publié le 22/07/2012 à 20h43
Voici deux courts extraits de « les démons » de Doderer.-gallimard
« Au matin, il y avait encore dans sa chambre le gris blanc de la lumière recueillie, bien qu’il n’y eût plus de neige. ce
n’était pourtant pas le printemps. Dans les chambres aussi on sent le printemps bien avant de s’étonner à la fenêtre ouverte, dans le soleil, parmi les odeurs tout nouvellement délivrées,
croisées et recroisées ; dedans aussi le printemps s’annonce à l’avance, le bois craque, le café a un autre gout le matin, la cigarette aussi. »
« Sa chambre était à peu prés au nord ou au nord ouest, du même côté que la bibliothèque. De sa fenêtre cintrée il avait une vie plongeante sur les cimes d’arbrers de l’escarpement, et plus loin
sur le terrain plat ou passait la route.
Il recula. Au fond de la pièce se trouvait un large divan. Sa fatigue lui donnait froid maintenant, il frissonnait presque. Il se débarrassa de sa veste et de ses chaussures, et comme il y avait
sur le sofa, à coté des coussins, une molle couverture de poil de chameau, il s’y enveloppa. Déjà c’était le plongeon dans le sommeil, la sensation de bonheur qui y est liée,la dissolution des
règles de la veille, la traversée de cette région où un bref instant tout n’est qu’absurdité parce que les lois du rêve ne jouent pas encore et que celles de la veille ont perdu leur force. Il
sombrait à une profondeur considérable.
(..) quand il se réveilla –un instant plus tard lui sembla-t-il- il avait traversé d’un trait une heure de sommeil, comme un nageur qui plonge la tête dans un bassin vert foncé pour ne reparaitre
à la surface qu’à l’autre extrémité.
Toute sa fatigue avait disparu. Il regarda autour de olui.il ne redoutait rien. Il sentit en même temps que jusqu’àlors il avait toujours vécu dans la peur.»
Heimito von doderer est le grand écrivain autrichien oublié entre Musil et hermann broch . son œuvre
capitale « les démons » est paru en 1956. sans ettre exactemlnt un contemporain de Pourst ((1871-1922) Doderer (1896-1966) a, comme proust mis en évidence unbe écriture tres intrioposctive,complxe, subtile et
impressionniste pour donner de la société « mondaine » viennoise une image minutieuse et profonde. comme dans proust, il y a des Oriane, des Guermantes, des verdurin, des Swann et des Odette mais
de la société » autrichienne prise entre deux guerres mondiales et qui dansent une dernière fois sur le pont du titanic europeen, vieille mittell europa en fragments et dans une danse à la fois
sensuelle, macabre , nostalgique et ironique.. ; esthètes et historiens, grosses mangeuses de gâteaux snobs et gratte papiers, aristocrates et esthtés, jeunes filels ambitieuses ou malades,
poupées érotiques, et vieusx beaux se croisent selon mille textures et voloutes, avec de terribles aperçus sur la réalité sociale viennoise des années 2O et la fermentation nazie(doderer en fut un quelque temps ..) . Comme chez Proust, Doderer a un sens des dialogues parafit ,mais aussi une architecture de l’espace viennois stupéfiant :collines,
chateaux, lurdes villas 1900, ring, salons bourgeois, ruelles, terrains de chasse, cafés, buvettes et foret viennoise, et des emboitements et intrigues d’une complexité assez déconcertante à la
première lecture.
Il fauit s’accrocher et essuyer quelques passages obscurs pour un cartesien.. Mais aussi, ce fils d’architecte saisit les ambiances, les demeures, les déplaceltns, les excusrions, les sensations,
les méandres de l’âme féminine, avec une suave phrase qui, comme celle de proust, nous enveloppe dans une analyse à tiroirs..entraine sur des chemins escarpés et des métaphores surprenantes ;.il
étude, colmme roust, les effets de la mémoire et du présent, les méandres des hypothèses et suppositions entre relations humaines. D. analyse avec un déconcertante intelligence ce qu’il y a de
produit histrique dans les clases sociales entre aristocratie vieillissante et bourgeoisie montante..les névroses naissantes.. ce roman –somme est une immense construction thématique. D. possède
un sens merveilleux des « atmosphères viennoises » et des différences entre quartiers..c’est assez stupéfiant quand on connait Vienne,des vues sociologiques et historiques étonnantes et un sens
des « maladies de l’âme » et de l’ennui, bref un sens du crépuscule d’une société tres lucide....
