi autrichien, sur l'invitation d'Ernst Kaltenbrunner, un vieil ami de la famille. Fortement impressionné, cet épisode déterminera l'engagement de Eichmann dans le national-socialisme. Suivant le conseil d'Ernst Kaltenbrunner, Eichmann rejoint la SS autrichienne le 1er avril 1932 en qualité de SS-Anwärter. Il est pleinement intégré à la SS en novembre comme SS-Mann sous le matricule 45326. Il sert alors à mi-temps dans la Allgemeine-SS de Salzburg. Quand, en 1933, les nazis accèdent au pouvoir, Eichmann revient en Allemagne et demande son intégration à plein temps dans la SS, qui est acceptée, et en novembre il est promu Scharführer et intégré à l'équipe d'administration du camp de concentration de Dachau.

En 1934, il choisit de faire une carrière dans la SS demande son transfert dans la Sicherheitspolizei qui commence à devenir une organisation puissante et crainte. Il y est effectivement transféré en novembre et est promu Oberscharführer. Il est alors assigné au centre de commandement des Sicherheitsdienst (SD) à Berlin où il est rapidement remarqué par ses supérieurs qui le promeuvent encore au rang de Hauptscharführer en 1935 puis à celui de SS-Untersturmführer en 1937.

Cette même année, il est envoyé avec son supérieur Herbert Hagen en Palestine, alors sous mandat britannique, pour étudier la possibilité d'une émigration massive des Juifs allemands vers cette contrée. Ils débarquent à Haifa, mais n'obtenant qu'un visa de transit, ils vont jusqu'au Caire où ils rencontrent un membre de la Haganah, mais le sujet de la discussion est encore de nos jours mal connu. Les rencontres qu'ils avaient prévues avec les chefs arabes ne purent avoir lieu du fait de l'interdiction de territoire palestinien. Dans leur rapport ils déconseillèrent une émigration à grande échelle des Juifs allemands autant pour des raisons économiques que pour ne pas contredire la politique du Reich qui préconisait de ne pas laisser un État juif se créer en Palestine.

En 1938, après l’Anschluss, Eichmann est envoyé en Autriche pour organiser les forces de sécurité SS à Vienne. Pour cette action il est promu SS-Obersturmführer. À la fin de cette même année il est désigné par le commandement SS pour former le Zentralstelle für jüdische Auswanderung, le bureau central pour l'émigration juive, qui a la charge de déporter et d'expulser les Juifs d'Autriche. Pour cette tâche, il étudie le judaïsme qui le fascine et il développe alors un profond antisémitisme. Au début de la Seconde Guerre mondiale, Eichmann est promu SS-Hauptsturmführer et s'est fait un nom au bureau de l'émigration juive. Il s'y est fait de nombreux contacts avec les leaders du mouvement sioniste avec lesquels il travaille pour accélérer l'émigration juive depuis le Reich. Eichmann retourne à Berlin en 1939 après la formation du Bureau central de sécurité du Reich (RSHA).

En décembre 1939, il est désigné à la tête du RSHA Referat IV B4, la section du RSHA qui s'occupe des affaires juives et de l'évacuation. En août 1940, il publie le Reichssicherheitshauptamt: Madagaskar Projekt qui prévoyait la déportation de l'ensemble de la population juive d'Europe dans la colonie française de Madagascar. C'est alors qu'il obtient le grade de SS-Sturmbannführer et un an plus tard il accède à celui de Obersturmbannführer. En 1942, Reinhard Heydrich invite Eichmann à participer à la conférence de Wannsee où l'Allemagne nazie décide de la solution finale et Eichmann est nommé « administrateur du transport ». Il a la charge de tous les trains qui transportent les Juifs vers les camps de la mort en Pologne. Durant les deux années suivantes, Eichmann assume son rôle avec zèle et déclare qu'il rirait « en sautant dans la tombe, car j'ai le sentiment d'avoir tué cinq millions de Juifs.

Voilà qui me donne beaucoup de satisfaction et de plaisir. » Son travail est remarqué et, en 1944, il est nommé en Hongrie pour organiser la déportation des Juifs et il envoie 400 000 Hongrois de toutes confessions dans les chambres à gaz nazies. En 1945, Heinrich Himmler, ministre de l'intérieur et Reichsführer SS, ordonne l'arrêt des exterminations et la destruction des preuves de la solution finale. Eichmann refuse les ordres et continue à déporter et à assassiner les Hongrois. Il s'efforce aussi d'éviter d'intégrer les unités combattantes, ayant été nommé un an auparavant Untersturmführer de réserve de la Waffen-SS. Eichmann fuit l'avancée soviétique et rejoint l'Autriche où il retrouve Ernst Kaltenbrunner. Durant les années 1950, de nombreux juifs s'emploient à retrouver les criminels nazis en fuite, et Eichmann fait partie des premiers sur la liste. Des documents déclassifiés montrent que le gouvernement ouest-allemand ainsi que la CIA connaissent, dès 1952 (1958 pour la CIA), le pseudonyme sous lequel se cache Eichmann (Klement), mais ne le révèlent pas pour raisons d'État. Il semble que la crainte ait été que Eichmann dénonce Hans Globke, alors membre du gouvernement du chancelier Konrad Adenauer.

