publié le 12/05/2011 à 18h49
Les petits-enfants de Louis Renault attaquent l'Etat en justice pour contester la nationalisation-sanction de
Renault en 1945 et obtenir réparation, nouvelle étape d'une campagne pour réhabiliter l'industriel accusé de collaboration pendant la Seconde guerre mondiale.
Sept héritiers du constructeur ont déposé une assignation devant le tribunal de grande Instance (TGI) de Paris afin de contester l'ordonnance de confiscation du 16
janvier 1945, qui transforme Renault en une Régie nationale, sans que Louis Renault, décédé entre-temps, n'ait
été jugé.
Cette ordonnance "est contraire aux principes fondamentaux du droit de la propriété", droit constitutionnel, a déclaré l'avocat des héritiers, Me Thierry Lévy, qui a déposé une question
prioritaire de constitutionnalité (QPC).
Si l'ordonnance est inconstitutionnelle, le tribunal pourra dire que la nationalisation constituait une "voie de fait", a affirmé Me Levy, dont les clients demandent par conséquent une
indemnisation. Ils veulent voir "réparer le préjudice ayant résulté de la dépossession de l'ensemble des biens, droits et participations" de Louis Renault, selon la plainte dévoilée par le Monde et dont l'AFP a eu copie.
Il revient désormais au TGI de décider de transmettre ou non la QPC à la Cour de Cassation qui à son tour décidera de saisir ou non le Conseil constitutionnel. Les requérants sont les sept
petits-enfants de Louis Renault qui avec ses deux frères avait fondé l'entreprise en 1898 dans la maison de
campagne de leur père sur l'île Seguin à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine), transformée en ateliers.
Si l'épisode des taxis de la Marne durant la Première Guerre mondiale avait contribué à la popularité
du constructeur, son attitude durant l'Occupation fut plus controversée. Placé en 1940 sous contrôle allemand, Renault a fabriqué du matériel pour la Wehrmacht, ce qui lui valut d'être accusé de collaboration à la Libération et d'avoir été la seule entreprise à être
sanctionnée par une nationalisation.
A l'inverse des familles fondatrices de Citroën, Panhard et Peugeot, Louis Renault, arrêté en septembre 1944 pour
collaboration, est dépossédé par simple ordonnance. Il ne devait pas vivre cette expropriation, étant décédé le 24 octobre 1944 à la prison de Fresnes, sans avoir pu être jugé.
L'assignation déposée le 9 mai s'inscrit dans une campagne de réhabilitation de Louis Renault lancée par ses
petits-enfants.
En 2010, la justice avait condamné le Centre de mémoire d'Oradour-sur-Glane (Haute-Vienne) à retirer une photo montrant Louis Renault entouré d'Adolf Hitler et
d'Hermann Göring au salon de l'auto de Berlin en 1939, avec une légende dénonçant la collaboration de
l'entreprise française avec l'Allemagne nazie. Mais en 1959, ils avaient été déboutés d'une demande d'indemnisation par le tribunal administratif qui avait estimé que "le transfert de propriété"
édicté par l'ordonnance de 1945 "ne permet(tait) pas au héritiers d'invoquer un droit de propriété mais un simple droit de créances".
Le tribunal avait toutefois précisé qu'il ne lui revenait pas d'apprécier "ni la constitutionnalité, ni l'opportunité" de l'ordonnance de 1945. La création en 2008 de la QPC rend aujourd'hui
cette contestation possible par les héritiers. "S'ils arrivent à leur fins, cela peut coûter au contribuable français", déplorait en mars Sylvain Roger, ancien responsable CGT chez Renault.
Renault n'a pas souhaité faire de commentaire.
66 ans après la nationalisation de Renault, les héritiers de l'industriel attaquent l'Etat
Allemagne: verdict pour l'un des derniers procès des crimes nazis
publié le 12/05/2011 à 11h36
Le verdict contre John Demjanjuk, accusé de participation à l'Holocauste comme garde de camp
d'extermination, est prévu pour 10 h 30 GMT, a annoncé jeudi le président du tribunal de Munich (sud).
Lorsque le juge lui a demandé s'il avait quoi que ce soit à dire avant le verdict, John Demjanjuk, revêtu de
jeans bleus et d'un tee-shirt gris et portant ses éternelles casquette de base-ball et lunettes noires, a dit non en ukrainien, ce qui a été traduit en allemand par son interprète.
Le juge a également demandé tour à tour à tous les avocats s'ils avaient quelque chose à ajouter, ce que ces derniers ont décliné. Après quelque 18 mois de procès, le tribunal devrait dire si cet
apatride d'origine ukrainienne âgé de 91 ans est complice du meurtre de près de 27 900 Juifs au camp de Sobibor (Pologne), où il a été garde durant six mois en 1943, selon l'accusation.
Le procureur a réclamé six ans de prison sur les 15 qu'il encourt au maximum. L'accusé, qui a gardé le silence, nie les faits, et sa défense a réclamé l'acquittement de cette "victime de la
justice allemande". L'accusation ne disposait d'aucun témoin direct ou document compromettant, sinon une carte des SS établissant sa qualité de garde à Sobibor, récusée par la défense comme étant un faux de l'époque soviétique.
Pour la défense, rien ne prouve que Demjanjuk était à Sobibor et, s'il y était, soldat de l'Armée rouge
prisonnier des nazis, il n'a agi que contraint et forcé. Demjanjuk, qui avait été expulsé il y a deux ans des
Etats-Unis où il vivait depuis les années 50, après une longue bataille juridique centrée sur sa santé qu'il présente comme chancelante, a assisté aux débats en brancard ou en chaise roulante.
Son procès sera l'un des derniers des crimes nazis, avec celui du Hongrois Sandor Kepiro, 97 ans, qui vient de
débuter à Budapest.
Mais après l'Allemagne l'Espagne veut le juger pour avoir été garde dans un autre camp de concentration
où sont morts des prisonniers espagnols.
Allemagne : la chasse aux derniers nazis relancée par voie d'affiches
publié le 23/07/2013 à 09 h 39
68 ans après la fin de la Seconde guerre mondiale, la traque aux derniers criminels nazis est
relancée en Allemagne par une campagne d'affichage.
L'affiche nommée "opération de la dernière chance" a pour but de retrouver les derniers nazis encore en vie. (CENTRE SIMON-WIESENTHAL)
Les affiches, placardées à partir de mardi, montrent une photo en noir et blanc de l'entrée du camp d'extermination nazi d'Auschwitz-Birkenau, sous le titre "Opération dernière chance". La campagne, prévue dans les grandes villes du pays, a été lancée par le
Centre Simon-Wiesenthal, l'ONG qui notamment établit chaque année une liste des anciens bourreaux du
Troisième Reich les plus recherchés.
Soixante nazis pourraient encore être arretés
"Des millions d'innocents ont été assassinés par des criminels nazis. Quelques-uns des auteurs sont libres et en vie! Aidez-nous à les faire comparaître devant la justice", peut-on y lire. Suit
un numéro de téléphone. Une récompense allant jusqu'à 2.000 euros est promise pour toute information d'importance. "Nous n'avons plus beaucoup de temps. Deux ou trois ans au maximum", explique
l'historien Efraim Zuroff, directeur du Centre Simon-Wiesenthal en Israël et l'un des "chasseurs de nazis" les plus connus dans le monde. Selon lui,
une soixantaine de personnes pourraient être poursuivies, alors que les crimes nazis sont imprescriptibles en Allemagne. "Il y a eu environ 6.000 personnes qui ont travaillé dans les camps ou les
Einsatzgruppen", détaille l'historien. "On estime que 2% d'entre elles sont encore en vie, soit 120 personnes
et la moitié ne peuvent pas être poursuivis pour des raisons médicales, cela fait donc 60 restants".
Une justice trop tardive?
Deux cas, en Hongrie et en Allemagne, ont récemment montré que la quête de justice ne connaissait pas de répit. Mi-juin, le Parquet de Budapest a mis en accusation Laszlo Csatari, 98 ans, pour son rôle présumé dans la déportation de 12.000 juifs vers les camps de la mort. le
vieillard, qui nie les accusations, avait été arrêté il y a un an après que la justice hongroise eut été alertée par Efraim Zuroff. Son procès devrait commencer mi-septembre. En Allemagne fut interpellé début mai Hans Lipschis, 93 ans, soupçonné de complicité de meurtres dans le camp d'Auschwitz où il aurait été gardien. Le nonagénaire affirme qu'il y était cuisinier.
Son arrestation a réveillé un débat en Allemagne sur le sens d'une justice aussi tardive. Certains ont évoqué leur malaise de voir poursuivis des vieillards quasi-grabataires.
Une justice expéditive
L'ancien gardien du camp de Sobibor John Demjanjuk, condamné en 2011 à 5 ans de prison et mort un an plus tard, avait ainsi comparu en chaise roulante ou
sur un brancard --une mise en scène selon certains. Son verdict a créé une jurisprudence sur laquelle compte le Centre Wiesenthal: en tant que garde à Sobibor il fut jugé co-responsable des meurtres qui y furent perpétrés, malgré l'absence de preuve et
de témoin. Un "principe soviétique, et non démocratique", qui laisse une "amertume" dans la bouche d'un autre célèbre chasseur de nazis.
