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Riina Salvatore dit Toto Riina

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Salvatore Riina (né le 16 novembre 1930), également connu sous le nom de Totò Riina et surnommé Totò u curtu,est un des membres les plus influents de la Mafia sicilienne.

Riina Salvatore dit Toto RiinaRiina Salvatore dit Toto Riina

Il a été surnommé la Bête, ou parfois le Petit à cause de sa petite taille, bien que personne n'ait jamais osé l'appeler par l'un de ses surnoms devant lui. Durant sa carrière dans le crime il a personnellement tué environ quarante personnes et est soupçonné d'avoir commandité les meurtres d'un peu plus de mille personnes. Pendant les années 1980 et le début des années 1990, Riina et sa famille de Mafia, les Corleonesi, ont fait une campagne impitoyable de violence contre les truands rivaux et l'État avec l'assassinat de deux juges. Cette terreur répandue dans la population par la Mafia a engendré des actions majeures des autorités, entraînant la capture et l'emprisonnement de Riina et de plusieurs de ses associés. Il a été capturé en 1993, et est en prison depuis. Né en 1930, Riina monte progressivement dans la hiérarchie des Corleone et rejoint la Mafia locale, les Corleonesi, à l'âge de dix-huit ans après avoir commis un meurtre en leur nom. L'année suivante il est arrêté après le meurtre d'un homme pendant une dispute. Il sera ensuite condamné à six ans de prison pour homicide involontaire.

Le parrain des Corleonesi était alors Michele Navarra jusqu'en 1958 lorsqu'il il fut tué sur les ordres de Luciano Liggio, un mafioso de 33 ans devenu par la suite le nouveau boss. En même temps que Totò Riina et Bernardo ProvenzanoLiggio commença à accroître la puissance des Corleonesi. Les Corleonesi n'étaient pas un élément important de la Mafia sicilienne dans les années 50, sans aucune comparaison avec les principales basées dans la préfecture, Palerme. Sous-estimant les truands de Corleone, les patrons de Palerme se sont souvent référés aux Corleonesi comme "les paysans".

Au début des années 60, Liggio, Riina et Provenzano, qui avaient passé les dernières années en chassant et tuant des douzaines d'hommes de Navarra encore vivants, furent obligés de se cacher, de nombreux mandats d'arrêt ayant été lancés à leur encontre. Riina et Leggio furent arrêtés et jugés en 1969 pour des meurtres commis au début de la décennie. Ces derniers furent acquittés grâce à l'intimidation des jurés et des témoins. Riina se cacha plus tard cette même année après avoir été accusé d'un autre meurtre. Il devait rester un fugitif durant les vingt-trois années suivantes. En 1974 Luciano Liggio est arrêté et emprisonné pour le meurtre de Michele Navarra seize années plus tôt. Bien que Liggio ait maintenu une certaine influence derrière les barreaux, Toto Riina était maintenant la tête pensante des Corleonesi. Pendant les années 70 la Sicile devint un lieu important dans le commerce international d'héroïne, particulièrement dans la synthèse et l'exportation de narcotiques. Les bénéfices de l'héroïne étaient importants, et dépassèrent ceux des activités traditionnelles d'extorsion de fonds. Totò Riina voulut prendre les commandes de ce trafic et entra dans une guerre avec les autres familles de la Mafia.

À la fin des années 70, Riina organisa les meurtres d'un certain nombre de hauts fonctionnaires, tels que des juges, des procureurs ou des carabiniers. En plus d'intimider l'État, ces assassinats servirent également à porter un coup aux rivaux des Corleonesi. Les parrains de beaucoup de familles de la Mafia étaient souvent médiatisés, débattant avec des politiciens et des maires, se protégeant par des relations plutôt que par la violence. En revanche, Riina, Provenzano et n'importe quel Corleonesi étaient des fugitifs, se cachant toujours, rarement vus par d'autres truands et encore moins par le public. En conséquence, lorsqu'un policier ou un juge était tué c'était les familles les plus médiatisées de la Mafia qui étaient le sujet de toutes les investigations officielles, les assassinats étant de plus volontairement commis dans leurs territoires.

Les principaux rivaux des Corleonesi étaient Stefano Bontade, Salvatore Inzerillo et Gaetano Badalamenti, patrons de familles puissantes de la Mafia de Palerme. Le 23 avril 1981, Bontade était sauvagement assassiné, puis quelques semaines plus tard, le 11 mai, Inzerillo fut supprimé par une criblée de balles. Plusieurs parents et associés des deux hommes furent ensuite tués ou disparurent mystérieusement, y compris le fils de 15 ans d'Inzerillo, à qui Riina fit couper la main avant de le faire abattre. Badalamenti ne parvint à survivre qu'en s'enfuyant de la Sicile. De plus en plus de massacres eurent lieu au cours des deux années suivantes, illustrées par un énorme carnage : en un seul jour, le 30 novembre 1982, douze Mafiosi furent assassinés à Palerme dans douze actions distinctes. Les meurtres traversèrent même l'Océan Atlantique, avec le frère d'Inzerillo retrouvé mort dans le New Jersey après une fuite aux USA.

Riina commandita les meurtres de juges, de policiers et de procureurs afin de tenter de terrifier les autorités. Un des magistrats les plus hauts placés était le Général Carlo Alberto Dalla Chiesa, qui fut muté à Palerme en qualité de préfet pour lutter contre l'action de la Mafia. Le 3 septembre 1982, Dalla Chiesa, son épouse et un de ses gardes du corps furent assassinés dans un guet-apens. On pense que le tueur était Pino Greco, l'un des tueurs favoris de Riina. Toujours muni d'un Ak-47, et portant le surnom de "petite chaussure" (scarpazeda en sicilien car son père était cordonnier) , Pino Greco est suspecté d'avoir tué environ quatre-vingts personnes au nom de Riina, y compris Bontade et Inzerillo. En 1981 et 1982, autour de mille Mafiosi furent tués pendant que Riina décimait ses adversaires. Ces derniers tentèrent de battre en retraite : au moins deux cents d'entre eux disparurent sans laisser de traces.