Simon Wiesenthal, un de ces chasseurs de nazis, rencontre, lors d'une réunion philatélique, un ami autrichien, baron, qui, par hasard, en lui montrant sa collection, lui confie avoir conservé cette carte postale d'un de ses contacts en Argentine, bien connue à l'époque pour abriter de nombreux anciens responsables nazis, qui dit avoir vu « ce sale porc d'Eichmann » ayant "régné" sur les Juifs et qui contient des informations plus précises : « Il vit à Buenos Aires et travaille pour la société des eaux ». Il semble que ces informations (entre autres) recueillies par Wiesenthal permirent aux Israéliens de localiser Eichmann en Argentine. Il existe cependant une controverse concernant le rôle exact de Wiesenthal depuis que le Jerusalem Post a révélé dans son édition du 7 mai 1991 l'existence d'un manuscrit non publié d'Isser Harel, dirigeant du Mossad lors de la capture d'Eichmann, qui sous-entend que les agissements de Wiesenthal auraient failli compromettre l'enlèvement d'Eichmann et empêché celui de Joseph Mengele. L'autre acteur principal de la chasse lancée contre Eichmann est Lothar Hermann, un rescapé de Dachau, qui émigre en Argentine dans les années 1950 avec toute sa famille. Or, sa fille Sylvia entretient une relation avec Klaus, le fils aîné d'Eichmann.

Les remarques de Klaus concernant le passé nazi de son père, ainsi que la lecture en 1957 d'un article concernant les criminels nazis réfugiés en Argentine (dont Eichmann), mettent Hermann sur la voie. Il envoie alors sa fille enquêter chez les Eichmann (qui se font encore appeler Klement), et elle obtient de la bouche même d'Adolf la confirmation des soupçons de son père. Celui-ci prévient Fritz Bauer, le procureur de la Hesse. Bauer n'ayant pas confiance en la justice allemande qui compte encore de nombreux ex-nazis dans ses rangs, prévient directement les autorités israéliennes qui prennent contact avec Hermann. Le Mossad localise alors précisément Eichmann et, grâce aux indications de Hermann qui continue à le surveiller, il échafaude un plan d'enlèvement. Le gouvernement israélien approuve finalement en 1960 ce plan qui est exécuté peu après. Eichmann est enlevé en pleine rue par une équipe d'agents du Mossad le 11 mai 1960 et, le 21, il est transporté jusqu'en Israël à partir d'un aéroport militaire argentin. Pour l'anecdote, à l'entrée de la base, un barrage militaire les attendait. Afin qu'Eichmann ne dévoile pas aux soldats argentins qu'il venait d'être enlevé, il fut revêtu d'un uniforme israélien et on le força à boire une bouteille de whisky entière. Rafi Eitan (chargé de l'opération) et ses hommes s'aspergèrent de whisky. À l'entrée de la base, les soldats argentins arrêtèrent l'automobile et se moquèrent des Israéliens incapables de tenir l'alcool.

Cette action, contrevenant aux lois internationales, soulève la colère des autorités argentines. Le gouvernement israélien nie tout d'abord être impliqué dans cet enlèvement et prétend qu'il est le fait de volontaires civils juifs chasseurs de nazis. David Ben Gourion, alors Premier ministre, annonce la capture d'Eichmann à la Knesset le 23 mai 1960. Cette annonce est acclamée debout par les députés présents. Pour connaître les détails de la capture d'Eichmann, on peut se reporter à l'ouvrage d'Isser Harel La Maison de la rue Garibaldi.

Eichmann comparaît à Jérusalem pour quinze chefs d'accusation le 11 avril 1961. On peut regrouper les chefs d'accusation en quatre catégories : crimes contre le peuple juif (chefs d’inculpation 1-4) ; crimes contre l’humanité (5-7, 9-12) ; crimes de guerre (8) ; participation à une organisation hostile (13-15). Exceptionnellement, ce procès fut présidé par trois juges au lieu d'un jury comme le veut la procédure israélienne normale. De plus, le procureur n'est autre que Gideon Hausner, alors procureur général. Ce procès provoqua une controverse internationale et un émoi gigantesque. Les téléspectateurs du monde entier découvrirent en direct Eichmann dans une cage de verre blindée écoutant un interminable défilé de témoins décrivant son rôle dans le transport des victimes de l'Holocauste.

La seule ligne de défense d'Eichmann était d'affirmer n'avoir rien fait d'autre que « suivre les ordres ». Déclaré coupable pour tous les chefs d'inculpation, il est condamné à mort le 15 décembre 1961 et pendu par l'agent pénitentiaire Shalom Nagar peu après minuit le 1er juin 1962 dans la cour de la prison de Ramla. Il est l'un de deux seuls condamnés à mort à avoir été exécuté par Israël et le seul civil. En Israël, les infractions dont Eichmann a été accusé, avec la trahison, constituent les seuls crimes capitaux.