en le lisant on découvre tous les quartiers de vienne avec des angles et des points de vie originaux; on suit également les promenades autour dans la foret viennoise et la suavité fragile d'une
certaine époque entre deux guerres.. dans la haute bourgeoisie tres cultivée. il faut également noter que ce fils d'architecte a un génie des lieux viennois:bars, salons de thé, cours
intérieures, villas à l'écart, buvettes forestières, palais impériaux, bibliothèques historiques , vastes escaliers, circulation des tramways ou des péniches, description des gares et des
alentours,vastes panoramas ou paysages de ponts et hangars, tout bouge, tourne, glisse, évolue, s’enchevêtre admirablement dans un mouvement cinématographique....doderer,dans la coulée du temps libère parfois des parcelles d’éternité entre deux amis,au cours d'une promenade,
au creux d'une nuit, chez un un homme saisis dans sa solitude soudain voluptueuse, ou les comédies du désir entre une veuve et un prétendant.., oui Doderer déchire par glissements,lamelles, coulées, le poids écrasant du temps et il s’affranchit de son ordre dans
une sorte de joie de la recréation des formes...comme dans Proust,l'idée du temps retrouvé est l'origine et l'objet de son travail d'écrivain. c'est le paradoxe de cette oeuvre d'imposer une
sorte de psychologie dans l’espace (viennois),cet éternel présent, et de toucher à l'intemporel en s'incrustant dans le centre même du passé d'une ville et des couches de sa société.
Paru en Allemagne en 1938,ne pas oublier non plus « Un meurtre que tout le monde commet ». c’ est le premier roman important de Heimito von Doderer. Ce livre rassemble les éléments d'une enquête policière, ceux d'une éducation sentimentale et
ceux, enfin, d'un roman d'initiation que n'épuise pas l'anecdote : parvenu à l'âge adulte, Conrad Castiletz (Kokosch", l'anti-héros romantique du roman) qui mène dans l'Allemagne des années
vingt, la vie ordinaire et sans histoire d'un fils d'industriel, s'efforce un jour de résoudre l'énigme de la mort de la soeur de sa femme, survenue plusieurs années auparavant. densité poétique
et souvent baroque du style, suggèrent une volonté d'élucider ces ellipses de la vie où Doderer perçoit
non pas le déterminisme d'un hasard mais la magie d'un destin. l'oeuvre de Doderer, du reste, s'articule
autour de personnages égarés dans l'Histoire collective et que l'on voit chercher inlassablement la nature de leur identité.
Voici un extrait de la fiche wikipedia qui n’est pas mal faite du tout :
Il est d'origine aristocratique par son père comme par sa mère. Son père, de confession catholique, occupe des fonctions importantes dans les chemins de fer austro-hongrois. Sa mère est de
confession protestante.
Il doit interrompre ses études à cause de la Grande guerre au cours de laquelle il sert sur le front oriental, notamment en Galicie et en Bucovine. Il est fait prisonnier par les Russes et, après
un long confinement en Sibérie, ne revient à Vienne qu'en 1920. Cette année-là, il reprend des études d'histoire et de psychologie.
Il s'essaie à la littérature avant même la fin de ses études et la soutenance de sa thèse pour le doctorat en histoire. Il publie en 1923 un premier recueil de poésie et en 1924 son premier
roman,La Brèche.
À la même époque, il commence une liaison avec une femme d'origine juive avec laquelle il se mariera en 1930, avant de s'en séparer deux ans plus tard. Il adhère au parti nazi autrichien en 1933,
quelques mois avant son interdiction par le chancelier Dollfuss. Il rejoint néanmoins le parti nazi allemand en 1936.
Par la suite, il prend peu à peu ses distances vis-à-vis du nazisme parallèlement à son rapprochement avec l'Eglise catholique, avant sa conversion complète en 1940.
Il est mobilisé pendant la Guerre et envoyé notamment en France, puis sur le front de l'Est, enfin à Oslo où il termine la Guerre. Il est fait prisonnier et ne retourne en Autriche qu'en 1946. Il
cherche alors à échapper à la proscription qui frappe les anciens nazis.
Il échappe finalement à l'interdiction de publier et fait paraître en 1951 un roman-fleuve qui le rend célèbre, Die Strudlhofstiege, d'après un escalier a Vienne.
Après un second mariage, il s'attaque à la composition d'un autre roman, plus ambitieux encore, qu'il avait imaginé et ébauché, avant de l'abandonner, dans les années 1930 : Les Démons. Cette
fresque romanesque, parue en 1956 et mêlant de nombreux personnages inspirés de sa propre vie, est généralement considérée comme son chef-d’œuvre.
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Découvrir l’autrichien Heimito von Doderer,pas si loin de Proust
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