6500 condamnations depuis la fin de la guerre
Depuis le procès des principaux responsables du Troisième Reich à Nuremberg (1945-1946), 106.000
soldats allemands ou nazis ont été accusés de crimes de guerre. Quelque 13.000 ont été jugés et la moitié
d'entre eux condamnés, selon l'Office allemand chargé d'élucider les crimes nazis, basé à Ludwigsbourg (sud-ouest). Quelque 6 millions de juifs ont été exterminés par les nazis.
Oradour-sur-Glane: «Il ne devrait pas y avoir d’autres interpellations»
publié le 08/01/2014 à 16h11
JUSTICE – Un octogénaire allemand a été inculpé pour le massacre d’Oradour-sur-Glane dans
lequel 642 civils français ont trouvé la mort en 1944…
Le village d'Oradour-sur-Glane. CHAUVEAU NICOLAS/SIPA
«Il ne devrait pas y avoir d’autres interpellations dans le cadre de l’enquête sur le massacre d’Oradour-sur-Glane (Haute-Vienne)», a confié, mercredi, une source proche du dossier à 20 Minutes.
L’octogénaire allemand de 88 ans que le tribunal de Cologne (Allemagne) vient d’inculper pour sa participation au massacre d’Oradour devrait donc être le seul.
L’enquête menée depuis un an en Allemagne avait permis d’identifier six personnes qui auraient pu être impliquées dans le massacre de 642 civils en 1944. «Mais il n’y a quasiment plus de
survivants, indique notre source. Je pense qu’il n’y aura pas d’autres arrestations. Sinon, les enquêteurs allemands auraient annoncé la totalité des arrestations d’un coup.»
>> Relire: Oradour, Ascq: Ces lieux traumatisés
Entraide pénale internationale
Agé de 88 ans, l’homme inculpé outre-Rhin est accusé d'avoir personnellement tué 25 personnes et d'être «complice du meurtre de plusieurs centaines» d'autres lors des exactions commises par des
SS durant la Seconde
Guerre mondiale, a précisé le tribunal dans un communiqué. Il s'agit du plus important massacre de civils perpétré en France par les armées allemandes.
Pour remonter jusqu’à lui, les enquêteurs allemands avaient ouvert une procédure en janvier 2013. Se faisant, ils avaient sollicité l’aide de la France, au titre de l’Aide pénale internationale.
Dirigée depuis Paris par Aurélia Devos, vice-procureur et chef du pôle «crimes contre l’humanité» du
parquet de Paris, l’enquête s’était articulée autour de visites sur les lieux du drame, conservés depuis 1944, et l’audition de plusieurs rescapés. «Il y a des relevés topographiques, des
recherches d’archives et de nombreuses photographies prises sur place pour remonter la piste», confirme notre source.
Une rescapée: «Il faut faire toute la lumière»
Reste à savoir si 70 ans après les faits, il pourrait y avoir un procès pour cet octogénaire allemand de 88 ans. Si tel était le cas, ce procès se déroulerait alors en Allemagne car c’est à
Cologne que l’enquête a officiellement été lancée. «Les derniers rescapés seraient alors sans doute invités à témoigner», conclut notre source.
Contactée par 20 Minutes il y a un an, Camille Senon, l’une d’entre eux, en avait d’ailleurs pris l’engagement dans nos colonnes. «Pour le devoir de mémoire, il faut faire toute la lumière sur ce
crime de guerre qui est, pour moi, un crime contre l’humanité.»
Mouvement Solidariste Français (MSF)
Le Mouvement solidariste français était un mouvement politique français qui prit la suite du Mouvement jeune révolution au début des années 1970. Il noua une alliance avec les Groupes action jeunesse appelée « Action populaire ». En 1977, un certain nombre de militants de la mouvance solidariste, regroupés au sein de l'Union solidariste, adhérent au Front national avec Jean-Pierre Stirbois et Michel Collinot. Le MSF éditait une revue,Vecteurs.
Stirbois Jean-Pierre
Jean-Pierre Stirbois, né le 30 janvier 1945 à Paris, mort accidentellement le 5 novembre 1988 à Jouars-Pontchartrain
(Yvelines), était un homme politique français. Il fut le mari de Marie-France Stirbois, également engagée en politique. Après avoir participé en 1965 à la campagne présidentielle de Jean-Louis
Tixier-Vignancour, il milite au Mouvement jeune révolution (MJR - solidariste). En 1975, il crée avec Michel Collinot l'Union solidariste. En 1977, il rejoint le Front national et il en devient
Secrétaire général en 1981. Après avoir obtenu près de 10 % des voix dans un des cantons de la ville de Dreux en mars 1982, il confirme son implantation l'année suivante, aux élections
municipales, et provoque la surprise en obtenant plus de 16 % des voix sur la ville.
Entre les deux tours il fusionne sa liste avec celle du RPR menée par Jean Hieaux qui remporte la mairie et dont il devient l'adjoint, l'artisan de la première alliance entre la droite et le
Front national. Cette alliance est soutenue par la plupart des responsables politiques départementaux du RPR et de l'UDF qui en retiennent surtout un moyen de faire basculer la ville de gauche à
droite. Ce score important et cette alliance qui est condamnée par la plupart des journaux et des responsables politiques est la première victoire électorale d'importance pour le Front national,
il marque la réapparition du nationalisme comme force électorale. Il est élu député européen en 1984 sur la liste menée par Jean-Marie Le Pen. En 1986, le scrutin à la proportionnelle
départementale lui permet d'entrer à l'Assemblée nationale en tant que député des Hauts-de-Seine.
Jean-Pierre Stirbois fut pendant 8 ans l'homme qui mit en place l'organisation du Front national. Il disposait au sein du mouvement de solides réseaux qui, pour une partie d'entre eux
s'éloigneront après sa disparition pour participer au lancement du Comité Espace nouveau autour de Jean-François Touzé, de Roland Hélie et de Robert Spieler. Il incarnait au sein du FN la
sensibilité nationaliste et solidariste. Membre du Bureau politique du FN, il devient le rival de Bruno Mégret lorsque celui-ci commence à prendre de l'influence auprès de Jean-Marie Le Pen.
Après avoir effectué un voyage en Nouvelle-Calédonie pour défendre les liens entre celle-ci et la France, il trouve la mort dans un accident de voiture en revenant d'une réunion publique à Dreux.
Il est enterré au cimetière du Montparnasse à Paris. Sous le mandat de la FN Catherine Mégret, à Vitrolles (Bouches-du-Rhône), l'« avenue Jean-Marie Tjibaou » devient « avenue Jean-Pierre
Stirbois » ; depuis 2002, elle porte le nom d'« avenue des Droits de l'Homme ».
Aude - Annulation du testament de Charles Trenet : décision le 20 septembre
publié le 21/06/2011 à 16 h 45
Le testament de Charles Trenet, décédé il y a dix ans à l'âge de 87 ans, doit être annulé comme le réclament
deux parents du chanteur qui accusent l'héritier désigné de manoeuvres frauduleuses ? Le tribunal de grande instance de Créteil dira le 20 septembre.
Charles Trenet, le "fou chantant", est décédé il y a dix ans.
Au cours de cette audience, le TGI prendra également sa décision sur la recevabilité de l'action de Michel Paradis, un Québécois de 61 ans qui prétend être le fils du "Fou chantant" et qui s'est
associé à cette demande d'annulation.
Depuis de nombreuses années, Wulfran et Lucienne Trenet, neveu et demi-soeur du chanteur, contestent le testament que le chanteur a rédigé de sa main fin 1999 et qui a fait de son secrétaire
personnel, Georges El Assidi, son seul et unique héritier. Après deux plaintes pénales infructueuses, ils ont saisi la justice civile en 2008.
Pendant les débats qui se sont tenus ce mardi, l'avocat de Lucienne Trenet a martelé que le testament serait entaché de "manoeuvres frauduleuses". "Cet acte n'a pas été donné librement", a
soutenu Me Oleg Kowalski, accusant M. El Assidi d'avoir "dilapidé l'héritage" et d'avoir porté atteinte à "l'honneur" de la famille Trenet.
En réponse, l'avocate de Georges El Assidi, Me Hélène Bureau-Merlet, a manié l'ironie, fustigeant "l'action girouette" de Lucienne Trenet qui serait à la fois "irrecevable et injustifiée". "Ils
n'ont rien dans ce dossier, c'est tragique", a-t-elle soutenu, dénonçant la volonté "de salir" son client.
Le ministère public, qui n'a pas pris de position sur la querelle du testament, s'est en revanche prononcé pour le rejet de l'action de Michel Paradis au motif qu'il n'a jamais contesté sa
filiation existante. Son avocat, Me Mathieu Croizet, a regretté que la justice n'ait pas ordonné des tests ADN pour "lever définitivement" l'incertitude.