Toto Riina lors de son arrestation

Toto Riina lors de son arrestation

Une des histoires les plus terrifiantes de cette période était la prétendue "salle de la mort", un appartement squatté à Palerme tenu par un des hommes de Riina, Filippo Marchese. Des hommes étaient amenés là pour être torturés afin de leur soutirer des informations, puis tués et dissous dans de l'acide ou démembrés et jetés à la mer. Un informateur ayant travaillé aux côtés de Marchese raconta que Marchese insistait pour étrangler les victimes lui-même, bien que ses hommes de main pussent s'en charger. Riina recourait souvent à la trahison durant sa guerre, se liant avec des rivaux, puis les tuant lorsqu'ils ne lui étaient plus d'aucune utilité. Il élimina même ses deux tueurs les plus impitoyables et les plus fidèles, Pino Greco et Filippo Marchese. En 1982, après avoir décidé que Marchese n'était plus utile, Riina le fit assassiner par Pino Greco, puis trois années plus tard il fit éliminer ce dernier à son tour, le jugeant un peu trop ambitieux.

Tandis que les Corleonesi devenaient le clan le plus puissant de Sicile, leur tactique se modifia quand, en 1982, un double-tueur condamné nommé Tommaso Buscetta devint le premier Mafioso sicilien à devenir un informateur (repenti) et à coopérer avec les autorités. Buscetta faisait partie d'une famille en difficulté dans la guerre des Mafia, et avait perdu plusieurs parents et beaucoup d'amis, éliminés par les tueurs de Riina. Devenir un repenti était, pour lui, la seule façon de sauver sa peau et de tenir sa revanche sur Riina. Buscetta fournit beaucoup d'informations au juge Giovanni Falcone, et témoigna au "Maxiprocès" (Maxiprocesso di Palermo) au milieu des années 80 qui a vu des centaines de mafiosi emprisonnés. Riina fut une nouvelle fois condamné pour meurtre mais par contumace : il était toujours un fugitif. Giovanni Falcone et son collègue Paolo Borsellino accomplissaient de sérieux progrès dans leur guerre contre la Mafia, ce qui les plaçait donc dans le cercle des menacés de mort.

Le 23 mai 1992, Falcone, son épouse et trois gardes du corps étaient assassinés dans l'explosion d'une bombe placée sous la route, dans les environs de Palerme. Quelques semaines plus tard, Borsellino et cinq de ses gardes du corps étaient tués dans l'explosion d'une voiture piégée. Les deux attaques furent commanditées par Toto Riina et exécutées par quelques-uns de ses tueurs. L'opinion publique fut exaspérée envers la Mafia mais aussi envers les politiciens, accusés de ne pas avoir fourni une protection suffisante aux juges Falcone et Borsellino. Le gouvernement italien décida donc d'enclencher une lutte massive contre la Mafia et sa violence.

Le 15 Janvier 1993, en agissant sur les informations d'un indicateur, la police armée des carabiniers arrête Totò Riina à Palerme dans sa voiture en compagnie de son chauffeur (son chauffeur, Balduccio di Maggio, était l'informateur en question ; plusieurs de ses parents ont été tués par la suite pour sa trahison). Riina a prétendu n'être juste qu'un pauvre comptable harcelé, et, dans son costume de piètre qualité, cet homme de 62 ans beau parleur avait bien l'air de n'être que cela. Questionné sur la société dans laquelle il travaillait, il répondit qu'il n'en parlerait pas pour ne pas salir la réputation de l'entreprise. Placé en détention, Riina resta poli et respectueux envers les officiers de police, et les remerciera plus tard de l'avoir bien traité, bien qu'il soit parvenu à les "prendre pour des imbéciles" en disant non seulement qu'il n'avait jamais entendu parler de la Mafia mais également en insistant sur le fait qu'il n'avait "aucune idée" qu'il ait été le fugitif le plus recherché de Sicile des trente dernières années. D'autres témoignages indiquent néanmoins que Riina n'a cessé de crier "communistes !" aux policiers qui l'arrêtaient.

La satisfaction du public lors de l'arrestation de Riina (un journal affichait la légende "Le Diable" sous la photographie de Riina) fut tempéré lorsqu'il a été révélé que, pendant ses trente années de fugitif, Riina avait réellement habité dans sa maison de Palerme durant toute cette période. Il avait obtenu une attention médicale en raison de son diabète et avait enregistré chacun de ses quatre enfants sous leurs vrais noms à l'hôpital local. Il s'était même rendu à Venise en lune de miel sans être inquiété. Beaucoup d'observateurs déclarèrent que les autorités n'avaient arrêté Riina qu'en raison de la pression médiatique après les meurtres des juges Falcone et Borsellino, et interprétèrent la facilité avec laquelle Riina avait berné la justice comme un exemple de l'apathie des autorités siciliennes dans la lutte contre Mafia. Bien qu'il ait déjà réussi à obtenir par le passé un non-lieu dans deux affaires de meurtre, Riina fut cette fois jugé et condamné pour un peu plus de cent meurtres, dont ceux de Falcone et de Borsellino. En 1998, Riina fut à nouveau accusé de meurtre, celui d'un politicien qui avait été suspecté de traiter avec la Mafia et qui fut assassiné en 1992 après ne pas avoir empêché l'emprisonnement de mafiosi dans les procès du milieu des années 80.