On prétend que ses derniers mots furent : « Vive l'Allemagne. Vive l'Autriche. Vive l'Argentine. Ce sont les trois pays desquels je fus le plus proche et je ne les oublierai pas. Je devais obéir aux règles de la guerre et à mon drapeau. Je suis prêt » puis «Pourim 1946 !», faisant sans doute référence à l'événement de Pourim. Pourtant, le bourreau d'Eichmann ne fait mention d'aucune parole. D'après son souvenir : "Il n'y avait là qu'Eichmann et moi. Je me tenais à un mètre de lui et le regardai droit dans les yeux. Il refusa qu'on lui bande les yeux, et il portait encore aux pieds des pantoufles à carreaux ordinaires. J'ai tiré la manette et il est tombé en se balançant au bout de la corde".

Il est vraisemblable qu'Eichmann n'ait prononcé aucune parole, car il a passé sa captivité à rédiger un document de 1 300 pages intitulé "False Gods" qui tenait lieu de dernières paroles et fut rendu public par les autorités israéliennes le 29 février 2000. Son corps a été incinéré et ses cendres dispersées dans la Méditerranée. La dispersion des cendres dans la mer fut l’une des dernières volontés d’Adolf Eichmann. Israël accepta la dispersion des cendres, mais uniquement au-delà des eaux territoriales de l’État hébreu. Le député de la Knesset (le parlement israëlien) Ivo Goldberg fit un long discours à l'assemblée le lendemain matin à ce sujet :

« J'ai perdu ma mère, j'ai perdu mon père, j'ai perdu mes sœurs, j'ai perdu mes frères, j'ai perdu des tantes, j'ai perdu des oncles, j'ai perdu des amis il y a vingt ans. J'ai survécu aux camps avec la honte de m'en être sorti et pas eux. De ma famille et de mes amis, il ne me reste rien à part leurs souvenirs. Eichmann est mort. Et alors? Certes cela ne fera pas revenir ma famille, cela ne fera pas non plus revenir mes amis, mais au moins il a été jugé. Qu'il ait été pendu m'indiffère. Qu'il soit mort m'est égal. L'homme et le criminel ont été jugés et condamnés. J'étais dans le camp de Bergen-Belsen quand ce petit homme boiteux, rachitique et engoncé dans son uniforme avait inspecté le camp. Comme nous avions été avertis de sa visite, nous étions tous dehors à vouloir voir qui était ce Eichmann qui avait tant de haine contre nous. Je le vis marcher fièrement toisant les vieillards faméliques et regarder avec mépris les adolescents aux corps décharnés. Ce jour-là, j'étais à mille lieux de me douter que je reverrais cet homme moins de vingt ans plus tard dans une salle d'audience pour être jugé, De terrible bourreau actif et passif, il est devenu un simple citoyen banal pour reprendre l'expression d'Hannah Arendt. Eichmann est mort, mais le souvenir de nos frères de persécution ne doit pas pour autant l'être. Apprenons aux jeunes ce qui s'est passé pour qu'il n'y ait plus jamais d'autre Eichmann. ... »

Depuis plus de quarante ans qu'Eichmann est mort, les historiens n'ont cessé de spéculer sur sa vie et sur son action. La question la plus cruciale étant de définir sa responsabilité exacte dans la mise en œuvre de la solution finale. La plupart affirment qu'il savait exactement ce qu'il faisait et connaissait les conséquences de ses actes. Néanmoins, quelques-uns, dont son fils, estiment qu'il a été méjugé et qu'il ne faisait que son devoir de soldat allemand. Une troisième et très controversée analyse est faite notamment par Hannah Arendt, philosophe juive allemande exilée aux États-Unis lors de la montée du nazisme dans les années 1930 et qui a couvert le procès Eichmann pour le magazine The New Yorker. Dans son ouvrage Eichmann à Jérusalem qui compile ses chroniques de ce procès, Arendt conclut qu'Eichmann n'a montré ni antisémitisme ni troubles psychiques, et qu'il n'avait agi de la sorte durant la guerre que pour « faire carrière ». Elle le décrit comme étant la personnification même de la « banalité du mal », se basant sur le fait qu'au procès il n'a semblé ressentir ni culpabilité ni haine et présenté une personnalité tout ce qu'il y a de plus ordinaire.

Elle élargit cette constatation à la plupart des criminels nazis, et ce quel que soit le rang dans la chaîne de commandement, chacun effectuant consciencieusement son travail de fonctionnaire ou de soldat plus préoccupé comme tout un chacun par son avancement que par les conséquences réelles du travail. Beaucoup allèrent plus loin dans ce raisonnement en affirmant que chacun, pour peu que les bonnes conditions soient réunies, les bons ordres, les bonnes incitations données au bon moment, peut commettre les crimes les plus odieux, mais Arendt elle-même refusa cette interprétation.  Une autre analyse, menée par Christophe Dejours, essaie de mettre en relation le cas Eichmann et le recours aux stratégies de défense dans la banalisation du mal. On pourra lire a cet égard : Souffrance en France, où Christophe Dejours compare également sa propre analyse avec les écrits de Arendt.

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