Narbonne - La justice rejette la demande d'annulation du testament de Charles Trenet
publié le 20/09/2011 à 16h01
Le tribunal de grande instance de Créteil a débouté mardi deux parents de Charles Trenet qui demandaient
l'annulation du testament qui a fait de l'ancien secrétaire personnel du "Fou chantant", Georges El Assidi, son seul et unique héritier, selon un jugement consulté par l'AFP.
Charles Trenet est décédé en 2001
Après deux plaintes pénales infructueuses, Wulfran et Lucienne Trenet, neveu et demi-soeur du chanteur narbonnais décédé en 2001, avaient saisi la justice civile, accusant M. El Assidi d'avoir
fait pression sur Charles Trenet pour se faire désigner légataire universel de l'ensemble de son patrimoine.
Selon eux, le testament, rédigé en 1999, aurait été dicté sous la contrainte à un moment où le chanteur, décédé deux ans plus tard à l'âge de 87 ans, n'était plus en possession de ses moyens. A
l'audience fin juin, Georges El Assidi avait réfuté ces accusations, assurant par la voix de son avocate être "un honnête homme".
Dans son jugement, le tribunal a débouté les plaignants estimant notamment que "la preuve de manoeuvres dolosives (frauduleuses, ndlr) n'est (...) pas rapporté".
Me Oleg Kowalski, l'avocat de Lucienne Trenet, a annoncé mardi son intention de faire appel.
Le tribunal a également déclaré irrecevable l'action de Michel Paradis, un Québecois de 61 ans qui s'était joint à la procédure en affirmant être le fils caché de Charles Trenet et d'une chanteuse québecoise.
Georges El Assidi, qui affirme vivre du RSA, est par ailleurs toujours en conflit avec la société danoise Nest à qui il avait confié en 2006 la gestion de son patrimoine et qu'il accuse de
l'avoir dépossédé. La justice française s'était déclarée incompétente en septembre 2008 et avait renvoyé l'affaire devant une juridiction danoise d'arbitrage.
Trenet : la justice valide le testament du “Fou chantant“
publié le 21/09/2011 à 06h30
Dix ans après la mort de Charles Trenet, la justice a débouté, hier, deux de ses parents qui soutenaient que le
testament ayant fait de l’ex-secrétaire personnel du "Fou chantant" son seul héritier était entaché de fraudes.
Dix ans après la mort de Charles Trenet, c'est toujours la guerre pour son héritage.
Le tribunal de grande instance de Créteil a également rejeté l’action d’un Québécois de 61 ans qui s’était joint à la procédure en affirmant être le fils caché de Charles Trenet et d’une chanteuse canadienne.
"Tout le monde a été débouté, mais moi je suis dégoûté (...) Ça fait quatre ans qu’on me pourrit la vie", a déclaré l’héritier désigné, Georges El Assidi, quinquagénaire fantasque qui assure
"vivre du RSA" après avoir été escroqué. Depuis plusieurs années, Wulfran et Lucienne Trenet, neveu et demi-sœur du chanteur, l’accusent d’avoir profité de l’état de faiblesse du poète, décédé en
2001 à l’âge de 87 ans, pour mettre la main sur un patrimoine évalué à plusieurs millions d’euros.
Après deux plaintes pénales infructueuses, notamment pour "euthanasie" et "extorsion", les deux parents avaient saisi la justice civile dans l’espoir d’obtenir l’annulation du testament. Dans son
jugement, le tribunal de Créteil a rejeté leurs arguments et estimé le document "valable".
Héritage de Trenet : la requête du “fils caché”
publié le 20/06/2011 à 06h00
Charles Trenet repose à Narbonne
Dans la bataille judiciaire qui oppose des parents de Charles Trenet et un éventuel fils caché à l’héritier
désigné du "fou chantant", une nouvelle manche se joue demain devant le tribunal de grande instance de Créteil. A 14 h, sera examinée la demande d’annulation du testament du Narbonnais Charles Trenet, décédé en 2001 à l’âge de 87 ans, qui a fait de son ancien secrétaire particulier, Georges El Assidi,
son unique héritier. Cette requête a été déposée par le neveu et la demi-sœur du chanteur et par un Québécois de 61 ans qui prétend être son fils. Depuis de nombreuses années, Wulfran et Lucienne
Trenet estiment que Trenet a été abusé au moment de rédiger son testament en 1999. Après deux plaintes pénales
infructueuses, ils ont engagé une procédure civile.
Ils ont été rejoints dans leur action par un Québécois, Michel Paradis, qui affirme être né d’une liaison que Charles Trenet a eue au Québec et qui dit avoir ensuite été confié à un couple qui l’a reconnu et élevé. Après une
première audience en février, le tribunal de Créteil doit examiner demain la recevabilité de l’action de M. Paradis. Il va solliciter demain une expertise génétique à laquelle Lucienne Trenet est
favorable. "Si M. Paradis n’est pas le fils de Charles Trenet, il repartira à ses activités au Canada", a
déclaré son avocat.
Narbonne Qui va hériter de Trenet ?
publié le 19/09/2011 à 19h14
Dix ans que le "Fou chantant" né à Narbonne est mort. Et son héritage est réclamé par quatre personnes: le neveu, la demi-sœur, l'ex-secrétaire particulier, et un prétendu fils caché…
La maison de Charles Trenet à Narbonne
Charles Trenet est mort en février 2001, mais sa succession n’est toujours pas close. Et c'est au tribunal de Créteil (Val-de-Marne)de trancher et de décider qui de l’ex-secrétaire particulier,
du neveu, de la demi-sœur, ou même du prétendu fils caché venu du Canada, recevra le pactole, estimé à plusieurs dizaines de millions d'euros en droits et titres.
Et cette décision doit être rendue demain. Il aura fallu une décennie.
Une succession qui a tourné à la guerre entre les héritiers
Depuis le décès du chanteur en 2001, sa succession fait l'objet d'une âpre bataille. Son neveu et sa demi-soeur, Wulfran et Lucienne Trenet, clament que le testament rédigé en 1999 a été dicté
sous la pression de Georges El Assidi, l'ex-secrétaire personnel de Charles Trenet qui a hérité de l'ensemble de son patrimoine (droits artistiques, propriétés immobilières...). Après avoir
déposé deux plaintes pénales infructueuses pour "extorsion", "abus de faiblesse" ou "euthanasie", ces deux parents s'en sont remis à la justice civile pour obtenir l'annulation de ce testament
entaché, selon eux, d'irrégularités.
A l'audience, fin juin, l'avocat de Lucienne Trenet, Me Oleg Kowalski, avait brossé le portrait peu flatteur d'un héritier vénal et manipulateur qui se serait rendu coupable de "captation
d'héritage" en profitant de l'état de santé déclinant de Charles Trenet, décédé à l'âge de 87 ans.
Un acharnement judiciaire contre l'ancien secrétaire de Trenet ?
En réponse, le conseil de M. El Assidi avait crié à l'acharnement judiciaire contre son client, un "honnête homme". Selon Me Hélène Bureau-Merlet, Charles Trenet était en pleine possession
de ses moyens au moment de rédiger son testament au profit d'un homme qu'il connaissait depuis vingt ans. "D'un point de vue purement juridique, l'action est totalement irrecevable et
injustifiée", avait-t-elle plaidé, jugeant par ailleurs fantaisiste l'action du prétendu fils caché de Charles Trenet.
La cinquantaine élégante et fantasque, M. El Assidi a lui aussi réfuté toute malversation. "La vérité, c'est qu'ils attaquent Charles Trenet, comme il ne peut pas parler aujourd'hui",
déclarait-il à l'issue de l'audience, ajoutant, l'air las: "Je patiente (...), on verra bien". Une chose est sûre: quel que soit le jugement rendu mardi, l'héritier de Charles
Trenet n'en aura pas fini avec les tracas judiciaires.
Imbroglio juridique
En juillet 2006, M. El Assidi avait confié la gestion de son patrimoine à la société danoise Nest qu'il accuse aujourd'hui de ne pas avoir respecté ses engagements et de l'avoir dépossédé.
Saisie, la justice française s'était déclarée incompétente en septembre 2008 et avait renvoyé l'affaire devant une juridiction danoise d'arbitrage.
En attendant, M. El Assidi a fait séquestrer ses droits et n'est donc pas en mesure de profiter de son legs. Théoriquement à la tête d'un vaste patrimoine, il déclarait récemment "vivre du
RSA".
Réponse demain...
Trenet: des rumeurs l'ont poursuivi toute sa vie
publié le 17/05/2013 à 18h32 par Bertrand Guyard
Tout au long de son existence, le «Fou Chantant» a été l'objet de bruits, souvent malveillants, qui, pourtant, n'ont pas nui à sa longue carrière.
Le néologisme «buzz» n'existait pas encore. Et pourtant, Charles Trenet a traîné comme un boulet une litanie de
malveillances et de fausses rumeurs durant presque toute sa carrière.