Riina est actuellement détenu dans une prison de sécurité maximum avec des contacts limités avec le monde extérieur, afin d'éviter qu'il dirige son organisation derrière les barreaux comme certains de ses prédécesseurs l'avaient fait. Plus de 125 millions de dollars de capitaux appartenant à Riina ont été confisqués - probablement juste une fraction de son immense fortune illicite - ainsi que son vaste manoir en 1997. Dans un mouvement symbolique, ce manoir a été transformé en école pour enfants. En 2003, Riina a subi deux crises cardiaques en mai et décembre. Un des amis proches de Riina du clan des Corleonesi, Bernardo Provenzano, lui a succédé à la tête de l'organisation, avant d'être lui-même arrêté le 11 avril 2006, dans une ferme située à quelques kilomètres de Corleone.

Totò Riina s'est marié en 1974 avec Ninetta, et a eu quatre enfants de ce mariage. Ses deux fils, Giovanni et Giuseppe, ont suivi ses traces et sont déjà derrière les barreaux. En novembre 2001, à 24 ans, Giovanni Riina a été condamné pour quatre meurtres commis en 1995. Le 31 décembre 2004, le plus jeune fils de Riina, Giuseppe, a été condamné à quatorze années de prison pour différents crimes, y compris l'association de malfaiteurs, l'extorsion de fonds et le blanchiment d'argent. Cependant, une de ses filles a été élue représentante de classe dans son lycée. Par ailleurs quelques informations affirment que Totò Riina n'aurait pas reconnu son dernier enfant qu'il eu avec une autre femme, soit disant de nationalité différente.

Par son attitude réservée et évasive, Riina demeure énigmatique quant à sa personnalité. Un informateur, Antonino Calderone, décrit Riina comme étant "incroyablement ignorant, mais possédant une intuition et une intelligence difficile à sonder... très dure à prévoir". Il déclara que Riina était un beau parleur et un père et un mari consacrés. Une des anecdotes les plus étranges était celle de Riina récitant en larmes un panégyrique à l'enterrement d'un frère assassiné de Calderone, même si c'était Riina lui-même qui avait commandité le massacre. Calderone a également indiqué que lorsque Riina voulut épouser Ninetta, la famille de cette dernière s'était montrée fermement opposée. Calderone cita Riina en disant "je ne veux aucune autre femme que ma Ninetta, et si elle [ sa famille ] ne me laisse pas l'épouser, je serai obligé d'en tuer certains." La famille de Ninetta ne montra immédiatement plus aucune opposition aux plans matrimoniaux de Riina.

Giovanni Brusca, un tueur de Riina, et l'homme qui a personnellement fait exploser la bombe qui a tué le juge Falcone, devint ensuite un informateur après son arrestation de 1996. Brusca déclara que, en 1991 et début 1992, Totò Riina a projeté l'exécution d'actes de terrorisme contre l'Etat pour obtenir l'arrêt de l'intensification de la lutte contre le Mafia, y compris des actes tels que l'explosion la tour penchée de Pise. Brusca a également cité Riina en déclarant que les enfants des informateurs étaient des cibles légitimes. Déclarations confirmées un peu plus tard, lorsque Brusca, "Lo scannacristiani", séquestra pendant vingt six mois, tortura puis fit étrangler en janvier 1996, Giuseppe Di Matteo, le fils de 14 ans d'un repenti du nom de Santino Di Matteo. Bien que les actions criminelles de Riina aient eu pour but l'acquisition de la richesse et de la puissance, sa cruauté, ses trahisons et l'énorme nombre de meurtres brutaux qu'il a commis furent excessifs même par rapport aux "normes" d'autres "hommes d'honneur". Ceci permet de penser qu'il était psychopathe, ou au moins qu'il a largement mérité son surnom, La belva (La Bête).


Dalla Chiesa Carlo Alberto

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Carlo Alberto Dalla Chiesa (né le 27 septembre 1920 à Saluzzo, Province de Cuneo – mort assassiné le 3 septembre 1982 à Palerme) était un général des Carabiniers, un préfet et un résistant italien. Né à Saluzzo, Cuneo.

Dalla Chiesa Carlo AlbertoDalla Chiesa Carlo Alberto

Il était officier pendant la Seconde Guerre mondiale, au Monténégro en 1941 puis carabinier, le 8 septembre 1943, après l'Armistice de Cassibile il refuse de participer à la répression contre les partisans et passe à la résistance. Il entre après à Rome avec les alliés pour participer à la protection des ministres de l'Italie libérée. Passa de suite à la répression du banditisme en Campanie puis en 1949 en Sicile. Il y revient en 1966 et commence spécifiquement à combattre Cosa Nostra. Le général fut considéré comme un héros en Italie lorsqu'il devint commandant de la région Piémont-Val d'Aoste en 1974 et qu'il créa à Turin une structure contre-terroriste.

Celle-ci s'illustra notamment en septembre 1974, à l'occasion de la capture de Renato Curcio et Alberto Franceschini, tous deux membres des Brigades rouges. Ces captures furent possible grâce à l'aide de Silvano Girotto, connu aussi sous le nom de "frate mitra", qui infiltra l'organisation. En 1982, le général fut nommé Préfet à Palerme avec pour objectif la lutte contre la Mafia. Il fut assassiné cent jours plus tard dans un guet-apens avec son épouse Emmanuela et son garde du corps Dominico Russo, probablement organisé par Pino Greco, un tueur aux ordres de Toto Riina. Suite à cet attentat, l'État italien créa le Haut-commissariat pour la coordination de la lutte contre la délinquance mafieuse.

Badalamenti Gaetano

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Gaetano Badalamenti (14 septembre 1923 - 29 avril, 2004) mafioso italien de la famille palermitaine de Cinisi. 

