Le Service des Affaires Indigènes Nord-Africaines ou Service de surveillance et de protection des Nord-Africains (SSPNA) de la Préfecture de Police de Paris a été, de sa création en 1925 à
l'initiative du conseil municipal de Paris à sa dissolution officielle fin 1945, le service central de contrôle administratif et politique des Algériens en France. À la suite d'une intense
campagne de presse après un double meurtre commis en 1923 par un Algérien, le conseiller municipal Pierre Godin, ancien administrateur colonial, obtient la création de ce service de surveillance
et de protection des indigènes Nord-Africains (SSPINA), selon une des multiples appellations officielles de cette administration dite de la « rue Lecourbe », de son lieu d’implantation. Elle
visait à encadrer toute la vie des travailleurs algériens en métropole en regroupant services administratifs, sociaux, sanitaires sous le contrôle d’un service de police. L’hôpital
franco-musulman, créé en 1925 à Bobigny, est sous sa responsabilité.
La rue Lecourbe est surtout connue pour sa section policière, la Brigade nord-africaine (BNA), composée d'une trentaine de membres « chargés [de] la surveillance générale des Nord-Africains, de
leurs réunions, des garnis et des débits. Ils ont mission de renseigner le Préfet de police, et par son intermédiaire, le Gouvernement, sur tous les mouvements politiques ou autres, pouvant se
produire dans la population nord-africaine. » Une partie des membres de la brigade ont préalablement travaillé dans les colonies. Relativement autonome au sein de la préfecture de police, la BNA
agit fréquemment en dehors du cadre légal. Elle importe en métropole les systèmes de la Chikaïa ou de l’Amam, sortes de médiations pénales fondées sur le Code de l'indigénat. En outre, elle fait
pression sur les milieux nationalistes, dressant une liste des participants aux meetings de l’Étoile nord-africaine, association anticolonialiste fondée en 1927, et leur supprimant ensuite les
droits aux allocations chômages ou familiales, qui leur sont versés par le SSPNA. Des pressions sont aussi exercées sur les employeurs afin de les licencier puis de les expulser.
Le service est critiqué sous le Front populaire, au pouvoir à partir de 1936. Le sous-secrétaire d’État au ministère de l’Intérieur, Raoul Aubaud, parle en janvier 1938 d’un véritable service
d’espionnage. Trois mois plus tard, le rapport « Les Nord-Africains en France », rédigé par Pierre Laroque et François Ollive, et commandé par Léon Blum au Haut Comité méditerranéen, affirme que le service ne remplit pas ses fonctions de protection, en soulignant que
les « indics » utilisés sont ceux qui exploitent les immigrés (marchands de sommeil, etc.). Le rapport Laroque met l’accent sur le fichier constitué par la Brigade, et préconise la dissociation
des activités de protection sociale et de répression. La chute du Front populaire, remplacé par le gouvernement Daladier, empêche cependant la mise en œuvre de ces réformes.
Le service des affaires indigènes est supprimé à la Libération pour faits de collaboration, la brigade Nord-Africaine ayant fourni en particulier les principaux auxiliaires français de la
Gestapo parisienne. L’encadrement administratif de l’immigration issue de l’Algérie, de Tunisie et du Maroc
est transféré aux services sociaux métropolitains, mais la guerre d’Algérie permettra au ministère de l’Intérieur de retrouver une grande partie de ses prérogatives à partir de 1956, et à
certains anciens agents du bureau et de la brigade de reprendre un rôle actif.
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Service des Affaires Indigènes Nord-Africaines (SSPNA)
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