Ses ennuis commencent dès le début de la Seconde guerre mondiale. Le soldat Trenet est appelé sous les
drapeaux. Juste après son incorporation, les journaux annoncent sa mort. Paris Soir publie une nécrologie mélodramatique: «Midinettes vos beaux yeux vont pleurer: le prince charmant de la chanson
est mort en avion (sic!)...». L'artiste doit démentir. Il écrit dans le Marianne du 18 octobre 1939: «M et Mme Bobard ont décidé que j'étais mort... mais il n'en est rien, mes amis,
réjouissez-vous je suis bien vivant». La même mésaventure lui arrivera quarante ans plus tard. Selon Jacques Pessis, l'un des grands défenseurs de la chanson française, il affichera toujours
envers ses oiseaux de mauvais augure que du mépris.
Ce que ne sait pas le chanteur c'est que ses tourments ne font que débuter. Après la défaite de juin 40, l'Allemagne nazie occupe la moitié de la France. L'époque est troublée. La délation et la
rumeur malveillante deviennent la loi commune. Le chanteur, très populaire, jouit d'une grande notoriété, il est une cible idéale. Le 2 septembre 1940, L'Action Française parle du «chanteur juif
Netter dit Charles Trenet». Je suis partout, Le Réveil du peuple et d'autres journaux collaborationnistes
continueront de plus belle. Sa propre mère devra présenter un certification d'aryanisation à la Kommandantur.
Le Sacerdoce de Charles Trenet n'est pourtant pas fini. Après avoir été dénoncé comme «juif», le chanteur est
soupçonné d'être un collaborateur. Là encore la rumeur est folle. L'artiste a pourtant plusieurs fois essayé de se défiler lorsqu'il savait que des soldats allemands assistaient à ses
représentations. Après la victoire des Alliés, Trenet sera finalement lavé de tout soupçon, non sans être passé devant un comité d'épuration. Bien des années plus tard, il confiera à Jacques
Pessis que cette décision fut prise «au regret évident de certains de ses membres».
Des amours mouvementées
Jacques Pessis ne semble pas croire à l'homosexualité du poète chantant. Pour étayer sa thèse, qui n'est pas celle de Jean-Philippe Ségot, qui vient de sortir une exhaustive biographie Charles
Trenet à ciel ouvert, il a recensé une myriade de femmes que le poète aurait aimé. Dans l'ordre chronologique de leur apparition, furtive dans la vie du chanteur: une Miss France, Simone Signoret
alors qu'elle n'était encore que figurante, Corinne Luchaire, une jeune comédienne, Monique Pointier, une admiratrice.... En fait, Charles Trenet n'aima vraiment qu'une seule femme dans sa vie,
sa mère, Marie Louise-Caussat, un soutien indéfectible tout au long de sa vie.
Annual Payments: Berlin Helps Ethnic Germans in Eastern Europe
published 18/11/2013 at 01:28 PM
The German government spends more than 20 million euros per year on helping ethnic Germans living in Eastern Europe, SPIEGEL has learned. The payments are "an expression of special historical
responsibility" for their suffering after World War II, Berlin says.
Graphic showing German payments to ethnic German minorities in Eastern Europe.
The German government spends more than €20 million ($27 million) per year on programs to support German minorities living in Eastern Europe.
The payments are an "expression of special historical responsibility," says the German Interior Ministry, and are intended to compensate people for the injustice they suffered in their countries
after World War II.
The figures were made available by the ministry in response to a request from SPIEGEL. They don't include payments made by the Foreign Ministry, the Culture Ministry or Germany's 16 regional
state governments.
The government contributes to financing care for the elderly, language tuition and cultural events for some one million people. It also subsidizes the German-Russian children's magazine
Schrumdirum, paying €244,000 per year for subscriptions.
The per capita expenditure varies widely. Germans in Romania get almost €48 per year on average, compared with just €2 for Germans in Hungary.
The German government doesn't know how big its target group really is, though. The payments are based on local censuses in which people were asked if they saw themselves as ethnic Germans. For
example, in 2011, only 109,000 Poles said they did, while minority associations put the figure of German Poles at up to 350,000.
In Russia, the figure could be 600,000 people rather than the 400,000 cited by the German Interior Ministry. In Hungary, successive censuses have increased the estimate for ethnic Germans from
30,000 to 86,000 between 1990 and 2011.
For the whole of Eastern Europe, the figure could be between 1 million and 1.5 million people.
This kind of support can be linked back to the Federal Expellee Law of 1953, which defines the rights of ethnic Germans or German citizens who were either expelled or fled as refugees from
Central and Eastern Europe after the war. In June, the German parliament called on the government to "continue the aid policy for the German minorities."
'Degenerate Art': List of 25 Works from Munich Find Made Public
published 12/11/2013 at 01:04 PM
German authorities on Monday published a list of 25 out of roughly 1,400 artworks discovered in a Munich apartment. The move is
the first step in an effort to speed research into the provenance of Nazi-era acquisitions, following international criticism of Germany's handling of the discovery.
Authorities have publicized the names of 25 paintings out of the astounding cache of more than 1,400 artworks discovered in the Munich apartment of a reclusive collector whose father was
reportedly hired to procure works for Hitler throughout Nazi-occupied Europe.
The paintings have been catalogued on Lostart.de, Germany's Magdeburg-based central database for missing works. All of the artworks, listed here in alphabetical order, are thought to have been
acquired by means "linked to Nazi persecution."
- Antonio Canaletto: "S.A Giustina in Prà della Vale" in Padua, graphic print, 1751/1800
- Marc Chagall: "Allegory/Allegorical Scene," undated painting
- Hans Christoph: "Couple," watercolor, 1924
- Honoré Daumier: "Don Quixote and Sancho Panza," painting, c. 1865
- Eugène Delacroix: "Moorish Conversation on a Terrace," undated pencil drawing
- Otto Dix: "Woman in the Theater Box," watercolor, 1922 and "Dompteuse," watercolor, 1922
- Conrad Felixmüller: "Couple in a Landscape," watercolor, 1924
- Erich Fraass: "Mother and Child," watercolor, 1922
- Bonaventura Genelli: "Male Nude", undated drawing
- Ludwig Godenschweg: "Male Portrait," undated graphic print and "Female nude," undated graphic print
- Otto Griebel: "Child at Table," undated watercolor and "Veiled Woman," watercolor, 1926
- Bernhard Kretschmar: "Tram," undated watercolor
- Wilhelm Lachnit: "Girl at Table," watercolor, 1923 and "Man and Woman in the Window," watercolor, 1923
- Max Liebermann: "Riders on the Beach," painting, 1901
- Fritz Maskos: "Thinking Woman," graphic print, 1922
- Henri Matisse: "Seated Woman/Woman Sitting in Armchair," painting, c. 1924
- Auguste Rodin: "Study of a Woman Nude, Standing, Arms Raised,
- Hands Crossed Above Head," undated drawing
- Théodore Rousseau: "View of the Seine Valley," undated drawing
- Carl Spitzweg: "Playing Piano," drawing, c. 1840
- Christoph Voll: "Monk," watercolor, 1921 and "The Master Exploder Hantsch," drawing, 1922
Quarante ans de Cahiers d’histoire
publié le 18/12/2012 à 18h07 par Nicolas Devers-Dreyfus
Les Cahiers célébraient leurs quarante ans, une belle persévérance, sachant la fragilité économique d’une revue, les trésors de dévouement rédactionnel à mobiliser pour assurer sa pérennité,
et les tensions au sein du PCF, tout au long d’une période tourmentée. Un anniversaire réussi – organisé par l’équipe animée par Anne Jollet, directrice des Cahiers depuis 2001 – commencé
vendredi 8 décembre à Fabien, puis accueilli, le lendemain, dans les illustres et vénérables locaux de l’École normale supérieure, rue d’Ulm.
Histoire et engagement le vendredi, avec des invité(e)s très divers, chercheurs et acteurs des mobilisations associatives et politiques, mais qui tous ressentaient la prégnance du mouvement des
luttes émancipatrices. Oui, l’histoire engage, par ce qu’elle dit comme par ce qu’elle ne dit pas, elle engage même ceux qui refusent de s’engager, réfugiés dans l’érudition.
Samedi, les Cahiers firent leur histoire, et les jeunes historiens présents n’en ont pas été déçus. Elle se tissa par l’étude de dizaines de livraisons, d’un grand apport, par l’attention
chaleureuse portée au fonctionnement d’un lieu d’échanges intellectuels, ainsi qu’aux parcours biographiques, aux rencontres qui se sont nouées entre chercheurs. Depuis les prémices, en 1964, le
Manuel d’histoire, puis les Cahiers de l’Institut Maurice-Thorez pilotés par Jean Burles, les historiens communistes se dégagèrent progressivement d’une conception de l’histoire bataille, de la
seule collecte des souvenirs militants, voire de l’histoire hagiographique.
Sous le regard amical de Claude Willard, dont les travaux et ceux de Germaine Willard ont tant appris, de Claude Mazauric et de Francette Lazard, les animateurs successifs de la revue ont
témoigné, avec un méritoire effort d’objectiver leurs souvenirs en historiens. Exercice difficile qu’a remarquablement réalisé Roger Martelli, son premier animateur, avec le concours de Richard
Lagache et d’une pléiade d’alors jeunes chercheurs, dont Roger Bourderon. Jean-Paul Scott et Serge Wolikow ont complété le panorama des années 1970 et 1980. Ils ont notamment évoqué les chemins
parallèles des équipes des Cahiers et du Cerm. Claude Pennetier, directeur du Maitron, délivra le point de vue d’un chercheur extérieur à la rédaction des Cahiers.