Badalamenti GaetanoBadalamenti Gaetano

Membre de la pizza connection. Gaetano Badalamenti fut supplanté dans les années 1970 par Toto Riina, ce qui normalement aurait dû lui valoir la mort. Mais il eut l'intelligence de ne pas entrer en guerre contre les Corleone après les assassinats de ses alliés Stefano Bontate et Salvatore Inzerillo ses hommes de confiance dans le trafic de cocaïne avec les Nord-Américains.

Contorno Salvatore

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Salvatore Contorno dit Totuccio Contorno (né le 20 mai 1946 à Palerme, en Sicile) est un ex-soldat mafieux sous les ordres de Stefano Bontade. Il devient par la suite un pentito (témoin) pour le Maxi-Procès et pour le procès de la Pizza Connection.

Contorno SalvatoreContorno Salvatore

Tout en étant boucher, il est investi par Cosa Nostra en 1975. Le boucher Contorno est initié par la famille mafieuse de la Santa Maria Gesù, passe sous les ordres de Stefano Bontade. Bontade était un membre important de la Commission (la Cupola). Contorno et Bontade étaient compagnons de chasse dans les années 1960. Bien qu'il n'était seulement qu'un soldat de la famille, Contorno avait un rapport direct avec Bontade, sans intermédiaire. Il était un de ses tueurs préférés. Durant la seconde guerre de la mafia, son chef, Badalamenti est banni de Cosa Nostra par les Corleonesi. 

Les Corleonesi voulant s'emparer de Palerme, décidèrent d'éliminer tous leurs rivaux. Mais comme Contorno était un proche de Bontade, il était le suivant. Mais il parvint à s'échapper et à mettre toute sa famille à l'abri. Il décida alors de collaborer avec les autorités italiennes et américaines, suivant l'exemple de Tommaso Buscetta, voulant bénéficier de leur programme de protection des témoins. Il devint alors un des témoins-clés du Maxi-Procès qui eut lieu à Palerme en 1984.

70 ans de la libération d'Auschwitz: "On ressent encore la peur", raconte un lycéen

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Le 27 janvier 1945, il y a presque 70 ans jour pour jour, les soldats russes entraient dans le camp de concentration et d'extermination d'Auschwitz. RMC a suivi les élèves d'un lycée parisien en visite dans le camp. Des élèves marqués par leur visite du camp où sont morts 1,1 million de personnes, juifs en grande majorité.

70 ans de la libération d'Auschwitz: "On ressent encore la peur", raconte un lycéen

Une semaine pour se souvenir. Se souvenir de l’horreur des camps de concentration et d’extermination mis sur pied par les nazis en Pologne. Avec une date, symbolique : le 27 janvier 1945. Il y a 70 ans l’armée rouge entrait dans le camp d’Auschwitz Birkenau, près de Cracovie.

Lorsqu’ils arrivent, les soldats russes retrouvent sur place seulement 7.650 personnes dont 180 enfants. Trop fatigués, invalides, les nazis les ont laissés là. 200.000 autres prisonniers ont été évacués quelques jours plus tôt. Des survivants qui vont marcher pendant des jours dans le froid terrible de cet hiver 1945, les soldats nazis espéraient les ramener en Allemagne.

Le camp d’Auschwitz-Birkenau a été le plus grand camp construit par l’armée de Hitler. Un camp devenu le symbole du "meurtre de masse". En 5 ans, 1,1 million de personnes, des familles entières souvent, y sont mortes. Assassinées dans les chambres à gaz, exécutées pour l’exemple ou morte de froid, de faim, de maladie. Parmi ces victimes, une grande majorité de juifs mais aussi des tziganes, des intellectuels polonais, des opposants politiques ou des prisonniers de guerre.

"On leur a enlevé les cheveux… On leur a enlevé leur identité".

Ce camp de la mort est devenu un lieu de mémoire. Il fait partie du patrimoine de l’Unesco depuis 1979. Un million de personne visitent ce lieu chaque année. Parmi eux, de nombreux collégiens, lycéens, venus de toute l’Europe. RMC a suivi les 144 élèves du lycée Janson de Sailly de Paris, venu passer la journée au camp d'Auschwitz.

Des lycéens d’habitude bruyant mais dès l’entrée du camp, on n'entend plus que le bruit de leur pas dans la neige et quelques chuchotements. Serrés les uns contre les autres, les adolescents de 16 ans avancent dans un baraquement où les SS entassaient les prisonniers juifs. Là, "on ressent encore un peu la peur et… je ne sais pas comment expliquer, mais on a des frissons en rentrant", raconte Ethan.

Au fil des minutes les visages de ces lycéens se crispent. Beaucoup ont du mal à retenir leurs larmes devant les restes des chambres à gaz. Et puis dans une pièce, il y a cet amas de cheveux. Ceux des filles et des femmes exécutées ici. Lisa n’arrive plus à bouger : "On leur a enlevé les cheveux… Les femmes, les cheveux, c'est une des choses les plus importantes. On leur a enlevé leur identité". Pour certains lycéens, il est impossible d’entrer dans ces pièces où sont aussi exposé les chaussures, les brosses des déportés. 

Céline Martelet - RMC - Les élèves du lycée Janson de Sailly, en visite au camp d'Auschwitz-Birkenau, en Pologne

Céline Martelet - RMC - Les élèves du lycée Janson de Sailly, en visite au camp d'Auschwitz-Birkenau, en Pologne

"Chaque personne devrait y aller"

En quittant le camp, les adolescents sortent marqués par leur visite. "Le plus dure va être de revenir à nos vies, nos petites vies tranquilles, après avoir vu ça", anticipe Emma. "Je me dis que cela aurait pu être moi, ou que ça aurait pu être ma famille, des proches, s'angoisse Léa, élève de première. C'est horrible, ça me donne envie de pleurer. C'est très dur. Avant d'y aller on ne se rend pas forcément compte, on entend les histoires, mais quand on est sur les lieux c'est complètement différent et on ressent tout ce qu'il s'est passé". Léa estime que "chaque personne devrait y aller. Il faudrait qu'à vie on se souvienne de ces personnes qui ont souffert pendant des mois".

