Lionel Jospin, né le 12 juillet 1937 à Meudon (Hauts-de-Seine), est un homme politique français, Premier ministre de 1997 à 2002.
Né dans une famille protestante et militante de gauche, Lionel Jospin est issu du second mariage de son père Robert Jospin, un enseignant pacifiste membre du parti socialiste SFIO, avec une sage-femme, Mireille Dandieu. De son premier mariage, Robert Jospin a eu deux enfants : un fils, Maurice, dit Mowgli, futur journaliste et jazzman, ami de Claude Luter, et une fille, Hélène. De l'union de Robert et Mireille Jospin naîtront quatre enfants : Agnès, Lionel, Olivier et Noëlle, qui épousera le philosophe François Châtelet et deviendra romancière. De Meudon, où elle occupe un appartement, puis une villa avec jardin, la famille vient en 1948 s'installer à Paris, dans le quartier de la Bastille, boulevard Richard-Lenoir. Deux ans plus tard, Robert Jospin prend la direction d'un centre d'enfants difficiles, à la Ferté-sous-Jouarre, en Seine-et-Marne.
Adolescent, Lionel Jospin a intégré sous le nom de « Langue agile » les éclaireurs (protestants) de France, et à 15 ans, lors d'un camp dans le Jura, a eu pour chef de patrouille Michel Rocard, alias « Hamster érudit ». En 1954, il obtient son baccalauréat au lycée Janson de Sailly. De 1956 à 1959, il est étudiant à l'Institut d'études politiques de Paris et résidant à la cité universitaire Jean Zay à Antony. Il réussit le concours de l'École nationale d'administration en novembre 1961. De 1961 à 1963, il effectue son service militaire comme élève-officier à l'école de cavalerie de Saumur (comme avant lui Jacques Chirac), puis comme officier de chars, chef de peloton d'instruction à Trêves (Allemagne). Il y retrouve le soldat Guy Roux, futur entraîneur de l'AJ Auxerre, et le soldat Jean-Loup Dabadie, futur scénariste et parolier à succès, ainsi que ses copains d'alors : Josselin de Rohan, Jean-Bernard Mérimée et Jean Vidal.
Issu d'une famille de gauche, mais rebuté par le stalinisme et la politique coloniale de la SFIO, il rejoint le mouvement trotskiste au début de 1965. Il militera d'ailleurs à l'UNEF contre la guerre d'Algérie. Sous l'influence d'un ami éducateur, Michel Lautrec (1937-2000), il fait partie du groupe Lambert, Organisation communiste internationaliste (OCI) où il milite sous le pseudonyme de Michel, en hommage à son initiateur. Lionel Jospin et Pierre Mauroy, le 17 octobre 2000.De 1963 à 1965, il est élève de l'ENA, dans la promotion Stendhal. Se trouvent dans la même promo : Yves Cannac, Ernest-Antoine Seillière, Jean-Pierre Chevènement, Josselin de Rohan, Alain Gomez, Jacques Toubon, Jean Vidal, Jean-Bernard Mérimée, Tristan d'Albis, et Christian Aubin. Il effectue son stage à la préfecture de Bourges, et son stage « ouvrier » dans les houillères du Nord.
Il entre au Quai d'Orsay comme secrétaire des Affaires étrangères à sa sortie de l'ENA, en 1965. Il se trouve à la direction de la coopération économique du Quai d'Orsay, où il travaille avec Ernest-Antoine Seillière. En 1970, il abandonne sa carrière de diplomate pour devenir professeur d'économie à l'IUT de Sceaux (92). Après le congrès d'Épinay, il rejoint le Parti socialiste en 1971, à la demande de l'OCI. Il rencontre régulièrement Pierre Lambert ou d'autres responsables de l'OCI. Lionel Jospin n'en mène pas moins une carrière rapide au PS, devenant un protégé de François Mitterrand. Ce dernier, informé des années plus tard par Loïk Le Floch-Prigent de la double appartenance de Lionel Jospin, aurait répondu « Ne vous en faites pas, je sais ! Je m'en charge. C'est moi qui le retournerai ». En 1973, il entre au Bureau exécutif et devient Secrétaire national à la formation. En 1977 Lionel Jospin est élu au XVIIIe arrondissement de Paris, puis député de cette même ville en 1981, jusqu'en 1986, puis député de Haute-Garonne.
En 1981 François Mitterrand est élu président de la République. Il vient alors d'être élu Premier secrétaire du parti, succédant à François Mitterrand. Lionel Jospin garde ce poste durant toute la durée du premier septennat de François Mitterrand. Il quitte l'OCI durant cette période, rompant ses contacts avec le lambertisme autour de 1981. En 1988, il devient ministre de l'Éducation nationale. Il lance une réforme de la formation des enseignants et redessine la carte universitaire. Mais la contestation lycéenne l'affaiblit en 1990. Sa rivalité avec Laurent Fabius, exacerbée lors du congrès de Rennes en 1990, déchire le Parti socialiste. Lionel Jospin s'éloigne de François Mitterrand, doit quitter le gouvernement en 1992. Après sa défaite aux législatives en 1993, il quitte ses fonctions au PS et songe à se retirer de la vie politique, notamment en demandant un poste d'ambassadeur, ce à quoi s'opposera Alain Juppé, ministre des Affaires étrangères de l'époque.
