Histoire – François Hollande rendra hommage ce lundi aux 99 pendus de Tulle, victimes en juin 1944 de la terreur SS en représailles des actions de la Résistance. Un épisode douloureux bien moins connu que le massacre d'Ouradour-sur-Glane.
François Hollande revient ce lundi de retour dans son fief corrézien de Tulle. Le chef de l'Etat, maire de la ville de 2001 à 2008, y rendra hommage aux "99 pendus", un épisode aussi horrible que méconnu de la terreur nazie. Le lendemain du Débarquement, les résistants FTP (francs-tireurs-partisans) de Jacques Chapou, dit "Kléber", attaquent Tulle tenu par une garnison allemande de quelques centaines d'hommes aidés par des supplétifs français. L'objectif est de mettre fin aux opérations de ratissages et de répression menées par les troupes nazies dans la région.
Rapidement, les maquisards prennent le contrôle de la ville, les Allemands se repliant dans l'école normale de jeunes filles, la manufacture d'armes et l'école de Souilhac, un village proche. Le 8 juin, les combats font rage et plusieurs victimes dans les deux camps.
Rafle dans la ville
En soirée, les premiers éléments de la terrible division SS Das Reich pénètrent dans les faubourgs de la ville corrézienne. N'étant pas de taille à les affronter, Kléber ordonne le repli des partisans, laissant les nazis réoccupper la ville. Trouvant les cadavres de leurs compatriotes, les Allemands se lancent le 9 juin dans une vaste opération de terreur. Tous les hommes de 16 à 60 ans, soit environ 5 000 personnes, sont raflés et rassemblés devant la manufacture d'armes.
Après plusieurs tris selon des critères parfaitement aléatoires, 120 hommes sont "sélectionnés" par les SS et destinés à être pendus. Les victimes sont exécutées en public par groupe de dix mais étrangement, sans raison précise, 21 condamnés sont épargnés. Puis le lendemain, 149 Tullistes, de nouveau choisis au hasard, sont déportés dans le camp de concentration de Dachau. Seuls 48 d'entre eux reviendront vivants. Et c'est également ce jour-là, le 9 juin 1944 que la division Das Reich commettra le massacre d'Oradour-sur-Glane, à une centaine de kilomètres de Tulle.
La Résistance n'était pas responsable
Cette terreur nazie a néanmoins atteint son objectif en suscitant chez certains habitants une forme de rancœur envers la résistance, jugée implicitement responsable du massacre. Si les FTP n'avaient pas attaqué Tulle, les représailles n'auraient pas eu lieu. Ce contexte particulier a ainsi conduit à passer sous silence la tragédie des 99 pendus tandis que le massacre d'Oradour restera dans l'histoire comme le symbole de la terreur nazie en France.
Et pourtant. "Dire que la Résistance a causé les pendaisons n’est pas juste", explique l'historien Bruno Kartheuser, dans les colonnes de La Montagne à la veille de la visite présidentielle. "Ce drame est le fait du hasard. C'est une cascade d'éléments malheureux qui se sont succédé," abonde l'historien Fabrice Grenard toujours au quotidien régional. Pour les deux hommes, les maquisards ignoraient que la division Das Reich se trouvait à proximité et n'auraient certainement pas attaqué Tulle s'ils avaient eu connaissance de cette présence. Lundi matin, François Hollande réitèrera peut-être ce message. Soixante-dix ans après un massacre dont les responsables n'ont jamais été inquiétés par la justice.