Les professeurs d’histoires qui accompagnent leurs élèves, le disent : il leur faut parfois plusieurs semaines avant de réaliser et de pouvoir reparler de ce qu’ils ont vu à Auschwitz

Céline Martelet - RMC - Les lycéens de Janson de Sailly devant l'entrée du camp

Céline Martelet - RMC - Les lycéens de Janson de Sailly devant l'entrée du camp

Entretien. Comment Auschwitz est devenu Auschwitz

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Le 27 janvier 1945, par hasard, les soldats soviétiques "libèrent" d'Auschwitz. 70 ans et de longues batailles mémorielles plus tard, le camp est devenu le symbole de l'holocauste juif. 

A l'entrée d'Auschwitz, en 2007

A l'entrée d'Auschwitz, en 2007

En 2005, à l'occasion des 60 ans de l'ouverture du camp d'Auschwitz-Birkenau, "l'Obs" s'entretenait avec Annette Wieviorka, directrice de recherche au CNRS, et auteure de nombreux ouvrages sur l'histoire des juifs au 20e siècle. Dans cet entretien, que nous republions en partie, l'historienne raconte comment Auschwitz est devenu le symbole qu'il est aujourd'hui, de son ouverture jusqu'aux premières batailles de mémoire.

Le 27 janvier 1945, les Soviétiques libèrent Auschwitz. Qu'y trouvent-ils ?

-  Le terme de "libération" est impropre. Des avant-gardes de l'Armée rouge découvrent par hasard ce camp, qu'ils ne cherchaient pas. Ils y trouvent quelques milliers de survivants, que les nazis ont abandonnés sur place parce qu'ils n'étaient pas en état de marcher. Les autres ont été évacués à la mi-janvier vers d'autres camps, lors de ce qu'ils nommeront eux-mêmes les "marches de la mort". La guerre continuait. Il fallait transférer ailleurs la force de travail que représentaient les déportés "aptes au travail".

A Auschwitz, ne restent donc que des mourants...

-  7.000 personnes environ, dans le camp central Auschwitz-I et la nébuleuse de camps environnants, dont 400 déportés de France, dans un état effrayant. Les Soviétiques n'ont rien prévu pour les prendre en charge. Ils doivent improviser.

Réalisent-ils à ce moment ce qui s'est passé à Auschwitz ?

- Pas clairement. Ils trouvent des baraques, des monceaux d'objets vêtements, valises, prothèses, les ruines des crématoires. Une commission d'enquête met au jour des archives, les plans des chambres à gaz, les boîtes de zyklon B. Les Soviétiques comprennent la fonction d'extermination des chambres à gaz. Mais ils refusent de voir, ou de dire, que c'était des juifs qu'on tuait, parce que juifs. Et pour employer un mot d'aujourd'hui, ils ne "médiatisent" pas cette découverte. Quelques articles paraissent dans la presse russe. Auschwitz ne fait pas les gros titres.

Et ailleurs dans le monde ?

- Pas davantage.

Même en France ?

-  Oui. Les esprits sont ailleurs. En août-septembre 1944, l'essentiel du territoire national est libéré. Mais on compte près de 2 millions d'"absents", comme les nomme le ministre Henri Frenay : prisonniers de guerre, requis du STO et, très minoritairement, déportés pour faits de résistance ou "raciaux", comme on désigne à l'époque les juifs. Dans les plans de rapatriement, rien de particulier n'est préparé pour le retour des déportés. On n'imagine pas que beaucoup sont des mourants.

Vue du camp après son ouverture, en 1945

Vue du camp après son ouverture, en 1945

Après-guerre, une vision brouillée

Dans la France d'alors, quand on parle des déportés, on pense surtout aux résistants et aux politiques. Plutôt à Buchenwald ou à Dachau qu'à Auschwitz. Sous le terme "camps de la mort", on confond camps de concentration et camps d'extermination, captivité et élimination. Pourquoi cette cécité ?

-  D'abord, les déportés de la Résistance qui reviennent sont infiniment plus nombreux (4.0000 environ, pour seulement 2.500 juifs). Certains sont des personnalités du monde politique d'avant-guerre ou font partie des élites de la République. Ils écrivent, interviennent dans la vie publique, créent des associations. C'est Christian Pineau, Claude Bourdet, Marcel Paul, Marie-Claude Vaillant-Couturier, Edmond Michelet. Les survivants juifs sont le plus souvent des petites gens, tailleurs, casquettiers, parfois très jeunes, et confrontés à une absolue détresse : leurs familles ont été décimées, leurs maigres biens pillés, leurs logements occupés. Ils n'ont guère de moyens de se faire entendre. Dans notre société moderne, la parole des victimes est sacrée, la souffrance individuelle doit s'exprimer. Ce n'était pas le cas en 1945. La parole appartenait aux représentants d'associations structurées. Et l'heure était à la célébration des héros de la Résistance.

D'autre part, les déportés de France ont été rapatriés plusieurs mois après la libération d'Auschwitz, venant de Buchenwald pour la plupart, y compris les juifs qui avaient survécu aux "marches de la mort".

Et c'est de Buchenwald que viennent les premières images de déportés faméliques en pyjama rayé qui vont fixer l'image du déporté, faisant écran à la réalité de l'extermination. Car ceux qu'on menait à la chambre à gaz d'Auschwitz étaient en pleine santé et n'ont jamais porté le pyjama ?

