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Traquer les criminels nazis jusqu'au dernier

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L'Expresspublié le 09/11/2013 à  17:57 par Boris Thiolay

L'historien Efraïm Zuroff dirige le bureau de Jérusalem du Centre Simon-Wiesenthal. Il poursuit sans relâche les criminels du IIIe Reich. Au nom de la mémoire des victimes.



Efraïm Zuroff

Au fil des ans, Efraïm Zuroff (ici à gauche) a livré plus de 3000 noms de criminels aux autorités judiciaires de 22 pays.

 

Il les traquera jusqu'au bout. " Nous n'avons plus que deux ou trois ans pour agir. Mais tant qu'ils sont encore en vie, il existe une chance de les voir répondre de leurs crimes... " Verbe haut, carrure d'athlète, Efraïm Zuroff, 65 ans, affiche une ténacité à la hauteur de son combat : il est le dernier chasseur de nazis en activité. Directeur du bureau de Jérusalem du Centre Simon-Wiesenthal - une ONG juive internationale qui défend les droits de l'homme et la mémoire de la Shoah -, cet historien israélien d'origine américaine se consacre depuis plus de trente ans à une tâche : débusquer les assassins impunis, puis convaincre les Etats de les juger. Un travail de Sisyphe, initié par son illustre prédécesseur, Simon Wiesenthal (1908-2005), rescapé des camps, qui a retrouvé plus d'un millier de criminels nationaux-socialistes.

En épluchant des kilomètres d'archives, dans les années 1980, Zuroff découvre les noms de dizaines de fugitifs nazis qui sont parvenus à trouver asile aux Etats-Unis, après la guerre, en se mêlant aux réfugiés pris en charge par les organisations de secours... Au fil des années, il constitue une véritable "base de données" des nazis toujours en liberté et livre 2 984 noms aux autorités judiciaires de 22 pays.

Opération "Last Chance"

Une douzaine d'individus seulement ont fait l'objet d'un procès. " Et encore, certains ont tourné à la farce, pestet-il. Les pays Baltes, par exemple, refusent de reconnaître la complicité de leurs ressortissants dans le massacre des juifs, à partir de 1941."

Depuis 2002, Zuroff pilote l'opération " Last Chance " (Dernière Chance). Cette campagne mondiale d'appel à témoins s'accompagne de la publication d'une liste des dix criminels les plus recherchés.

Une course contre la montre : au fil du temps, ces vieillards disparaissent sans avoir été inquiétés. Cette stratégie a tout de même permis de révéler 625 nouveaux noms. Parmi eux, Sandor Kepiro, ex-officier de gendarmerie hongrois, responsable de la mort de 1 200 civils juifs, serbes et roms.

Localisé à Budapest en 2006, il a finalement été acquitté en 2011, du fait de lacunes dans certains documents d'époque. Il est mort quelques semaines plus tard, à l'âge de 97 ans. Laszlo Csatary, un autre Magyar accusé de crimes contre l'humanité, est pour sa part décédé en août dernier, à l'âge de 98 ans. Un mois avant l'ouverture de son procès.

Alors, faut-il continuer à pourchasser des nonagénaires, dont l'état de santé peut être incompatible avec des poursuites judiciaires, ou qui furent des "seconds couteaux" ? "Le temps qui passe et l'âge ne diminuent en rien leur culpabilité, martèle Efraïm Zuroff. Au nom de la mémoire des victimes, il est impensable de laisser en paix les auteurs de ces crimes imprescriptibles, même s'ils ne furent que des exécutants !"

Le chasseur de nazis vient de relancer l'opération "Last Chance". Depuis le mois de juillet, 2000 affiches sont placardées dans huit grandes villes d'Allemagne. Elles incitent le grand public à livrer toute information susceptible de mener à une piste sérieuse, avec une récompense de 25000 dollars (18300 euros) à la clef. Leur slogan : "Tard, mais pas trop tard." Car Zuroff espère encore mettre la main sur une soixantaine de bourreaux.

Depuis 2001, le Centre Simon-Wiesenthal établit une liste des nazis les plus recherchés. Presque tous échapperont à la justice.

Sinistre galerie de portraits... Ces vieux messieurs bien tranquilles échappent depuis près de soixante-dix ans au tribunal de l'Histoire et à la justice des hommes. Anciens officiers SS, gardiens de camp, miliciens aux ordres du IIIe Reich, ils sont sur la liste des criminels nazis les plus recherchés. Ce classement, établi par le Centre Simon-Wiesenthal - une ONG juive internationale qui défend les droits de l'homme et la mémoire de la Shoah -, tient compte de trois critères : le grade ou le rang occupé dans la hiérarchie nationale-socialiste, le degré d'implication personnelle dans les meurtres et l'ampleur des crimes commis. 

Deux anciens hauts responsables nazis sont mentionnés à titre symbolique : ils sont certainement morts, même s'il n'en existe aucune preuve officielle. Le premier, Alois Brunner (né en 1912), organisa la déportation de près de 130 000 juifs d'Europe vers les camps d'extermination; le second, Aribert Heim (né en 1914), fut le médecin-chef SS du camp de Mauthausen

Au-delà de ces deux cas, considérés comme des " ratages " de la justice internationale , la liste comporte un petite dizaine de noms. 