Passage de génération : Frédéric Génevée, qui succéda à Roger Martelli, présenta la « rupture » de 1995, lorsque les Cahiers devinrent « d’histoire critique », animés par une équipe de jeunes
historiens militants. Les chercheurs italiens, compagnons des Cahiers, valorisent l’approche comparatiste, moteur de l’histoire critique. L’après-midi s’est tournée vers les productions récentes.
Une table ronde a porté sur les luttes sociales et les révolutions, avec les contributions de Claude Mazauric, sur la Révolution française, et de Stéphane Sirot, sur les luttes sociales.
Caroline Fayolle, spécialiste de l’approche genrée des révolutions, souligna l’intérêt des dossiers novateurs consacrés à l’étude des sexualités. Puis vinrent les interventions marquantes de
Jérôme Lamy, sur l’importance du rapport critique à l’histoire des sciences dans la revue, de Catherine Coquery-Vidrovitch, sur les dossiers consacrés aux Sud et/ou à l’histoire coloniale, de
Massimo Préaro, spécialiste de l’homosexualité et auteur de la prochaine livraison des Cahiers.
Parole fut donnée, en conclusion, à Laurent Willemez, sociologue, Priscilla Ferguson, spécialiste de la littérature française, Pierre Boichu, archiviste du fonds communiste. Tous montrèrent la
grande richesse des Cahiers.
Libération : quand les ministres communistes changeaient la vie
publié le 23/11/2012 à 18h09 par Michel Étiévent, écrivain
1944-1946 : pour la première fois, les communistes participent au pouvoir. Pendant cette période, riche de changements politiques profonds, les cinq ministres communistes vont provoquer une
véritable cassure dans la manière d’envisager une nouvelle politique au service de l’humain.
Le 31 août 1944, alors que les troupes alliées se battent encore sur le sol français, le général de Gaulle forme le premier gouvernement provisoire. Il compte deux communistes : François Billoux et Charles Tillon. Le 13 novembre 1945, le deuxième gouvernement du général de Gaulle est caractérisé par l’entrée de cinq ministres communistes : Maurice Thorez, Ambroise Croizat, François Billoux, Marcel Paul et Charles Tillon. Les ministres communistes vont devenir acteurs de l’invention sociale, provoquant une véritable cassure
dans la manière d’envisager une nouvelle politique au service de l’humain.
Toutes les conditions sont réunies en 1945 pour une rupture : un programme inspiré du Conseil national de la Résistance sous-tendu par la volonté de mettre l’homme au centre de tous les choix ;
un rapport de forces pour l’appliquer – 29,9 % des voix au PCF, 5 millions d’adhérents à la CGT ; une classe ouvrière grandie par sa lutte héroïque dans la Résistance ; un patronat déconsidéré
par sa collaboration. S’y ajoutent des hommes issus du mouvement ouvrier et capables d’incarner ce mouvement. Des conditions repérables au fil des grands moments de notre histoire sociale et qui
fondent tout changement majeur.
Dès la mise en place du deuxième gouvernement de De Gaulle, en novembre 1945, l’objectif est de mettre en application, dans un pays ruiné, les dispositions du programme du CNR. Son préambule
résonne aujourd’hui d’une actualité brûlante : « Nous réclamons l’instauration d’une véritable démocratie sociale, impliquant l’éviction des féodalités financières de la direction de l’économie
et le retour à la nation des moyens de production, de l’énergie, des richesses du sous-sol… » Empruntons, pour ce faire, le sillage de deux ministres à l’œuvre, sans doute deux des grands
innovateurs sociaux du siècle : Ambroise Croizat et Marcel Paul.
Le soir même de sa nomination au ministère du Travail, Croizat, fils de manœuvre, secrétaire de la fédération CGT des métaux, donne le sens de son combat. Ses premiers mots sont pour le peuple :
« Ministre du Travail, j’entends demeurer fidèle à mon origine, à mes attaches ouvrières, et mettre mon expérience syndicale au service de la nation. » Son discours signe la force du changement :
« Nous mettrons l’homme à l’abri du besoin. Nous en finirons enfin avec les angoisses du lendemain ! » Il lance parallèlement un appel au peuple mobilisé, à l’irruption d’une dynamique sociale
nécessaire au changement : « Il n’y a pas de politique efficace sans l’accompagnement d’un peuple vigilant. Rien ne pourra se faire sans vous. Le changement n’est pas qu’une affaire de lois. Il
réclame votre participation dans la rue, la cité, l’entreprise. Il demande vos mains ! »
Cet appel s’accompagne d’une forte présence sur le terrain, qui rompt avec la politique clanique et électoraliste de la IIIe République. François Billoux le rappelle dans son livre, Quand nous
étions ministres : « L’essentiel du temps de nos ministres se passait en réunions directes au cœur des entreprises, dans les hôpitaux, les municipalités. Il s’agissait de vraies discussions, où
les gens apportaient leurs propositions, leurs solutions. » Les premiers pas d’une démocratie participative qui aboutit à la création de 138 caisses de Sécurité sociale gérées par les
travailleurs.
Même exigence au ministère de la Production industrielle, où Marcel Paul, le jour de son investiture, s’adresse ainsi aux hauts fonctionnaires : « On ne vous paie pas pour que vous m’indiquiez
les articles du Code m’interdisant de réformer, mais pour y trouver ceux qui vont me le permettre ! » Et les électriciens et gaziers, devenus par le biais de la nationalisation, selon les mots de
Paul, « acteurs, citoyens, gérants de leur entreprise », redonneront à la France l’énergie qui lui manquait. « À développement économique à la hauteur des ambitions de la nation, il faut un
statut social à la hauteur des besoins des hommes. » Cette phrase de Paul, étonnante de modernité, traverse la politique mise en place sous l’inspiration du CNR.
L’objectif est clair : allier l’essor économique au progrès social. D’où le statut des électriciens et gaziers du 22 juin 1946, celui des mineurs, ou, avec Croizat, l’institution d’une vraie
« protection sociale » qui offre les moyens d’espérer des lendemains sereins. Là est l’innovation première de la pratique des ministres communistes à la Libération. Il faut y ajouter la capacité
à mener de pair deux politiques : l’une faite de grandes idées transformatrices de la société à long terme (l’instauration de la Sécurité sociale, par exemple) ; l’autre, d’une politique de
satisfaction immédiate des besoins des gens : doublement du montant des allocations familiales, institution de la retraite, lois sur les heures supplémentaires, augmentation des salaires,
création de la fonction publique… Un corpus de lois sociales impressionnant donne au peuple français la dignité de son identité sociale…
(*) Auteur d’Ambroise Croizat ou l’invention sociale, suivi de Lettres de prisons 1939-1941.
La Sécurité sociale « Outre le fait qu’elle ouvre le droit à la santé pour tous, la Sécurité sociale a pour objectif de relever la France de ses ruines. Elle offre au salarié une tranquillité
sociale qui lui permettra de reconstruire le pays à l’aune de ses besoins. » Ainsi s’exprime Ambroise Croizat, inaugurant le nouveau système de Sécurité sociale en 1945. « Nous bâtirons un plan
de sécurité sociale visant à assurer à tous les citoyens des moyens d’existence au cas où ils sont incapables de se les procurer par le travail avec gestion des intéressés et de l’État. » Croizat
reprend l’article 21 de la Déclaration des droits de l’homme de 1793 qui établissait le droit au travail et à la santé. Cent trente-huit caisses sont édifiées en moins de huit mois sous sa
maîtrise d’œuvre par un peuple anonyme après le travail ou sur le temps des congés. Quatre principes charpentent l’institution. L’Unicité : tous les « risques sociaux » sont regroupés dans une
seule caisse en proximité des assurés ; la Solidarité : pilier de l’édifice qui est financé par les richesses créées dans l’entreprise ; l’Universalité ; la Démocratie.
Louis aragon Des articles majeurs à (re)découvrir
publié le 12/09/2012 à 18h21 par François Eychart
Poète, romancier, résistant, communiste… Aragon était aussi un grand journaliste qui combattit avec panache
Pétain et l’occupant nazi. De Ce soir aux Lettres françaises, il est l’auteur de centaines d’articles
importants.
Quand on parle d’Aragon, on évoque le poète, le résistant, le communiste, le romancier,
le surréaliste, l’amoureux d’Elsa, mais presque jamais le journaliste. Or, Aragon a aussi été un grand journaliste. Ses écrits journalistiques, qui comptent des centaines de pages, constituent une
sorte de contrepoint à son œuvre.
Des années 1920 à sa mort en 1982, Aragon collabore à Paris journal, Littérature, la Révolution surréaliste,
Clarté, Commune, Europe, l’Humanité, Ce soir, les Étoiles, les Lettres françaises. Dans cette liste, Ce soir et les Lettres françaises ont un statut particulier puisqu’il les a longtemps
dirigés.
