Espagne - Le premier ministre espagnol Mariano Rajoy a annoncé ce lundi 2 juin l'abdication du roi d'Espagne Juan Carlos à l'âge de 76 ans. Son fils, le prince Felipe, lui succédera au trône d'Espagne.
Longtemps très populaire en raison de son rôle dans la transition démocratique, Juan Carlos a pâti de l'enquête pour corruption pesant sur sa fille, l'infante Cristina, et son époux Iñaki Urdangarin, soupçonnés du détournement de 6 millions d'euros de fonds publics. L'image personnelle du roi a également été sérieusement écornée par sa participation à un safari au Botswana en avril 2012. Un voyage onéreux qui avait choqué en pleine crise économique en Espagne.
"Sa majesté le Roi Juan Carlos vient de me faire part de sa décision d'abdiquer", a sobrement annoncé le chef du gouvernement Mariano Rajoy tout en saluant "le défenseur infatigable de nos intérêts". Le premier ministre a indiqué qu'il souhaitait que le Parlement espagnol confirme l'avènement du prince des Asturies Felipe. Ce dernier est marié à l'ancienne journaliste vedette Letizia Ortiz Rocasolano.
De son côté, le compte Twitter officiel de la royauté a publié un communiqué du souverain confirmant sa volonté d'abdiquer.
Prenant la parole aux alentours de 13h dans un message télévisé adressé aux Espagnols, le monarque a rappelé avoir toujours voulu servir l'intérêt général. "J'ai voulu être le roi de tous les Espagnols", a-t-il déclaré tout en indiquant vouloir céder la place "à une génération plus jeune".
Tout en regrettant les "graves cicatrices" laissées par la crise économique qui frappe durement son pays, Juan Carlos a vanté les mérites de son fils Felipe pour lui succéder au trône d'Espagne. "Mon fils Felipe, héritier de la Couronne, incarne la stabilité qui est la marque de l'institution monarchique espagnole".
"Le prince des Asturies dispose de la maturité, de l'éducation et du sens des responsabilités nécessaires pour assumer pleinement la responsabilité de chef de l'Etat et ouvrir une nouvelle étape d'espérance", a renchéri Juan Carlos qui a conclu son message en promettant qu'il garderait "à jamais l'Espagne au plus profond de (s)on coeur".
Une fin de règne marquée par les scandales et les problèmes de santé
Mariano Rajoy a convoqué "un conseil des ministres extraordinaire" pour ce mardi. Pour ce processus d'abdication, il sera "nécessaire d'approuver une loi organique", a-t-il rappelé.
De son côté, François Hollande, qui s'est entretenu dans la matinée avec le monarque, a salué un homme qui "a incarné l’Espagne démocratique, à la naissance de laquelle il a pris une part déterminante". "Artisan de la Transition après la dictature franquiste, il a mené son pays sur le chemin des libertés civiles et politiques, de l’intégration européenne et de la modernité", déclare dans un communiqué le président de la République.
Les médias espagnols spéculaient depuis longtemps sur une éventuelle abdication de Juan Carlos. En janvier dernier, un sondage Sigma Dos publié par le journal El Mundo annonçait que 62 % des personnes interrogées pensaient que le souverain devrait renoncer au trône après trente-huit ans de règne. Ils étaient 44,7 % un an auparavant. A l'époque, Juan Carlos avait exclu de se retirer. Mais selon l'agence de presse espagnole EFE, qui cite une source proche du roi, Juan Carlos aurait au contraire choisi d'abdiquer dès le mois de janvier dernier.
Le souverain souffre de graves problèmes de santé. Il a notamment subi plusieurs opérations au dos et aux hanches et est désormais contraint de se déplacer à l'aide de béquilles. C'est cet argument qui a été mis en avant pour expliquer son abdication.
Apparu amaigri et chancelant en début d'année, Juan Carlos affichait une meilleure santé ces dernières semaines et avait repris son agenda officiel. Décrit comme "un ambassadeur de luxe pour l'Espagne" grâce à un épais agenda et de bonnes relations avec de nombreux dirigeants internationaux, le roi s'était rendu à la mi-mai en Arabie saoudite pour y rencontrer des responsables saoudiens dans le but de favoriser les relations commerciales entre les deux pays. La semaine dernière, il avait reçu l'ancien président français Nicolas Sarkozy.