-  Absolument. Ce brouillage sera encore renforcé par les images de Bergen-Belsen, les bulldozers poussant des monceaux de cadavres, que l'on retrouve en 1956 dans "Nuit et Brouillard", d'Alain Resnais, présentées à tort comme des images de l'extermination. Or l'extermination, ce n'est pas cela : ce sont des femmes, des vieillards, des enfants, des gens ordinaires, gros ou maigres, vêtus normalement, qu'on trie à la descente du train et dont la plupart sont aussitôt assassinés.

Faire entendre l'Histoire

Comment la vérité historique de l'extermination va-t-elle peu à peu ressortir de cette vision brouillée de l'après-guerre ?

-  C'est avec le procès Eichmann, en 1961, ce "Nuremberg du peuple juif", comme disait Ben Gourion, qu'émerge dans l'opinion publique la conscience du génocide. Les rares travaux historiques menés jusque-là, grâce à la masse de documents rendus publics au moment de Nuremberg, ont eu peu d'écho. Le sort des juifs n'est au centre ni du procès de Nuremberg ni de ceux de la collaboration en France. A partir du procès Eichmann, l'idée s'impose que les juifs ont subi un sort particulier. C'est à ce moment, par exemple, que Raul Hilberg trouve enfin un éditeur pour sa thèse, "la Destruction des juifs d'Europe".

Le second événement déterminant, c'est la guerre des Six-Jours, en 1967. Elle est vécue par les juifs, en Israël et en diaspora, comme la possibilité d'un second Auschwitz dans la même génération, ramenant au premier plan une mémoire qui avait été mise de côté.

Vous voulez dire que les juifs eux-mêmes avaient refoulé Auschwitz ?

-  Refoulement n'est pas le mot. Le souvenir a toujours été présent dans les familles. Mais c'était une affaire privée. Dans l'après-guerre, la communauté juive elle-même ne met pas l'accent sur les temps de la persécution et de l'extermination. Les responsables communautaires s'occupent activement de la réintégration, de la restitution des biens. La mémoire n'est pas un enjeu. Cela explique le choc du procès Eichmann, qui se propage et va gagner la France. 

L'action de Serge Klarsfeld est ici décisive, mais le temps rend aussi les choses audibles. La mémoire d'Auschwitz, portée par des acteurs juifs, pénètre dans l'espace public à la fin des années 1960. Quand Robert Paxton publie "la France de Vichy", en 1973, les esprits ont changé : l'opinion publique est prête à l'accueillir. Mais il faudra encore une dizaine d'années pour que la Shoah soit placée au centre de la réflexion sur la Seconde Guerre mondiale et pour qu'Auschwitz devienne ce qu'il est pour nous : le nom servant à désigner globalement la solution finale.

Sur le silence des juifs dans les années d'après-guerre, deux points de vue s'opposent. Les uns disent : ayant été mis à part dans les persécutions, ils refusaient d'être mis à part dans le deuil. D'autres, avec Simone Veil, soutiennent que si on n'a pas entendu la souffrance des juifs, c'est qu'on ne voulait pas l'entendre...

-  Les deux ne s'excluent pas. Dans la sphère privée, les familles endeuillées répugnent à entendre le récit des souffrances. Dans la sphère publique, les juifs ne sont pas les "bons" déportés. Ils n'ont pas été des résistants. Mais il est vrai aussi que les juifs de 1945 souhaitent majoritairement s'intégrer à nouveau dans la France républicaine, une France qu'ils ne mettent pas en accusation. Le silence sur la persécution est donc largement consensuel.

Le retour de mémoire est donc lié au début de la réflexion et de l'interpellation sur le rôle de l'Etat français.

- Oui et non. Ces mouvements de mémoire sont transnationaux. On retrouve les mêmes rythmes en France, aux Etats-Unis, en Israël. Mais les modalités sont nationales. En France, c'est l'interrogation sur les responsabilités propres de Vichy.

Sous l'impulsion de Serge Klarsfeld, les enfants de déportés deviennent des "militants de la mémoire", ils demandent des comptes...

-  Et ils obtiennent beaucoup. Au niveau judiciaire, ce sont les procès Barbie, Touvier et Papon : un responsable régional de la Gestapo, un milicien, un représentant de l'Etat vichyste. Au niveau politique et symbolique, c'est une succession de pétitions et de manifestations exigeant de Mitterrand un acte de repentance. Il refuse, mais il institue la "journée à la mémoire des victimes de l'Etat français" (16 juillet), inaugure un monument à l'emplacement du Vel' d'Hiv', la Maison d'Izieu. Il fait tout cela à contretemps, et peut-être à contrecoeur, mais enfin il le fait.

Cependant, il n'a pas de mots forts. Les mots forts sont ceux de Jacques Chirac, le 16 juillet 1995, reconnaissant, dans un discours d'une grande hauteur, que la France a envers ceux qui ne sont pas revenus d'Auschwitz "une dette imprescriptible".

Galerie de portraits de déportés dans un baraquement du camp, en 2006

Galerie de portraits de déportés dans un baraquement du camp, en 2006

Et l'on arrive au troisième volet : la réparation matérielle. C'est la mission Mattéoli, la reprise des indemnisations sous l'égide de la commission Pierre Drai, enfin la création de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah, présidée par Simone Veil. Ainsi, aux niveaux judiciaire, symbolique et matériel, les comptes entre les juifs et la France sont désormais apurés.
Comment Auschwitz est devenu symbole

Le choix d'Auschwitz comme symbole de la Shoah était-il le bon ? Auschwitz n'était pas seulement, selon l'expression de Hilberg, un "centre de mise à mort". C'était aussi un complexe industriel, un camp pour droit-commun, prisonniers de guerre russes, résistants polonais, etc. Si l'on voulait désigner la solution finale dans son absolue singularité ?

