Joseph Barthélemy, né le 9 juillet 1874 à Toulouse et mort le 14 mai 1945, est un juriste et un homme politique français,
ministre de la Justice sous le régime de Vichy. Il est le fils d'Aimé Barthélemy, ancien maire (républicain) de Toulouse. La famille est aisée, mais la mort prématurée de son père conduit le
jeune Joseph à demander une bourse pour poursuivre ses études. Il est docteur en droit en 1900, puis agrégé en 1906. Il est enseignant à la faculté de droit de Lille, puis à celle
d'Aix-en-Provence, tout en étant avocat inscrit au barreau de Paris. Il devient ensuite professeur de rang magistral à la faculté de Montpellier. Puis, à partir de 1914, il occupe la chaire de
droit constitutionnel à la faculté de droit de Paris, ainsi que celle d'histoire parlementaire et législative à l'École libre des sciences politiques. Il garde ces deux postes jusqu'à la Seconde Guerre mondiale.
De 1904 à 1920, il publie de nombreux textes réclamant une amélioration de la Troisième République, par l'octroi du droit de vote aux femmes, et par un rééquilibrage des pouvoirs en faveur du
président de la République, sans pour autant changer la nature parlementaire du régime. Il entre en politique en 1919, quand il devient député du Gers, membre du Parti républicain de rénovation
nationale et de l'Alliance démocratique (droite modérée), apparenté au groupe parlementaire de l'Action républicaine et sociale, qu'il préside. Joseph Barthélemy défend comme député les idées
qu'il avait développées pendant les années précédentes. En 1922, il défend avec son collègue de groupe Paul
Reynaud une politique moins dure vis-à-vis de l'Allemagne.
Il est le délégué de la France aux troisième et quatrième assemblées de la Société des Nations à Genève en 1922 et 1923. Réélu en 1924, il perd son siège en 1928, après le rétablissement du
scrutin majoritaire d'arrondissement. Il échoue à le retrouver en 1936, après avoir tenté en vain de se faire élire député de Paris lors d'une élection partielle en 1931, puis lors des élections
générales de 1932. Il retourne à ses activités d'enseignant et devient éditorialiste au quotidien Le Temps. Il continue de défendre ses idées sur la réforme institutionnelle, et propose également
de retirer aux parlementaires l'initiative en matière budgétaire. Il veille toujours à ne défendre que des projets restant dans l'esprit des lois constitutionnelles de 1875. Il est élu membre de
l'Académie des sciences morales et politiques en 1927.
Partisan du libéralisme économique depuis sa jeunesse, il critique vivement les tentatives d'interventions de l'État dans l'économie. Jusqu'au milieu des années 1930, cette position est pour lui
le complément nécessaire du libéralisme politique. Mais, à partir de 1936-37, la défense de l'ordre et des libertés économiques lui apparaît de plus en plus contradictoire avec la démocratie
telle qu'elle fonctionne à l'époque. En février 1936, il critique le Front populaire, avant son accession au pouvoir, dénonçant ses partisans comme des « adeptes du désordre social ». Il critique
vivement la politique interventionniste du Front populaire, notamment la semaine de 40 heures et l'Office national interprofessionnel du blé. Il voit dans la politique ainsi menée un décalque de
l'expérience soviétique (La Revue de Paris, août 1936) et craint une insurrection révolutionnaire.
Face à la guerre d'Espagne, il s'oppose fermement à tout soutien de la France au gouvernement républicain, opposant légalité et légitimité. Il va jusqu'à comparer les insurgés franquistes aux
Américains révoltés pour l'Angleterre, en 1776, et dénie aux socialistes ou, a fortiori, aux communistes, tout droit à gouverner légitimement, même s'ils obtiennent l'appui d'une majorité des
suffrages exprimés lors d'élections libres, comme ce fut le cas en France et en Espagne. Au printemps de 1938, il justifie juridiquement la cession des Sudètes à l'Allemagne nazie. Tout en
refusant les totalitarismes, qui violent trop les droits de l'individu, Barthélemy penche de plus en plus vers une solution autoritaire. Méconnaissant les transformations sociales de
l'entre-deux-guerres, il « se lamente sur un passé rêvé et idéalisé » (Gilles Martinez), ce qui le conduit à défendre des positions franchement réactionnaires.
