publié le 01/11/2013 à 11h48
Dans quelques semaines, nous allons faire paraître un entretien avec Madame Annie Lacroix-Riz, à propos de la nouvelle version de son ouvrage, "Industriels et Banquiers sous
l'Occupation".
Le travail de cette historienne française est tel que nous n'en sommes plus, comme Marc Bloch en son temps, à formuler l'hypothèse d'une conspiration d'une partie des élites françaises des années
30 mise en oeuvre entre 38 et 40, mais à connaître et comprendre l'architecture de cette conspiration, avec le sommet Cagoulard de l'iceberg Synarchique, de son déploiement, jusqu'à la
"Libération", c'est-à-dire pour eux la défaite, et le maintien de l'essentiel de l'échiquier pétainiste dans la France de l'après-guerre, malgré la Libération. Si, en France, la situation n'a pas
été comparable à celle de la Grèce, où là, "grâce" au soutien anglo-américain, les collaborateurs grecs ont pu être soutenus APRES LA LIBERATION, et massacrer, emprisonner, les Résistants grecs
dans les années qui ont suivi la fin de la guerre (cette Résistance ne pouvant bénéficier d'une aide de l'URSS en raison de la distance, de l'épuisement des forces soviétiques et du sens de la
mesure de Staline qui n'a pas souhaité engager une guerre supplémentaire de conquête à l'ouest), c'est qu'il y a eu un maintien organisé, "discret", ce qui est bien connu fait partie du charme
d'une partie de la Bourgeoisie.
Le cas de Papon est célèbre - passé entre les mailles du filet de l'épuration, pour connaître une longue et confortable carrière dans la haute fonction publique, mais ce n'est qu'un cas parmi
d'autres. Certaines archives sont toujours interdites d'accès aux historiens professionnels. Mais sans attendre, nous pouvons dire que "l'épuration", en France, mais aussi en Allemagne, et dans
la plupart des pays européens, a été ratée. D'un côté, elle s'est focalisée sur de possibles collaborateurs de bas étage, mais aussi des femmes qui ont eu le tort d'avoir une vie amoureuse avec
un occupant (même s'il ne faut pas oublier que certaines d'entre elles ont en effet aussi soutenu leur amoureux à travers du travail d'espionnage et de dénonciation), comme l'illustre la très
belle série photographique ci-dessous. Cette situation si difficile, avec une population mélangée (les résistants, les collaborateurs, la majorité des citoyens qui n'ont rien fait, rien dit)
exigeait la mise en place d'une Justice avec des moyens adaptés, engagée dans un processus long, avec des croisements européens d'informations.
Il n'en a rien été. Une liste complète et différenciée des collaborateurs, d'Etat et privés, aurait dû être élaborée, en différenciant les actes (criminels, non criminels, ayant conduit à la
déportation, à l'assassinat, etc), et pour l'ensemble de ces actes, leurs auteurs auraient dû encourir des peines de prison, des amendes, l'interdiction d'exercer pendant une durée variable un
travail dans la fonction publique, etc. Une liste des entreprises qui ont travaillé au profit des Nazis aurait dû être élaborée pour déterminer les niveaux et les profits réalisés, et les
responsables auraient dû être à la fois poursuivis, expropriés. Il n'en a rien été. L'euphorie de la Libération, la destruction dans son nid allemand du Nazisme, totalement écrasé par les Alliés,
une certaine inconscience et la volonté gaulliste de favoriser une certaine "paix" intérieure avec une idéologie de la continuité de l'Etat, ont contribué à cette inaction, gravissime.
Car en dehors de France, en Allemagne même, malgré les mesures sévères engagées par les Alliés, et plus encore par les Soviétiques, qui, eux, n'ont protégé aucun ex-Nazi, trop de responsables de
crimes, à commencer par les "bourreux anonymes" d'Hitler, ont pu rentrer chez eux, et à l'occasion de fêtes dans les années suivantes, se remémorer leurs exploits criminels en buvant bière sur
bière, après tant...de mises en biere (cf les enregistrements sonores réalisés par les Alliés des soldats allemands prisonniers, réalisés à leur insu, et dans laquelle leur parole libre se fait
entendre et fait froid dans le dos). Il ne faut pas s'étonner aujourd'hui que les "héritiers" de cette Collaboration soient si actifs et arrogants dans nos pays !
"Femmes tondues ! Déchirure patriotique"
Près de 20 000 femmes tondues en France entre 1941 et 1945 ! Beaucoup d’entre elles n’avaient pourtant aucune collaboration à leur actif et se sont faites humiliés juste sur des rumeurs,
dénonciations gratuites, sans preuve, sans pouvoir défendre leur innocence. Et la barbarie était à son comble lorsque ces tontes se terminaient par des agressions physiques, sexuelles ou
viols.
Lorsqu’on vit et lorsqu’on sort d’une guerre aussi effroyable, il aurait été plus glorieux de rester digne jusqu’au bout, plutôt que d’utiliser des méthodes barbares, un genre de méthode
que les armées françaises, puis les résistants, les alliés et tous ces morts pour la France ont combattu pour la liberté de tous. Quand la haine dépasse la raison !
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1944-1945, la Libération : à l'instar des "femmes tondues", une épuration ratée
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