- C'était Belzec, évidemment, exclusivement voué à l'extermination. Mais il y a très peu d'archives sur Belzec, quasiment pas de survivants, donc de témoins. Le lieu a été rasé, des arbres très vite replantés. Comment concevoir un lieu de mémoire quand il y a si peu de traces ? Auschwitz est à la fois le camp où il y a eu le plus de victimes, autour d'un million de morts, et paradoxalement de survivants, et celui où se "lit" le mieux le projet génocidaire nazi.

C'est-à-dire l'utilisation du système concentrationnaire à des fins génocidaires ?

- Auschwitz, en effet, c'est d'abord un des nombreux camps de concentration créés par les nazis, en Allemagne, puis dans les territoires annexés, afin d'y interner les opposants et "indésirables" de toutes sortes. Il entre en service le 14 juin 1940. En mars 1941, Himmler, visitant Auschwitz, décide la création, à Birkenau, d'un immense camp destiné à recevoir des prisonniers de guerre soviétiques, et la construction à Monowitz, à quelques kilomètres, d'une usine de caoutchouc synthétique (Buna, en allemand, nom que retiendront les déportés).

C'est seulement au printemps 1942 qu'il devient le lieu de la destruction des juifs de toute l'Europe. Des installations inédites sont érigées à Birkenau pour tuer par le gaz et faire disparaître les corps. Ces chambres à gaz-crématoires intègrent toutes les étapes, jusqu'au traitement des cheveux. Birkenau, c'est le taylorisme appliqué au meurtre.

Avec, au coeur du système, la sélection, chargée de pourvoir à la fois la chambre à gaz et l'usine de Monowitz ?

- La sélection s'impose quand les nazis assignent à Birkenau deux fonctions : éradiquer les juifs, mais aussi utiliser leur force de travail, parce que la guerre dure et qu'on a besoin de main-d'oeuvre. Les nazis "sélectionnent" donc ceux qui doivent être immédiatement éliminés et ceux qui sont "aptes au travail".

Victimes polonaises ou victimes juives ?

En 1967, sur le monument international dédié aux victimes, on pouvait lire : "Quatre millions de personnes ont souffert et sont mortes ici dans les mains des meurtriers nazis entre 1940 et 1945." Au-delà de l'exagération du chiffre, comment expliquer un tel confusionnisme, allant jusqu'à occulter la judéité de la majorité des victimes ?

- Pour les Polonais, Auschwitz, c'est le lieu du martyrologe polonais. Le lieu de la mise à mort des juifs, c'est Treblinka. Dès la fin de la guerre, une muséographie se met en place à Auschwitz. Elle est au départ très nationale-catholique. Avec la guerre froide, elle impose une lecture communiste et internationaliste. Elle demeure très polono-centrée.

Lors de l'inauguration du monument où figure cette inscription, en 1967, le Premier ministre Cyrankiewicz, ancien du camp, ne mentionne pas les juifs parmi les assassinés. Il évoque les victimes "de Pologne et de tous les pays d'Europe". Or, si des Polonais catholiques sont morts à Auschwitz en grand nombre (environ 75.000), les victimes non juives d'autres nationalités ne sont qu'une infime minorité.

Une manière de réintégrer à titre posthume les juifs dans la communauté nationale ?

- Ce n'est pas le cas. D'un côté, l'identité juive des victimes est niée ; d'autre part se glisse l'idée que les Polonais étaient voués à l'extermination, ce qui n'est pas tout à fait vrai. Dans la hiérarchie hitlérienne des races, les Slaves étaient voués à une fonction d'esclaves, pas à une éradication rapide. Les Polonais gazés par convois entiers étaient juifs. Gazés parce que juifs, pas en tant que Polonais.

Cette inauguration, en 1967, provoque d'ailleurs de vives protestations, mais elles ne trouvent guère d'écho. En 1979 encore, quand Jean-Paul II y célèbre une messe et qu'il dresse l'autel sur les ruines des chambres à gaz-crématoires, cela ne soulève pas un tollé. Il faut attendre la fin des années 1980 et l'affaire du carmel d'Auschwitz pour que s'engage la bataille de la mémoire. Le combat contre la présence des carmélites cristallise la protestation contre ce qui est perçu comme une christianisation de la Shoah.

Carminati Massimo

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Massimo Carminati, né le 31 mai 1958 à Milan, est un ancien activiste italien d'extrême-droite membre des Noyaux armés révolutionnaires dans les années 1970, présumé chef d'une mafia à Rome, arrêté le 2 décembre 2014 lors d'un coup de filet de la police italienne.

Carminati Massimo Carminati Massimo

Poggiali Daniela

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Daniela Poggiali is an Italian nurse who has been accused of killing 38 of her patients. She took photos of herself with some of the victims' bodies. 

Poggiali Daniela Poggiali Daniela

She was arrested after an autopsy on 78-year-old Rosa Calderoni revealed dangerous levels of potassium in her body. 38 of 86 of her patients died within a three month period. She reportedly killed her patients because they were annoying.


Témoignage : d'Auschwitz à Buchenwald, la marche des morts-vivants

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La plupart des survivants d'Auschwitz n'ont pas connu la "libération" du camp par les Soviétiques, en 1945. Evacués par les SS, ils étaient en route pour Buchenwald et Dachau. L'un d'eux raconte. 