Si on met de côté les quelques semaines passées à la tête de Paris journal, que lui confie Jacques Hébertot en 1923, ses véritables débuts de journaliste ont lieu quand il entre à l’Humanité, en
1933, sur proposition de Vaillant-Couturier. D’abord, confiné aux rubriques sur les chiens écrasés (histoire de l’éprouver), il accède vite à des sujets de plus grande ampleur, notamment pendant
les événements de février 1934. En 1936, Maurice Thorez décide de lui confier la direction d’un nouveau
quotidien qui soutiendra le Front populaire : Ce soir. Aragon accepte à la condition d’y associer Jean-Richard
Bloch, dont il connaît la rectitude intellectuelle et les qualités littéraires. Bloch, qui ne faisait jamais les choses à moitié, redoutait d’y compromettre son activité d’écrivain. Au terme
d’une nuit de discussion, Aragon arrache son accord. L’un comme l’autre sont alors hantés par la montée du
fascisme. Le premier numéro de Ce soir paraît en mars 1937, grâce au talent d’organisateur de Gaston Bensan. Les deux directeurs travaillent en parfaite intelligence et imposent d’emblée une
ligne éditoriale. Ils font appel à des collaborateurs très variés. On y trouve des photographes comme Cartier-Bresson, Capa, Gerda Taro, les signatures de Robert Desnos, Jean Cocteau, du futur
acteur Alain Cuny, de Fernand Léger, de Boris Taslitzky, de la journaliste Andrée Viollis, des écrivains Louis Parrot, Édith Thomas, Pascal Pia, Elsa Triolet, etc. Paul Nizan y couvre la politique étrangère. Ce soir est ouvert aux menus événements de la vie
quotidienne, tout en sachant les relier aux problèmes majeurs de l’époque. Chaque fois que son orientation est trouvée dérangeante, Maurice Thorez apporte son soutien aux deux directeurs. Le
journal atteint rapidement des ventes de l’ordre de 250 000 exemplaires. Aragon contribue au rayonnement du
journal par de nombreux articles, notamment ceux de la série Un jour du monde, qui commente brillamment l’actualité au jour le jour. Il poursuit à temps volé le roman les Voyageurs de
l’impériale, qu’il a commencé en 1936. Ce soir combat avec panache pour la réussite du Front populaire, pour l’Espagne républicaine, contre Munich et la politique d’apaisement envers Hitler. Il
sera brutalement interdit, comme toute la presse communiste, en août 1939, à la suite du pacte germano-soviétique.
Les Lettres françaises naissent en 1941, lors d’une discussion entre Aragon, Jacques Decour et Georges Politzer,
qui menaient depuis 1940 le combat clandestin des communistes dans les milieux intellectuels. L’objectif est de parvenir à un large rassemblement des intellectuels, dans le cadre du Front
national contre Pétain et l’occupant nazi. C’est pourquoi Aragon veut que Jean Paulhan fasse partie de l’équipe des Lettres. Decour ne verra pas le premier numéro, il sera pris et
fusillé, comme Politzer. Claude Morgan est alors chargé de reprendre le projet. Pendant ce temps, Aragon fonde,
en zone sud, un journal similaire, les Étoiles. Le premier numéro des Lettres sort en septembre 1942, celui des Étoiles en février 1943. Ces petites feuilles mal imprimées, distribuées au péril
de la vie des militants, portent très haut la parole de la France et sont l’expression de l’intelligence en guerre contre la barbarie (1).
À la Libération, fatigué et surchargé de travail, Aragon revient brièvement à la direction de Ce soir, avant
qu’elle soit confiée à Jean-Richard Bloch, à sa satisfaction. Au décès de celui-ci, en 1947, il reprend ses fonctions jusqu’à la fin du journal, en 1953. Il succède alors à Morgan à la direction
des Lettres françaises. Trois semaines plus tard, Staline meurt. Lecœur, qui dirige le PCF en l’absence de Thorez, mène une politique de caporalisation des intellectuels. Il reproche à Aragon d’avoir piétiné la douleur des communistes en publiant un portrait iconoclaste de Staline, signé de Picasso, et
déclenche une violente campagne contre lui. Quelque temps auparavant, il s’en était pris à Moussinac. À partir de cette expérience, avec l’appui de Thorez, Aragon tisse les fils qui lui
permettront de faire des Lettres françaises le meilleur hebdomadaire culturel français. André Wurmser, George Besson, Georges Sadoul, Elsa Triolet font régulièrement des chroniques. Accordant un intérêt toujours renouvelé aux jeunes talents, Aragon les présente généreusement. Parmi eux : Philippe Sollers, Lionel Ray, Bernard Vargaftig, Jacques Roubaud, Maurice
Regnaut, Pierre Lartigue, Jean Ristat… Il s’élève de plus en plus fortement contre les mesures qui briment la liberté de création en URSS et dans les autres pays socialistes. Il le fait au nom du
communisme, dont il ne cesse de se réclamer. Les polémiques qu’il mène sont retentissantes, dépassant parfois les capacités de gestion de la direction du PCF.
Ces mêmes années sont celles qui voient mourir ses amis : Éluard, Tzara, Breton, Courtade, Moussinac… Il leur consacre des textes qui resteront parmi les plus beaux. L’automne de sa vie a, pour
ses lecteurs, le goût d’un merveilleux printemps.
Lorsque la fin des Lettres françaises est programmée, en 1972, il publie la Valse des adieux, dans laquelle se trouvent ces mots : « J’ai gâché ma vie. » Certains ont voulu y lire l’aveu enfin
exprimé de l’échec de son engagement communiste, voulant à toute force qu’Aragon n’ait fait que porter un masque.
Si elle exprime l’usure des espérances, la douleur des coups reçus des siens, l’inquiétude sur l’avenir, cette Valse ne traduit aucunement le désaveu du chemin qu’il avait pris jadis et qu’il a
suivi jusqu’au bout. Lui qui disait : « Nous sommes les gens de la nuit qui portons le soleil en nous », n’a cessé d’intervenir sur l’histoire des hommes pour que le peuple cesse d’être l’ennemi
de lui-même et que vienne le temps du chant pour tous.
(1) Les Lettres françaises et les Étoiles dans la clandestinité ont été rééditées aux éditions Le Cherche-Midi.
Paul Vaillant-Couturier Politique, journaliste, artiste : un arc-en-ciel de talents
publié le 20/07/2012 à 18h31 par Patrick Apel-Muller
«Je revois ce canapé sanglant, sous l’escalier du casino de Saint-Sébastien, où avait été attaché nu, par les fascistes, un jeune soldat asturien. Une large tache sombre de sang séché
marquait encore le velours jaune, reproduisant la forme d’un corps humain. Et de là, le sang avait ruisselé sur le dallage. » Paul Vaillant-Couturier publie ce reportage dans l’Espagne franquiste le 9 mai 1937. Trois jours plus tard le
rédacteur en chef de l’Humanité dénonce en Guernica « le résultat d’une expérience scientifique qui porte la marque indélébile de l’état-major allemand des rebelles » et s’indigne de « la
monstruosité du blocus à sens unique de l’Espagne ». Journaliste, il s’est rendu sur le terrain ; responsable politique, il mesure les périls en germe ; ancien combattant révolté par les
boucheries, il pressent les temps enragés qui s’annoncent.
Singulier destin que celui de cet enfant des beaux quartiers, élevé dans une pépinière des beaux-arts, lui-même peintre,
musicien et poète, jeune homme portant monocle pour mieux regarder les dames. Le voilà dès les premiers jours au cœur du chaos, en 1914, plongé dans les tranchées, les gaz, les combats de chars ;
blessé, honteux de ce que deviennent les hommes dans cet enfer ; héros décoré mais officier révolté qui finit la Première Guerre mondiale dans une forteresse où l’ont conduit ses écrits et ses
propos. Un choc radical qui lui fera mettre en cause les fondations bien élevées de la Belle Époque, l’alliance du capital, de la politique et des badernes galonnées, qui ressuscitera en lui les
prémonitions de Jaurès, qu’il avait écouté en août 1914 au Pré-Saint-Gervais. « Combien faudra-t-il de trains rouges, / comment il en faudra de nombreux encore / pour guérir tout le mal sonore /
fait par les clairons des trains tricolores », écrit-il dans Clarté.
