Ruth Gordon Jones, née le 30 octobre 1896 à Quincy (Massachusetts) et morte le 28 août 1985 à Edgartown (Massachusetts), plus connue sous le nom de Ruth Gordon, est une actrice et scénariste américaine.
Quoique son père fût sceptique quant à ses chances au théâtre, il l'inscrivit en 1914 à l’American Academy of Dramatic Arts à New York. L’année suivante, Ruth Gordon faisait sa première apparition à l'écran comme figurante dans des films muets tournés à Fort Lee ; on la voit ainsi interpréter une danseuse dans La Grande Farandole (The Whirl of Life), d'après la biographie de Vernon et Irène Castle. Elle fait aussi ses débuts à Broadway dans la reprise de Peter et Wendy, où elle interprète le rôle de Nibs (l'un des enfants perdus), aux côtés de Maude Adams : elle trouve déjà grâce auprès d'un critique influent du moment, Alexander Woollcott, qui la juge « rayonnante », et qui deviendra son mentor.
En 1918, Ruth Gordon donne la réplique à Gregory Kelly dans une adaptation pour Broadway de Seventeen, de Booth Tarkington. Le couple continuera à se produire dans des tournées d'Amérique du Nord, interprétant The First Year de Frank Craven et deux pièces de Tarkington : Clarence et Tweedles. En 1920, Gordon et Kelly se marient. Au mois de décembre 1920, Ruth Gordon risqua une importante opération de chirurgie réparatrice dans un hôpital de Chicago, afin de remédier à ses jambes arquées3. Au bout de trois mois de convalescence, elle déménagea avec Kelly à Indianapolis où il recrutèrent une troupe pour jouer des pièces du répertoire. Mais Kelly mourut foudroyé d'une crise cardiaque en 1927, à l’âge de 36 ans. Ruth Gordon tenta alors un retour à Broadway en interprétant le rôle de Bobby dans Saturday's Children de Maxwell Anderson : pour une actrice confinée depuis des années à des rôles d'amoureuse, c'était là une composition nouvelle2.
Enfin en 1929, Ruth Gordon venait de décrocher le rôle-titre de "Serena Blandish" lorsqu'elle fut mise enceinte par le producteur du spectacle, Jed Harris. Leur fils, Jones Harris, vint au monde à Paris ; mais l'actrice n'épousa pas le père. Ruth Gordon poursuivit sa carrière théâtrale tout au long des années 1930, ponctuée par de belles interprétation de Mattie dans Ethan Frome, de Margery Pinchwife dans la comédie de William Wycherley, La Provinciale, à l’Old Vic de Londres et à Broadway, ainsi que du personnage de Nora Helmer dans Une maison de poupée de Henrik Ibsen à Central City (Colorado) et à Broadway.
Malgré un contrat sans suite passé au début des années 1930 avec Metro-Goldwyn-Mayer, il faut attendre 1941 pour revoir Ruth Gordon à l'écran, face à Greta Garbo dans La Femme aux deux visages. Elle sera plus heureuse avec les autres studios d’Hollywood, pour lesquels elle obtient toute une série de seconds rôles : celui de Mary Todd Lincoln dans Abraham Lincoln, de Mrs. Ehrlich dans La Balle magique du Docteur Ehrlich et dans Convoi vers la Russie (1943). Parmi ses rôles au théâtre à cette période, il y a lieu de citer son interprétation d’Iris dans The Strings, My Lord, Are False de Paul Vincent Carroll, et celui de Natasha dans une reprise des Trois Sœurs d’Anton Tchekhov, par Katharine Cornell et Guthrie McClintic. Elle tint également le premier rôle dans deux pièces qu'elle avait écrites : Over Twenty-One et The Leading Lady.
Ruth Gordon se remaria en 1942 avec l'écrivain Garson Kanin, de 16 ans son cadet. Ruth Gordon et G. Kanin travaillèrent de conserve aux scénarios de deux films pour Katharine Hepburn et Spencer Tracy, dirigés par George Cukor : Madame porte la culotte (1949) et Mademoiselle Gagne-Tout (1952). Pour ces deux scénarios, ainsi que pour celui, plus ancien, d’Othello (1947), les deux auteurs furent nominés aux Oscars. Avec l'appui de la MGM, elle porta à l'écran son autobiographie Years Ago, sous le titre The Actress (1953). Jean Simmons y interprète le rôle d'une jeune fille de Quincy (Massachusetts), qui parvient à convaincre son père, un capitaine au long cours, de l'emmener à New York pour qu'elle devienne actrice. Ruth Gordon continuera à publier ses mémoires jusque dans les années 1970, avec trois nouveaux volumes : My Side, Myself Among Others et An Open Book.
Ruth Gordon poursuivit sa carrière théâtrale dans les années 1950, et fut sélectionnée en 1956 comme meilleur premier rôle féminin aux Tony Awards, pour son interprétation de Dolly Levi dans La Meneuse de jeu de Thornton Wilder, qu'elle avait déjà joué à Londres, Édimbourg et Berlin. En 1966, elle fut sélectionnée aux Oscars et remporta un Golden Globe comme Meilleur second rôle féminin pour Daisy Clover face à Natalie Wood. Trois ans plus tard (1969), elle sera récompensé par un Oscar du Meilleur second rôle féminin dans Rosemary's Baby, adaptation cinématographique du conte d'horreur d’Ira Levin. Lors de la remise de son Oscar, Ruth Gordon, âgée de 72 ans, remercia les jurés « pour leurs encouragements » (elle jouait alors depuis 50 ans au théâtre). Elle sera de nouveau sélectionnée en 1971 pour son interprétation de Maude dans la pièce-culte Harold et Maude (face à Bud Cort). Elle apparaîtra encore dans vingt-deux autres films et au moins autant d'épisodes pour la télévision : par exemple dans Columbo (« Le Mystère de la chambre forte », 1977), ou Taxi (« Mamie tacot », 1978). Elle meurt d'une hémorragie cérébrale à Edgartown (Massachusetts) en 1985.
Filmographie
- 1941 : La Femme aux deux visages : Miss Ruth Ellis
- 1943 : Convoi vers la Russie : Mrs. Jarvis
- 1943 : L'Ange des ténèbres : Anna Stensgard
- 1965 : Daisy Clover : La mère de Daisy
- 1966 : Lord Love a Duck : Stella Bernard
- 1968 : Rosemary's Baby : Minnie Castevet
- 1969 : Qu'est-il arrivé à tante Alice ? : Alice Dimmock
- 1970 : Where's Poppa? : Mrs. Hocheiser
- 1971 : Harold et Maude : Maude
- 1976 : Qu'est-il arrivé au bébé de Rosemary ? : Minnie Castevet
- 1976 : Le Bus en folie : La vieille dame
- 1977 : Columbo : Le Mystère de la chambre forte : Abigail Mitchell
- 1978 : Doux, dur et dingue : Ma
- 1980 : Ça va cogner : Ma
- 1982 : Jimmy the Kid : Bernice
- 1985 : Maxie : Mrs. Lavin
Scénariste
- 1947 : Othello, de George Cukor
- 1949 : Madame porte la culotte, de George Cukor
- 1952 : Mademoiselle gagne tout, de George Cukor
- 1952 : Je retourne chez maman (The Marrying Kind), de George Cukor