Karl Rudolf Gerd von Rundstedt (12 décembre 1875 - 24 février 1953) était un Generalfeldmarschall de la Heer durant la Seconde Guerre mondiale.
Né le 12 décembre 1875 près de Halberstadt, originaire d'une famille de la plus pure aristocratie prussienne, il s'enrôle dans l'armée à l'âge de 18 ans. Il est incorporé à l'Infanterie Regiment 83 le 17 juin 1893, comme Sekonde-Leutnant. Il entre à la Kriegsakademie en 1902 et en sort Oberleutnant. Hauptmann le 24 mars 1907. La Première Guerre mondiale le voit rapidement gravir les échelons de la hiérarchie : Major le 28 novembre 1914, il est affecté comme chef d'état-major de sa division (86. Infanterie Division). Après guerre, il demeure dans la Reichswehr et devient Oberstleutnant le 1er octobre 1920 puis Oberst le 1er février 1923 ; il prend enfin le commandement d'une grande unité, le 1er mai 1925, en devenant chef de l'Infanterie Regiment 18 de Paderborn.
Sa carrière en temps de paix se poursuit de la manière la plus classique : chef d'état-major du Gruppenkommando 2 le 1er octobre 1926, Generalmajor le 1er novembre 1927, il finit enfin par atteindre le poste de commandant d'une grande unité, plus précisément celle de la 2. Kavallerie Division de Breslau le 1er octobre 1928. Generalleutnant le 1er mars 1929, il perçoit le commandement de la 3ème Division le 1er février 1932, commandant du Gruppenkommando 1 le même jour. C'est alors que Von Rundstedt commence à faire parler de lui. Il méprise déjà les Nazis : Prussien de haute noblesse, il n'aime pas du tout le côté indiscipliné, braillard et orgueilleux des SA et de leur chef suprême, Hitler. Mécontent de voir les Nazis au pouvoir, il menace de démissionner quand Franz von Papen décrète la loi martiale. Par la suite, en accord avec Wilhelm Ritter von Leeb, il réussit à empêcher Hitler de nommer le pro-nazi Reichenau à la tête de l'OKW.
Generaloberst le 1er mars 1938, il est mis à la retraite sur sa demande car il ne peut accepter de devoir, à terme, obéir aux ordres du "Caporal d'Opérette", fut-il son Führer, Hitler. De plus, il commence déjà à entrevoir la duplicité d’Hitler après Munich et la Tchécoslovaquie. La guerre éclate et il est rappelé au service actif en août 1939, en particulier pour prendre le commandement du Heeresgruppe Süd (Groupe d'armées Sud) lors de la Campagne de Pologne. Oberbefehlshaber Ost (commandant en chef à l'Est) du 1er au 20 octobre 1939. Lors des préparatifs pour la campagne de France, en tant que commandant du Heeresgruppe A du 25 octobre 1939 au 1er octobre 1940, il soutient un général qu'il a sous ses ordres, un certain Erich von Manstein, qui propose un plan d'invasion mettant en avant le franchissement des Ardennes par des colonnes blindées. Ce plan sera accepté par le Führer.
Lors de la bataille de France, il a sous ses ordres pas moins de 45 divisions dont 7 blindées et trois motorisées. Il semblerait qu'il soit à l'origine de l'ordre qui fit s'arrêter les troupes de la Wehrmacht avant que celles-ci ne se lancent à l'assaut de Dunkerque. En effet, ses Panzer Divisionen, commandées par Heinz Guderian, s'étaient trop avancées dans les lignes alliées et son manque de soutien en infanterie lui fit craindre un isolement de ces troupes. Hitler ayant les mêmes appréhensions, accepta de donner cet ordre. Cela permit à des dizaines de milliers de soldats anglo-français d'éviter la capture. Nommé Generalfeldmarschall le 19 juillet 1940, il participe aux préparatifs de l'Opération Seelöwe, l'invasion du Royaume-Uni. Suite à l'annulation de cette opération, à cause de la défaite de la Luftwaffe, il prend en charge l'ensemble des forces d'occupation à l'ouest de l'Allemagne (Oberbefehlshaber West du 1er octobre 1940 à juin 1941). Il doit débuter la mise en place d'une défense côtière apte à repousser un éventuel débarquement sur les côtes occidentales.
Mais Hitler se tourne vers l'Est et place le vieux Prussien à la tête du Heeresgruppe Süd le 10 juin 1941. Celui-ci ne comprend pas moins de 42 divisions, dont 5 Panzer, qu'il doit mener à la conquête de l'Ukraine. Son avance est initialement plus lente que pour les autres groupes d'armées, car l'essentiel des forces mécanisées et blindées de l'Armée rouge se trouve dans cette région frontalière. Mais il finit par prendre Kiev et y fait 665.000 prisonniers les 5e, 21e, 26e et 37e armées soviétiques.
Il fonce ensuite sur Kharkov et Rostov-sur-le-Don. La fin de l'automne arrive et il conseille à Hitler d'en profiter pour arrêter les troupes afin de leur faire préparer une ligne de défense pour affronter les rigueurs de l'hiver russe. Mais Hitler s'y oppose fermement et veut en profiter pour prendre Moscou. En novembre, il est victime d'une attaque cardiaque, mais il refuse de se faire hospitaliser. Il atteint finalement Rostov le 21 novembre, où il est repoussé par la contre-attaque d'hiver soviétique. Il demande alors encore une fois à Hitler l'autorisation de se replier vers une ligne de défense préparée. Hitler refuse catégoriquement et, ulcéré par ce maréchal défaitiste, le fait remplacer par Walther von Reichenau le 1er décembre 1941.
Mais Hitler ne peut que reconnaître les qualités de stratège de Von Rundstedt. Il est donc obligé de le rappeler au service actif. Il lui confie l'Oberbefehlshaber West le 15 mars 1942. Pendant les deux années qui suivent, Von Rundstedt s'échine à consolider le Mur de l'Atlantique, en collaboration avec Erwin Rommel. Après le 6 juin, alors que le débarquement allié est consommé, Von Rundstedt, lucide sur les chances de victoire du III° Reich, conseille à Hitler de négocier au plus tôt la paix.
Furieux, Hitler le démet de ses fonctions le 2 juillet 1944. Mais l'attentat du 20 juillet contre le Führer le voit reprendre du service : il est, avec Guderian et Keitel, membre de la cour d'honneur de l'armée qui statue sur les cas des officiers opposés à Hitler. En effet, Von Rundstedt a beau mépriser le chef nazi, il n'en demeure pas moins un officier discipliné et pétri du sens de l'honneur prussien : il ne peut accepter que l'on attente à la vie du dirigeant de l'Allemagne.
Ensuite, Von Kluge s'étant suicidé, il reprend son poste à l'Oberbefehlshaber West le 5 septembre 1944, qu'il quitte à nouveau pour défaitisme le 9 mars 1945. Il est finalement capturé le 1er mai 1945 par la 36ème division américaine. Maintenu en détention en Grande-Bretagne jusqu'en juillet 1948, où il est accusé de crimes de guerre, sans jamais être jugé. Il finit sa vie à Hanovre le 24 février 1953.