Rallié au régime de Vichy du Maréchal Pétain dès le mois d'août 1940, il est ministre de la Justice du 27
janvier 1941 au 26 mars 1943. Très favorable à Pétain, il le soutient jusqu'au bout. Ni le durcissement du
régime, en 1941-1942, ni le retour de Pierre Laval comme chef de gouvernement, en avril 1942 — qui n'aime guère
son ministre de la Justice et s'emploie à le marginaliser —, ne le font changer d'avis. Comme membre du gouvernement, il réaffirme son hostilité aux lois votées par le Front populaire et son
souhait d'une forte natalité, jugée nécessaire face à l'Allemagne. Juriste, il est l'un des principaux rédacteurs du projet de constitution de 1941, et défend le texte en arguant que « la liberté
n'est pas la fondation des institutions » mais « le couronnement, le luxe », une fois que les circonstances le permettent. Pour Joseph Barthélemy, la situation exige une solution nettement
autoritaire, que Gilles Martinez rapproche du régime instauré par Salazar au Portugal. Il ne répugne pas à l'inscription de la discrimination raciale dans le texte constitutionnel, l'égalité des
droits civils étant réservée aux « Français qui n'appartiennent pas à une autre race ». Admiratif de la Monarchie de Juillet, il est désormais séduit par les idées antiégalitaires de
l'orléanisme.
Comme membre du gouvernement, il est l'un des signataires de la loi sur le Statut des Juifs du 2 juin 1941, adoptée à l'initiative de Xavier Vallat. Dans La Patrie de juin-juillet 1941, il
affirme avoir « le cœur fendu face à tant de situations individuelles » douloureuses créées par le statut des Juifs, mais il n'en justifie pas moins ces mesures au nom des arguments ordinaires de
l'antisémitisme répandu dans les années précédentes : les Juifs refuseraient de s'intégrer, et seraient même responsables de la défaite de 1940. Pour lui, les Juifs sont aussi responsables du
dépérissement de la nation française qui l'obsède depuis 1936. En août 1941, Joseph Barthélemy cosigne la loi créant les sections spéciales des cours martiales et la section spéciale de la cour
d'appel de Paris, juridictions d'exception devant lesquelles aucun recours n'est possible. Peu favorable à une telle mesure, il l'applique pourtant en toute connaissance de cause.
Il est également l'un des signataires avec Abel Bonnard de la loi numéro 744 du 6 août 1942 (Journal Officiel du
27 août 1942) sanctionnant les actes homosexuels au-dessous de vingt-et-un ans, alors que la majorité hétérosexuelle est alors à treize ans. Cette loi, inappliquée sous la IVe République,
réutilisée sous la présidence du général de Gaulle, sera abrogée en 1982. Joseph Barthélemy a été le libéral
le plus engagé avec le régime de Vichy, mais non le seul : Pierre-Étienne Flandin, Jacques Bardoux,
Lucien Romier ou encore Émile Mireaux, compagnons de Joseph Barthélemy au Temps ou à l'Alliance démocratique, ont eux aussi exercé des responsabilités à Vichy. Devenu gênant par ses réticences
croissantes, Joseph Barthélémy est remplacé par Maurice Gabolde au ministère de la Justice et revient enseigner à la faculté de droit de Paris. Il rédige ses Mémoires et revient partiellement à
ses idées d'avant 1936, demandant par exemple la restauration du suffrage universel, mais défend, a contrario du parlementarisme, un régime présidentiel.
Inculpé à la Libération, il est incarcéré à Auch le 6 octobre 1944. Au cours de l'épuration, son dossier est instruit par la Haute cour de justice, mais il meurt d'un cancer en mai 1945, avant la
fin de la procédure judiciaire.
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Barthélemy Joseph
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