Pour s’évader de cette faillite des hommes, il faut imaginer tout autre chose. Avec Henri Barbusse auréolé de son Goncourt obtenu pour le Feu, implacable réquisitoire contre la guerre, Vaillant-Couturier imagine une Internationale de la paix et du progrès, et en jette les fondements avec
l’Association républicaine des anciens combattants, l’Arac. Depuis 1916, il a en poche la carte du Parti socialiste. Mais il juge sa formation déshonorée par son acceptation de la guerre. En
novembre 1919, alors que le pays désigne la Chambre bleu horizon, peuplée de militaristes et de représentants directs des grandes familles enrichies par le massacre, il est élu député de la
Seine, en militant pour « l’adhésion à la Troisième Internationale », créée par les bolcheviks. Il rode ses capacités de tribun qui en feront l’orateur le plus apprécié du Front populaire avec
Thorez. Il ferraille sans relâche et sans compromis dans cette assemblée réactionnaire…
Lorsque s’ouvre le Congrès de Tours, Vaillant-Couturier est, à trente-trois ans, l’un des représentants
les plus éclatants de la nouvelle vague du Parti. Il fait cause commune avec Marcel Cachin, qui porte la motion
favorable à l’adhésion à l’Internationale. Dans l’une de ses prises de parole, il déchire l’illusion « agréable de pouvoir concilier les inconciliables ». Tandis que Blum refuse le vote
majoritaire et annonce qu’il gardera « la vieille maison », le jeune député de Paris espère que les hommes qui, en cette fin 1920, ne « peuvent plus travailler ensemble » se « retrouveront
peut-être sur certains terrains, pour des actions communes ». Il faudra attendre les émeutes de 1934 et les premiers pas du Front populaire. En attendant, Vaillant combat et écrit. Contre les guerres coloniales et l’écrasement de la République rifaine d’Abd El
Krim ; contre les répressions des grandes grèves ouvrières ; contre la militarisation. Il devient en avril 1926 le rédacteur en chef de l’Humanité. Il veut la transformer, en faire le lieu où se
marieraient la pertinence ouvrière, les intellectuels français et l’engagement révolutionnaire, un grand quotidien d’information, autre chose qu’un simple instrument de propagande. L’heure n’est
pas arrivée de bâtir ce creuset. Malgré la sympathie du directeur du journal, Marcel Cachin, malgré ses
reportages passionnants à Moscou, où il invite à comprendre la réalité soviétique au-delà des a priori positifs et négatifs, il est démis de ses fonctions en 1928 après une critique en règle de
ses conceptions trop « ouvertes ». Il n’y renoncera pas. Emprisonné pour ses attaques en règle de la réaction et notamment du fascisme mussolinien, il conduit cependant la liste PCF aux élections
municipales à Villejuif, l’emporte et fait de la ville un laboratoire du communisme municipal, inventant, innovant, développant. Malgré le sectarisme de la direction de son Parti, le rayonnement
de Vaillant s’élargit. L’ascension de Maurice Thorez et l’avènement d’une nouvelle stratégie lui donnent des ailes. Il revient aux premiers rangs à l’Humanité
et, malgré l’hostilité d’André Marty qui chapeaute sa direction, il met en œuvre le projet qu’il a longtemps mûri.
Une constellation de talents est associée ou embauchée à l’Humanité, comme un jeune écrivain nommé Aragon, le journal s’ouvre aux sports, aux nouvelles voies de la création culturelle, à la
science. Le journal défend les jeunes immigrés, explore le « malheur d’être jeune », se fait un honneur d’être sur tous les terrains de conflits mondiaux, accompagne les premiers congés payés ou
les exploits de l’aviation transcontinentale. Vaillant, tout en séduction, y imprime sa marque. Une
écriture rapide, sûre, où l’image fait choc, où le récit sert l’analyse. La langue de bois reflue pour un style apte à être apprécié aussi bien par « le petit-bourgeois, le boutiquier et
l’intellectuel » que par « l’ouvrier communiste, le sans-parti, l’inorganisé, le paysan, le jeune, le soldat… » Le rédacteur en chef s’est installé au cœur de tout ce que la création produit de
nouveau en son temps. Il anime de multiples associations où il côtoie Jean Cassou, André Gide, André Malraux, les frères Prévert, Honegger et Milhaud, Louis Guilloux, Romain
Rolland, Francis Lemarque… La diffusion du journal frôle les 400 000 exemplaires au cœur du Front populaire.
L’époque découvre l’ivresse de la vitesse et Vaillant-Couturier vit tout à 100 à l’heure. La politique,
le journalisme, la création mais aussi ses amours ou ses passions de la chasse et de la pêche. Ce dimanche 10 octobre 1937, il était parti chasser aux étangs de Hollande, dans la forêt de
Rambouillet, quand son cœur a lâché. L’émotion est nationale et un million de personnes accompagnent son corps au Père-Lachaise. Marcel Cachin, le directeur de l’Humanité et son complice de toujours, dresse son éloge au micro, dans un océan de
fleurs. Pour toujours, l’élan de Vaillant-Couturier est associé à son quotidien.
Rédacteur en chef de l’Humanité lors du Front populaire, il en a fait un grand quotidien d’information moderne. Il était aussi peintre, écrivain, compositeur… et savait agréger les
compétences.
Des vies incroyables de courage et de générosité
publié le 21/09/2012 à 18h41 par Marcel Trillat, journaliste, réalisateur
Ils furent les témoins de leur temps. Rassemblés dans la série Des journalistes et des combats, que nous avons publiée tout l’été, les portraits de tous ces reporters sont aujourd’hui réunis
dans un hors-série de l’Humanité.
Quelle galerie de portraits ! Quelle vies incroyables, dont chacune est un véritable roman de cape et d’épée, souvent un roman noir ! Pour la plupart, des monstres de vitalité, de courage,
d’abnégation, de générosité.
Ce qui frappe d’abord, c’est de découvrir à quel point il s’agit d’un martyrologue : treize sur cinquante morts de mort violente. À la guerre (Paul Nizan), sauté sur une mine (Robert Capa),
guillotinés (Camille Desmoulins, Jacques-René Hébert) et surtout tous ceux et celles qu’on assassine pour ne plus les entendre, comme la grande voie pacifiste de Jean Jaurès en 1914.
On a le cœur serré en découvrant l’histoire de Rodolfo Walsh. Un an jour pour jour après le coup d’État des généraux argentins, le 24 mars 1977, ce journaliste réfugié dans la clandestinité
envoie aux principaux journaux du monde une Lettre ouverte de Rodolfo Walsh à la dictature. Il écrit : « La censure de presse, la persécution des intellectuels (…), l’assassinat d’amis chers et
la perte d’une de mes filles, morte les armes à la main, sont quelques-uns des faits qui m’obligent à m’exprimer de cette manière clandestine… » Il fait état de « quinze mille disparus, dix mille
prisonniers, quatre mille morts, des dizaines de milliers d’exilés (…) ». Le lendemain, il tombe dans un guet-apens : il est abattu dans la rue.
Autre terrible histoire, celle de Saïd Mekbel, billettiste et directeur du journal algérien le Matin. Le 3 décembre 1994, il écrit : « C’est lui qui, le matin, quitte sa maison sans être sûr
d’arriver à son travail. Et lui qui quitte, le soir, son travail sans être certain d’arriver à sa maison (…) Cet homme qui fait le vœu de ne pas mourir égorgé, c’est lui (…) Lui qui est tous
ceux-là et qui est seulement journaliste. » À midi, le même jour, il déjeune à 50 mètres de son journal avec une consœur. Un homme surgit des toilettes et lui tire une balle dans la nuque.
Ceux-là au moins, comme Ruth First, admirable journaliste blanche et communiste d’Afrique du Sud, exilée au Mozambique, assassinée par l’explosion d’une lettre piégée, ont été les victimes de
leurs pires ennemis.
Mais il y a plus poignant encore : l’histoire de Mikhaïl Koltsov, par exemple. Combattant de la révolution d’Octobre, il est envoyé en Espagne en 1936, où il joue un rôle politique de premier
plan, tout en couvrant la guerre antifasciste pour la Pravda. D’après Vladimir Fédorovski (le Roman de l’espionnage), « l’Union soviétique tout entière attendait chaque jour ses reportages
d’Espagne ». Il est rappelé à Moscou, accusé de trahison, torturé dans le sous-sol de la Loubianka (siège des services secrets) et exécuté…
Justice est enfin rendue à Paul Nizan, philosophe ami de Sartre, auteur d’Aden Arabie, grand journaliste communiste, victime d’un petit procès de Moscou mais à Paris, pour avoir désapprouvé la
justification par le PCF du pacte germano-soviétique et ses conséquences.
Albert Camus, lui aussi, malgré des désaccords avec le PCF pendant la guerre d’Algérie, retrouve la place qui lui est due.
Il y a un trait commun plutôt réjouissant à la plupart de ces personnages : ce sont de fortes têtes. Le grand Gabriel Péri, par exemple, qui fustige Daladier après les accords de Munich : « Nous
ne prenons pas place parmi la brigade des acclamations. Les accords de Munich sont un Sedan diplomatique (…). Triomphez, président Daladier… Nous n’avons pas fini notre promenade parmi les ruines
accumulées. » Mais au moment du pacte germano-soviétique, il n’applaudit pas non plus. Et moins encore lorsque Jacques Duclos tente d’obtenir des autorités allemandes d’occupation la reparution
de l’Humanité. Il sera fusillé au mont Valérien en 1941.
Parmi les plus intrépides, les photographes bien sûr et, entre autres, la grande figure de Robert Capa, photographe de guerre risque-tout qui aimait tans les femmes, l’alcool, la vie, qui échappe
cent fois à la mort en Espagne, qui débarque parmi les premiers en Normandie en juin 1944 et qui va bêtement sauter sur une mine en mai 1954, en couvrant, côté français, la guerre d’Indochine.
