publié le 08/01/2014 à 18h11
Près de 70 ans après les faits, un Allemand de 88 ans a été inculpé pour avoir participé au massacre d'Oradour-sur-Glane, le pire commis en France par l'armée nazie pendant la Seconde Guerre mondiale, a annoncé mercredi la justice allemande.
Le mémorial au cimetière d'Oradour-sur-Glane où 642 personnes au total, hommes, femmes et enfants ont été massacrées par une division nazie le 10 juin 1944
Le retraité, âgé de 19 ans au moment des faits, est accusé du "meurtre collectif de 25 personnes" et de "complicité dans le meurtre de plusieurs centaines d'autres", a annoncé le tribunal de
Cologne. Face aux enquêteurs, l'homme a reconnu avoir été membre du régiment Der
Führer de la division blindée SS Das Reich qui a exécuté méthodiquement 642 civils à Oradour-sur-Glane, un village du centre de la France, le
10 juin 1944.
"254 femmes et 207 enfants" massacrés
D'après l'acte d'accusation, "tous les habitants du village avaient été rassemblés sur la place du marché et les hommes avaient été séparés des femmes et des enfants". "Les hommes avaient ensuite
été divisés en quatre groupes (...) et emmenés par des pelotons d'exécution dans quatre granges pour y être tués".
Le vieil homme est plus précisément accusé d'avoir abattu à la mitrailleuse, avec un autre membre du régiment, 25 hommes dans une des granges. Des survivants avaient été achevés au pistolet ou
tués dans l'incendie de la grange, allumé par les soldats allemands. "L'accusé se serait ensuite rendu à l'église d'Oradour-sur-Glane où avaient été enfermés plusieurs centaines de femmes et
d'enfants", a ajouté le tribunal de Cologne.
Selon l'acte d'accusation, "254 femmes et 207 enfants" y ont été massacrés "à l'aide d'explosifs, d'armes automatiques et de grenades", avant que l'édifice ne soit brûlé, provoquant la mort des
derniers survivants.
Il était sur les lieux mais nie avoir participé
"Il a reconnu s'être trouvé sur les lieux au moment des faits, mais il a nié avoir participé au massacre", a précisé le tribunal. Il aurait "assuré une garde à proximité de l'église" et il y
aurait peut-être même transporté du combustible, estime le tribunal, ce qui justifie l'accusation de complicité de meurtre.
Y aura-t-il un procès ?
L'organisation d'un procès reste toutefois encore suspendue à la décision du tribunal de Cologne, qui a laissé jusqu'à fin mars à l'accusé pour s'y opposer. Cette procédure va encore prendre
"plusieurs semaines", a expliqué Andreas Brendel, procureur général de l'Office centrale chargé d'enquêter sur les crimes nazis, qui dépend du parquet de Dortmund (ouest) où la décision
d'inculpation a été prise.
D'autres personnes soupçonnées
Cinq autres personnes soupçonnées d'avoir pris part à ce massacre d'Oradour sont dans le viseur de l'Office central d'enquête sur les crimes nazis, 70 ans après les faits. Mais aucune autre
inculpation n'est prévue pour le moment.
Plusieurs enquêtes réalisées en Allemagne de l'Ouest sur ce massacre avaient été classées faute de preuves, dans le passé. Mais la découverte par un historien d'un document de la Stasi (les
services secrets de l'ex-RDA) sur ces faits ont déclencher de nouvelles investigations en 2010.
La difficulté de trouver des preuves 70 ans après...
Plusieurs procédures judiciaires ont été ouvertes ces derniers mois en Allemagne pour tenter de juger les derniers criminels nazis présumés encore vivants. Si longtemps après les faits, le
tribunal de Hagen, non loin de Cologne, a d'ailleurs prononcé mercredi un non-lieu faute de preuves, dans le procès d'un ancien SS de 92 ans, Siert Bruins, accusé de
l'assassinat d'un résistant néerlandais aux Pays-Bas en septembre 1944.