Suite au désistement de Jacques Delors, il rebondit et est élu candidat du Parti socialiste à l'élection présidentielle le 5 février 1995. Donné perdant dès le début de l'élection, il crée la surprise en arrivant en tête au premier tour, devant les rivaux RPR Jacques Chirac et Edouard Balladur et en obtenant un bon score au second. Lionel Jospin redevient alors Premier secrétaire et dirige l'opposition. Il fait alliance avec le Parti communiste, les Verts, le Parti radical de gauche et, le Mouvement des Citoyens pour créer la gauche plurielle qui remporte les élections législatives de 1997 suite à la dissolution décidée par Jacques Chirac le 21 avril 1997.
Lionel Jospin et Laurent Fabius, le 11 avril 2000.Ce dernier le nomme alors Premier ministre le 2 juin 1997 : c'est le début de la troisième cohabitation. Ayant une image austère, il forme un gouvernement d'union centré sur quelques proches : Dominique Strauss-Kahn, Claude Allègre et Martine Aubry. Cette dernière met en place la principale promesse de campagne : les 35 heures. Assez populaire, il doit cependant se séparer du noyau dur de son gouvernement : contesté par les syndicats enseignants, Claude Allègre abandonne l'Éducation nationale, tandis que Dominique Strauss-Kahn, mis en examen, choisit de démissionner. Lors du vaste remaniement ministériel de 2000, il fait alors entrer les "éléphants" du PS, dont Jack Lang rue de Grenelle et, son rival Laurent Fabius à Bercy.
En 2001, son passé trotskiste est révélé dans des articles de presse (Le Monde, l'Express, le Nouvel Observateur), puis dans deux biographies. La rumeur courait depuis 1982 (alimentée notamment par trois anciens membres de l'Organisation communiste internationaliste, Yvan Berrebi, Patrick Dierich et Boris Fraenkel) mais avait jusque-là été démentie par l'intéressé, qui affirmait avoir été confondu avec son frère Olivier Jospin, lui-même militant avoué de l'organisation trotskiste. L'obligation de reconnaître les faits le déstabilise. Sur le plan économique, Lionel Jospin bénéficie d'une période d'embellie liée à une forte croissance mondiale, avec notamment à l'envol des nouvelles technologies, et a mis en œuvre une politique ciblée sur l'emploi (emplois-jeunes, prime pour l'emploi, baisse de la TVA, soutien à la consommation, allègements de charges, réforme sur l'annualisation du temps de travail en contrepartie des 35h) ; entre 1997 et 2001, le chômage passe du taux record de 12,2% à un plancher de 8,6%, mais il repassera la barre des 9% en 2002. L'impact de la réforme des 35h reste toutefois contesté, pour deux raisons, la première concerne l'efficacité même de la réforme et la deuxième est dû au fait qu'a ce moment là, il n'y avait pas le recul qui permettait de juger correctement.
Fier de son bilan, il se présente en 2002 à l'élection présidentielle. Jacques Chirac le prend de vitesse en annonçant bien avant lui sa candidature à l'élection présidentielle. Il gère mal une campagne marquée par le thème de l'insécurité, sujet décrit comme ayant pris une place disproportionnée par certains, principalement dans le traitement de l'information par les médias. D'autres accusent même ces derniers de favoriser l'extrême droite en attisant le racisme à travers des images ne montrant souvent que des "étrangers", commettant des délits, brûlant des voitures et affrontant les forces de l'ordre. Ces allégations ont été démenties par les médias eux-mêmes, mais l'extrême-droite grimpe néanmoins dans l'opinion publique. Lionel Jospin ne s'en soucie pas outre mesure. Ainsi, il évalue mal ces risques qui s'ajoutent aux divisions de la gauche: il n'arrive pas à rassembler sous sa candidature les composantes de sa majorité plurielle qui présentent chacune un candidat à l'élection présidentielle. Son positionnement n'est pas clair, affirmant au début de la campagne que son "projet n'est pas socialiste", puis nuançant par la suite ce propos avec des drapeaux rouges lors des meetings. D'autre part, ses attaques personnelles contre le président ont eu un effet mitigé ("Un président vieilli et usé"). Enfin, il lui est reproché de ne pas avoir profité des années de croissance économique solide pour affronter les grands problèmes de société, notamment la réforme des retraites. Le scrutin sera marqué par une très forte abstention. Il est éliminé dès le premier tour par les électeurs qui ont placé Jean-Marie Le Pen en seconde position derrière Jacques Chirac qui sera élu très largement après de larges mobilisations, dans toute la France, contre l'extrême-droite. Dépité par son échec cuisant, il annonce immédiatement son retrait de la vie politique dès la fin de l'élection présidentielle.
Depuis lors, il intervient de temps en temps dans des débats nationaux ou propres au Parti socialiste. Pour la première fois depuis trois ans, il accepte l'invitation de France 2 à « Question ouverte » le 28 avril 2005 pour défendre le « Oui » au référendum sur le traité constitutionnel européen puis est revenu le 25 mai s'exprimer sur le même sujet sur TF1. Son intervention n'empêche pas le « non » de l'emporter. Lionel Jospin a trois enfants, issus de deux mariages différents. Son premier mariage est avec Elisabeth Dannenmuller, il se marie ensuite avec la philosophe Sylviane Agacinski. En 2005, sort le livre Le monde comme je le vois qui relance les polémiques au sujet de son éventuel retour en politique : c'est en fait la question de la présidentielle de 2007 qui est implicitement soulevée par cette publication. Le 26 novembre 2005, Lionel Jospin affirme sur la radio Europe 1 qu'il n'est pas « candidat à la candidature » du Parti socialiste pour l'élection présidentielle en 2007 et qu'il s'est retiré « de la vie politique active » en avril 2002.