« À rebours de l’engagement passionné de toute sa vie », déplore Pierre Barbancey…
Terrible exercice que de devoir, parmi les cinquante choisis par l’Humanité, faire un choix supplémentaire et « oublier » par force, faute de place, tant d’autres, si attachants.
Et les femmes, me direz-vous. Eh bien, c’est exprès : je les ai gardées pour la fin. Elles sont moins nombreuses, bien sûr, neuf sur cinquante, signe de ces temps d’inégalité. Mais elles
supportent sans difficulté la comparaison. En particulier la plus proche de nous : l’incroyable Madeleine Riffaud. « Le 23 juillet 1944, ce visage d’ange qui n’a pas encore vingt ans exécute un
officier SS en plein Paris », raconte Maud Vergnol. Arrêtée et livrée à la Gestapo par un milicien, elle est torturée et, pire encore, forcée d’assister aux tortures subies par ses camarades,
dont un adolescent de douze ans. Elle échappe miraculeusement au poteau grâce à un échange d’otages. Elle ne s’en remettra jamais. Mais, devenue grand reporter à l’Humanité, « elle sera l’une des
rares Occidentales à être acceptée dans les maquis Viêt-cong ».
Et puis les pionnières : Flora Tristan, première femme grand reporter, et l’étonnante Séverine, qui relance, avec Jules Vallès, le Cri du peuple, l’un des journaux emblématiques de la Commune. En
1897, elle invente le premier journal féministe, la Fronde. Elle combat pour le droit à l’avortement et fustige « les juges, si bienveillants aux petits fœtus, si indifférents aux petits
enfants » !
J’aimerais enfin ajouter un portrait à la série : celui d’Édouard Guibert, leader du SNJ (Syndicat national des journalistes) et de la grève de 1968 à Radio France. Protégé par son statut il ne
put être licencié, comme plus d’une centaine de grévistes. Chaque matin, pendant sept ans, il se présentait à son rédacteur en chef : « Il y a du travail pour moi ? – Non, rien ! » Et il
rejoignait le bureau de son syndicat. Sept ans. Puis, en 1975, il fut envoyé comme correspondant dans la Tchécoslovaquie normalisée.
En 1981, enfin, ses qualités furent reconnues et il devint, à la tête de la rédaction de France 3, l’un des rares directeurs de l’information progressiste de toute l’histoire du service public...
Jean Jaurès Les noces heureuses du journalisme et de la politique
publié le 14/09/2012 à 18h45 par Charles Silvestre
Républicain, chroniqueur de la Dépêche, socialiste, fondateur de l’Humanité, il cumule les combats historiques, l’audace dans la culture, et la délicatesse de plume.
Jaurès journaliste ? Professionnel de
l’information ? Avec une carte de presse ? Ce n’est pas le Jaurès qui est resté dans l’histoire. Le grand
parlementaire (1885-1889, 1892-1898, 1902-1914), oui. Un architecte de la loi de séparation de l’Église et de l’État du 5 décembre 1905, oui. La figure la plus en vue, avec celle de Jules Guesde,
du Parti socialiste unifié après 1905, oui. « L’apôtre de la paix », jusqu’à y sacrifier sa vie, oui, trois fois oui. Mais un homme qui gratte le papier pour un quotidien qui finira, comme
l’écrivait Pierre Courtade dans les Circonstances, par envelopper les salades, difficile de l’imaginer pour un homme de cette stature et auréolé de cette gloire !
Et pourtant. Pourtant, il envoie, de janvier 1887 au 30 juillet 1914, chaque semaine, son article à la Dépêche de Toulouse. Au total 1 312 articles édités sous le titre Jaurès, l’intégrale par les Éditions Privat à l’automne 2009. Il n’en reste pas là. Le 18 avril 1904, paraît le premier
numéro de l’Humanité qu’il fonde avec une équipe entièrement nouvelle. 2 650 textes portent son nom. Du fameux édito fondateur : « Vers ce grand but d’humanité, c’est par des moyens d’humanité
aussi que va le socialisme », jusqu’au dernier du 31 juillet 1914, le jour de son assassinat à Paris, au café du Croissant, intitulé : Sang-froid nécessaire. L’Humanité a publié, en 2010, un
choix de 66 de ces articles, préfacés par son directeur, Patrick Le Hyaric.
« Il aimait écrire dans le journal », disait simplement l’historienne Madeleine Rebérioux. Mais le plaisir n’est pas forcément l’ennemi du devoir. Jaurès écrit dans le journal parce qu’il a conscience de répondre à un besoin impérieux, à une urgence où il en va du sort
de ses contemporains : contemporains de sa « petite patrie », il est né à Castres, dans le Tarn, le 3 septembre 1859 ; contemporains d’un pays tant aimé, le sien, la France ; contemporains du
monde entier où il a beaucoup voyagé, de l’Afrique du Nord à l’Amérique latine. Il en a tiré une formule dialectique : « Un peu d’internationalisme éloigne de la patrie, beaucoup
d’internationalisme y ramène ; un peu de patriotisme éloigne de l’internationale, beaucoup y ramène. » C’est connu, mais on ne le citera jamais assez.
Le besoin impérieux de « chercher la vérité et de la dire » lui vient au fil des événements : à l’été 1892, il n’est pas encore vraiment socialiste, mais il « couvre » pour la Dépêche le terrible
conflit entre le marquis de Solages et les mineurs de Carmaux. Et il accouche d’une pensée dont la portée est aujourd’hui d’une actualité saisissante : la République, pour être République, sera
sociale ou ne sera pas. À partir de la fin des années 1880, lui, le colonisateur à la Jules Ferry, met son nez dans le dossier de la colonisation et y décèle des prévarications (la Dépêche) puis
des horreurs (Barbarie stérile 2 avril 1908 dans l’Humanité). En 1898, après quatre années où il croit le capitaine Dreyfus coupable de trahison, il contre-enquête, comme on dit aujourd’hui,
perce avec d’autres la forfaiture militariste, cléricale et antisémite, et se bat comme un lion. Dans la Petite République, socialiste, il signe 43 articles qui, rassemblés, deviendront un
document de référence : les Preuves. Il appelle à la réforme sociale, il se prononce pour le collectivisme, pour lui les mots socialiste et communiste ont le même sens. Il presse la gauche de
l’époque d’accomplir cette évolution du droit social, de la propriété, mais découvre que ses amis radicaux et socialistes au pouvoir n’en font rien, et sa plume alors devient cinglante contre
Clemenceau, Aristide Briand, René Viviani. Jaurès est unitaire pour deux, mais, au nom de cet idéal de réforme de
la société auquel il ne renoncera jamais, il est d’une impitoyable franchise.
Le combat chez Jaurès n’émousse pas le style. Il y a sous sa signature des monuments de sensibilité : « Dans la
prairie en pente qui descend vers les châtaigniers, le petit vacher conduit les grands bœufs à l’abreuvoir ; quand ils ont bu, ils se forment en cercle autour de lui, semblent un moment regarder
le paysage, puis à un signal remontent vers l’étable. “Comment se fait-il que toi si petit tu te fasses obéir par des bêtes aussi grosses ?” S’il avait pu dire ce qu’il pensait, il aurait
répondu : c’est parce que je suis un petit homme, mais un homme. » Tout Jaurès journaliste est dans « ce petit
homme, mais un homme ». Il y a chez lui un amour du peuple paysan et ouvrier, pas un amour mystique, mais un amour de connaisseur.
Le groin de la guerre pointant à l’horizon, sa plume gagne les sommets du « métier ». À la veille du premier conflit mondial, le 12 juin 1913, il publie Sinistres Leçons. On y lit ceci : « Si
chauvins de France et chauvins d’Allemagne réussissaient à jeter les deux nations l’une contre l’autre, la guerre s’accompagnerait partout de violences sauvages qui souilleraient pour des
générations le regard et la mémoire des hommes. » On sait aujourd’hui de quelles horreurs a accouché la Grande Guerre où Clemenceau s’est vu affubler d’un titre qui laisse songeur : « Le Père la
victoire ». Amère victoire…
Jaurès a été, lui, d’une admirable lucidité. Il s’est fait « voyant », comme s’était fait voyant, sur un autre
registre, celui de la poésie, quelqu’un qu’il a été parmi les rares à découvrir dès son époque et qui n’est autre qu’Arthur Rimbaud. Car ce républicain, ce socialiste, ce journaliste que l’on
croit exclusivement voué à la politique, a pris le temps de signer dans la Dépêche, du 15 mai 1893 au 20 octobre 1898, 87 articles exclusivement sur l’art et la littérature. Jaurès lisait dans le texte Goethe, Shakespeare et Sophocle, mais il explorait la nouveauté des jeunes poètes, des
nouveaux romanciers. L’Humanité, journal politique, a appris à marcher avec Jaurès sur deux jambes : la jambe
sociale et la jambe culturelle. Et peut-être est-ce un peu pour cette raison aussi qu’elle est toujours là, vivante, avec ce simple logo : « le journal fondé par Jean Jaurès ».
Auteur de Jaurès, la passion du journaliste (Le Temps des cerises).