Gerhard Sommer, 92 ans. En 2005, cet ancien souslieutenant SS est condamné, par contumace, à la prison à vie par la justice italienne pour avoir participé, en août 1944, au massacre de 560 civils dans le village toscan de Sant'Anna di Stazzema. Aujourd'hui pensionnaire d'une maison de retraite proche de Hambourg, il fait l'objet d'une enquête en Allemagne depuis 2002, mais aucune charge criminelle n'a été retenue contre lui à ce jour. 

Vladimir Katriuk, 92 ans. A la tête d'une compagnie du 118e bataillon de la police auxiliaire ukrainienne (sous commandement allemand), il participe à des exactions contre les civils en Biélorussie, entre 1942 et 1944. En 2012, un historien a démontré sa responsabilité lors du massacre de 200villageois à Khatyn, le 22 mars 1943. Ce jour-là, hommes, femmes et enfants sont enfermés dans l'église qui est ensuite incendiée. Armé d'une mitrailleuse, Katriuk abat tous ceux qui tentent de s'enfuir... Cette révélation pourrait inciter le Canada, où il vit depuis les années 1950, à le déchoir de sa nationalité. 

Hans ( Antanas) Lipschis, 93 ans. Affecté à un bataillon SS-Totenkopf (Tête de mort) d'octobre 1941 à 1945, ce Lituanien d'origine est gardien au camp d'extermination d'Auschwitz-Birkenau. Il parvient à émigrer en 1956 aux Etats-Unis. Démasqué par les autorités américaines en 1980, il décide, trois ans plus tard, de retourner en RFA. Arrêté en mai dernier par la police allemande, il est l'un des 30 anciens gardiens du camp d'Auschwitz-Birkenau actuellement visés par une enquête pour complicité d'assassinat. 

Lipschis a toujours prétendu avoir travaillé à Auschwitz en tant que... cuisinier. Dans l'attente de son éventuel procès, le Centre Simon-Wiesenthal maintient son nom sur la liste des personnes recherchées. 

John ( Ivan) Kalymon, 92 ans. Membre de la police ukrainienne pronazie de 1941 à 1944, il a participé aux rafles des juifs du ghetto de Lvov (Ukraine actuelle, en Pologne à l'époque) au printemps et durant l'été 1942, avant leur déportation vers le camp d'extermination de Belzec (Pologne). Kalymon aurait également pris part à des fusillades de masse. Il s'est établi incognito dans le Michigan (Etats-Unis), après la guerre. La justice américaine souhaite l'extrader depuis 2011. Mais aucun des pays susceptibles de le poursuivre -Ukraine, Pologne, Allemagne - n'en a fait la demande... 

Soeren Kam, 92 ans. Danois d'origine, cet engagé volontaire dans la division SS-Wiking participe, en 1943, à l'assassinat du directeur d'un journal antinazi de Copenhague. Il est également accusé d'avoir volé un registre de population ayant permis l'arrestation et la déportation de 500 juifs vers le camp de Theresienstadt (actuelle République tchèque). Réfugié en Allemagne, il a obtenu la nationalité de ce pays en 1956. Alors que son extradition vers le Danemark a été refusée par le parquet de Munich, il vit toujours à Kempten, en Bavière. 

Algimantas Dailide, 92 ans. Officier de la Saugumas, la police politique lituanienne collaborant avec les nazis, il participe à l'arrestation de douze juifs et de deux Polonais fuyant le ghetto de Vilnius. Ces derniers sont exécutés peu après. Devenu américain, Dailide perd sa nationalité en 1997, puis est extradé vers l'Allemagne, sept ans plus tard. Jugé en 2006 à Vilnius, il est condamné à cinq ans de prison, mais dispensé de peine, " car il ne représente plus une menace pour la société ". 

Mikhail Gorshkow, 90 ans. Interprète estonien auprès de la Gestapo, il est accusé d'avoir participé au massacre des juifs du ghetto de Slutsk (actuelle Biélorussie), en février 1943. Réfugié aux Etats-Unis dans les années 1950, il est déchu de la nationalité américaine en 2002. Après son retour en Estonie, la justice locale a clos l'enquête ouverte à son encontre, invoquant une " erreur " sur la personne. Une décision vivement critiquée par les Etats-Unis et la Russie. 

Theodor Szehinskyj, 89 ans. Ancien SS-Totenkopf, gardien des camps de concentration de Gross-Rosen (Pologne) et Sachsenhausen (Allemagne), il aurait infligé des sévices aux déportés. Etabli en Pennsylvanie (Etats-Unis), démasqué par la justice fédérale, Szehinskyj a perdu la nationalité américaine en 2000. Aucun pays n'ayant réclamé son extradition, il vit toujours dans les environs de Philadelphie. 

Helmut Oberlander, 89 ans. De juin 1941 à mars 1943, il sert dans l'Einsatzgruppe D, l'une des quatre unités chargées, en Europe de l'Est, du massacre des "ennemis du Reich", en premier lieu les juifs. Ces escadrons de la mort, auteurs de la "Shoah par balles", fusillent près de 1,5 million de personnes. Le Kommando 10 A, auquel est affecté Oberlander, fait 23000 victimes dans le sud de l'Ukraine et en Crimée. Emigré au Canada dans les années 1950, puis naturalisé, il attend d'être fixé sur une possible déchéance de sa nationalité. 


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