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Clik here to view.publié le 19/12/2013 à 06h49 par Laurent Legrand
Plus de 150 000 soldats français sont morts dans ce qui fut l'une des batailles les plus longues et dévastatrices, stoppant net la progression allemande.
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Soldats français passant à l'attaque depuis leur tranchée lors de la bataille de Verdun
Nous sommes au mois de février 1916. Le général Falkenhayn, commandant en chef de l'armée allemande,
planifie une offensive considérable sur le territoire de Verdun alors très vulnérable. Le général Joffre, nommé
généralissime le 2 décembre 1915, focalise son attention sur la Somme, où il souhaite mener une offensive conjointement avec les forces britanniques. Il ne se doute pas que, durant cette période,
son ennemi entreprend de réunir un nombre impressionnant de pièces d'artillerie. En effet, les Allemands regroupent aux alentours de Verdun 12 100 pièces d'artillerie. Les hommes de Falkenhayn procèdent la nuit de façon à être le plus discrets possible. En face, sur les premières lignes, le
doute subsiste et les quelques divisions présentes sur place ont bien conscience que le belligérant se prépare à une attaque.
Le colonel Driant, chargé du commandement des 56e et 59e bataillons de chasseurs, s'inquiète et sait pertinemment que les forces en présence demeurent clairement insuffisantes et alarme à
plusieurs reprises les politiques en raison notamment de son statut de député. Malheureusement, ces appels du pied restent sans véritable réaction et le 21 février 1916, à 7 heures, l'armée
allemande entame le pilonnage massif des lignes françaises. Ce déluge de feu met à mal les défenses françaises, les bois des Caures et d'Haumont sont complètement décimés. Les Allemands ne
rencontrent que très peu de résistance malgré le courage des groupements désorganisés de l'armée française et c'est donc en toute logique que les troupes du Reich s'emparent du fort de Douaumont,
dépourvu de tout son arsenal défensif. Le général Joffre réagit et envoie son de chef d'état-major général de
Castelnau qui découvre sur place un état-major littéralement effondré, avec des Allemands à dix kilomètres
de Verdun. Des unités sont envoyées en renfort, mais Joffre doit rapidement désigner un homme capable de résister
à l'offensive germanique et d'organiser la défense de Verdun. C'est ainsi qu'il désigne Philippe Pétain du
retranchement de Verdun.
Pétain, l'homme de la situation
La doctrine prônée par Joffre rejoint celle de plusieurs généraux de l'époque, dont Foch et Nivelle. Toutefois,
l'attaque à outrance n'est en aucun cas adaptée au contexte de Verdun. C'est notamment pour cette raison que Joseph
Joffre décida de confier la sauvegarde de Verdun à Pétain, lui qui était déjà un fervent partisan de la
doctrine défensive avant même l'offensive allemande d'août 1914. Le général Falkenhayn avait choisi Verdun
pour différentes raisons et l'une d'entre elles résidait dans le fait que cette ville était faiblement desservie en voies de communication. À son arrivée, Pétain va devoir, d'une part, répondre à ce souci d'ordre logistique et, d'autre part, tenter d'imaginer des solutions
susceptibles de pouvoir pallier un rapport de force nettement en défaveur de l'armée française (rapport de 1 pour 6 en ce qui concerne l'artillerie, par exemple). Pétain ne souhaite pas sacrifier des hommes en les envoyant sous le feu des mitrailleuses et de l'artillerie adverse et
sa méthode consista à constituer deux grands regroupements d'artillerie lourde plutôt que de les répartir. La défense est la priorité, cette dernière va permettre à Pétain de gagner du temps et de coordonner à l'arrière le ravitaillement.
La ligne de chemin de fer étant coupée par les bombardements incessants de l'armée allemande, c'est ainsi que le commandant Doumenc, chargé des approvisionnements, certifie qu'un
réapprovisionnement efficace du front est envisageable à la seule condition que les convois militaires soient prioritaires, autrement dit que la départementale de Bar-le-Duc à Verdun soit
exclusivement réservée au ravitaillement. Un important dispositif logistique est mis en place (dépanneuses, équipes de maintenance) de façon à fluidifier au maximum le trafic et ainsi renforcer
en continu les premières lignes. La "voix sacrée" est une réussite et permet aux troupes françaises de se renforcer puisque, dès le 25 février, 3 000 camions assurent une relève efficace de jour
comme de nuit. Plutôt que de compléter les pertes au fur et à mesure comme le fait l'armée allemande, Pétain
opte pour un roulement entre les premières lignes du front. En parallèle de toutes ces initiatives, Pétain
sollicite le commandant de Rose et lui ordonne de mobiliser ses meilleures pilotes pour libérer le ciel de Verdun de l'aviation allemande et assurer la reconnaissance aérienne des sites
d'artillerie allemande. De ce fait, avion de reconnaissance et avion destiné à la chasse cohabitent lors de leurs sorties aériennes.
La guéguerre Joffre-Pétain
En quinze jours, les sept escadrilles françaises rétablissent la situation dans les airs et mettent fin à la suprématie aérienne germanique du début de la bataille. L'armée française n'est malgré
tout pas en mesure de crier victoire, mais par l'intermédiaire des multiples entreprises du général Pétain, la
France parvient à maintenir un solide périmètre de sécurité. Joffre promeut Pétain au commandement du groupe d'armées du centre le 19 avril 1916. Le général Nivelle le remplace et, au final, le général Pétain ne sera resté que deux mois sur le théâtre des opérations de Verdun. Cette nomination peut s'expliquer de
différentes manières. Tout d'abord, la cote de popularité de "l'homme de Verdun" est à son comble et les méthodes employées par Pétain afin de rétablir la situation sont pour ainsi dire mises en lumière. En désaccord total avec la doctrine de
Pétain, Joffre ne souhaitait
donc pas que le général soit indéfiniment sous le feu des projecteurs. Ensuite, Pétain sollicitait énormément
Joffre afin d'obtenir un maximum de matériels militaires et d'hommes pour la défense de Verdun, ce qui eut pour
conséquence de diminuer en nombre le contingent français susceptible d'intervenir sur le théâtre de la Somme.
Falkenhayn tiraillé par la Somme
Entre juin et juillet 1916, Falkenhayn tente d'infliger plusieurs coups de boutoir à l'armée française en
lançant notamment une offensive de grande ampleur au nord-est de Verdun le 2 juin 1916. Le fort de Vaux est victime d'un pilonnage d'obus (1 500 obus par heure) et de la propagation de gaz. Cette
attaque a pour conséquence la prise du fort de Vaux malgré la résistance héroïque des hommes du commandant Raynal, qui n'a pas d'autre solution que de se rendre le 6 juin. Cette victoire sur le
fort de Vaux n'amène pas pour autant à une avancée définitive puisque les troupes françaises ont pu se réorganiser et même tenter de contre-attaquer sous la conduite du général Mangin, adepte de l'artillerie massive. Ce n'est pas pour autant que le général allemand abdique puisque, le 11 juillet
1916, il lance une ultime attaque pour conquérir Verdun, une offensive précipitée et liée à la pression qu'exercent les forces franco-britanniques sur la Somme. Cependant, son baroud d'honneur se
solde par un échec dû à la farouche résistance du fort de Souville. La situation devient problématique pour le général allemand, d'autant plus que l'utilisation des blindés lors de la bataille de
la Somme rencontre un franc succès l'obligeant finalement à déplacer des troupes sur le front de la Somme et à faire machine arrière. Les Français profitent de ce repli pour reprendre le fort de
Douaumont, le 24 octobre 1916, puis le fort de Vaux, le 2 novembre 1916.
Après dix mois de conflits, les Allemands retrouvent leurs positions initiales. Le bilan humain est lourd des deux côtés : on compte au total plus de 300 000 décès en plus d'un nombre extrêmement
important de soldats blessés et inaptes au combat. La nature aura beau vouloir recouvrir les plaines du grand manteau de l'oubli, le souvenir de Verdun restera, quoi qu'il arrive, éternel et
symbolisera à jamais la résistance ultime de la France lors de la Grande Guerre.