 

Des visiteurs derrière les barbelés d'Auschwitz-Birkenau, en janvier 2015

Des visiteurs derrière les barbelés d'Auschwitz-Birkenau, en janvier 2015

Survivants d'Auschwitz, ils n'ont pas vécu sa libération le 27 janvier 1945. Avant l'arrivée des Soviétiques, 58.000 prisonniers avaient été évacués par les SS pour se rendre à Dachau et Buchenwald. Durant le voyage, la mortalité fut effroyable.

Jacques Zylbermine avait 15 ans lorsqu'il a vécu cette "marche des morts". En 1995, il racontait son périple à "l'Obs". Voici son témoignage.

 

Jacques Zylbermine avec des élèves français à Auschwitz, en 2005

Jacques Zylbermine avec des élèves français à Auschwitz, en 2005

"Un jour, on nous a dit : demain, on quitte le camp. Pour aller où ? Mystère. C'était en janvier 1945. Les combats se rapprochaient. Les troupes soviétiques n'étaient plus qu'à quelques dizaines de kilomètres d'Auschwitz. On entendait déjà la canonnade... En début d'après-midi, le lendemain, on nous a donné une ration pour la route. Je me suis dit : si je la garde, ou bien je la perds, ou bien on me la fauche. La seule façon de la conserver, c'est de la bouffer. Si nous devons marcher, il vaut mieux avoir le maximum d'énergie dès le départ. C'est ce que j'ai fait. Un réflexe de survie. Car par la suite nous n'avons plus reçu aucun approvisionnement. En fait, nous n'avons rien eu jusqu'à Buchenwald. Quand nous y sommes arrivés, début février, nous avions passé dix-huit jours dehors, par un froid polaire, sans rien boire ni manger que des poignées de neige qui nous brûlaient la gueule.

C'était le 18 janvier. On nous a rassemblés sur la place d'appel, bloc par bloc. Combien étions-nous? Entre 13.000 et 15.000, peut-être. On nous a demandé quels étaient ceux qui ne se sentaient pas capables de marcher. Tout le monde a voulu marcher. La vieille habitude des sélections. Nous étions convaincus que les invalides allaient être liquidés. Les baraques étaient en bois ; il suffisait d'entasser les gens, de fermer la porte... C'est vite fait, un coup de lance-flammes... Enfin, c'est ce qu'on pensait. En fait, ça ne s'est pas passé comme ça. Il fallait rester. Ceux qui sont demeurés sur place - Primo Levi était de ceux-là - ont été libérés par les Russes neuf jours plus tard. Si nous avions su...

"Nous marchions comme des fantômes"

Nous avons quitté le camp, en rangs par cinq, encadrés par les SS et les kapos. Il devait être 4 ou 5 heures de l'après-midi. Ceux qui avaient une couverture l'avaient mise sur leur dos. Le froid était sibérien, on donnait des températures entre -25°c et -30°c. La région d'Auschwitz est l'une des plus froides de Pologne. Il y souffle un vent terrible venu des Carpates qui vous transperce comme une dague.

Aux pieds, nous avions des galoches en bois recouvertes de tissu cloué. Nous avions emballé nos pieds dans du papier-ciment en guise de chaussettes. Le pyjama rayé ne procurait aucune chaleur ; au premier flocon de neige, il était trempé comme une éponge. Nous n'avions pas de pull-over, juste un petit pardessus, aussi fin que le pyjama.

Nous avons commencé à marcher. De temps en temps, des gens venus des autres camps du complexe d'Auschwitz rejoignaient la colonne. Nous traversions un paysage de mort, désolé. De loin en loin, un petit village, cinq ou six baraques en brique abandonnées. Au bout de quelques heures, nous n'en pouvions déjà plus. Nous marchions comme des fantômes, nous heurtant les uns les autres. Il n'y avait plus de rangs, mais des paquets d'hommes. On entendait des hurlements de SS, des aboiements de chiens.

Et puis on a commencé à entendre des claquements. Les types qui tombaient étaient achevés en queue de colonne. Celui qui s'arrêtait n'avait plus la force de repartir. Je souffrais horriblement, j'avais l'impression que les os de mes pieds sortaient de ma peau. Et je me disais : il faut que tu marches, il faut que tu marches... Nous étions comme des fantômes, nous dormions quasiment debout tout en continuantà avancer. Il faisait nuit déjà, et après il a fait jour et nous marchions toujours, et on ne voyait même plus qu'il faisait jour.

"Nous nous sommes retrouvés dans un camp vidé de ses occupants"

Nous ne nous sommes pas arrêtés de la nuit... Je pensais : encore un pas, et puis un autre, et un autre encore... Ne pas s'arrêter. Même pour pisser. Il fallait pisser en marchant. Celui qui avait la dysenterie et qui s'arrêtait, il était foutu. Cinq minutes après, il était mort gelé, s'il n'était pas abattu. Marcher, marcher... A un moment donné, il s'est produit une chose bizarre. Soudain, je ne me suis plus senti du tout. Ni physiquement ni mentalement. Je me suis vu très nettement en dehors de moi, spectateur de moi-même. Je me voyais marcher dans la colonne, je voyais la colonne avancer...

Ça a duré comme ça trois nuits et deux jours - d'autres vous diront deux jours et trois nuits, vous savez, nous avions perdu toute notion du temps. Jusqu'au moment où nous sommes arrivés à Gleiwitz, un important carrefour ferroviaire. Nous avions l'impression d'avoir parcouru 150 kilomètres depuis notre départ. En fait, il y en avait 80.

Là, nous nous sommes retrouvés dans un camp avec des blocs - un camp qui venait d'être vidé de ses occupants. Nous nous sommes entassés dans les baraquements. C'était affreux. Les premiers arrivés avaient de la place - comme j'étais en tête de colonne, j'en faisais partie. Ceux qui venaient derrière voulaient entrer aussi, à toute force. Ça s'est tassé, ça s'est tassé... Les gens crevaient comme ça, les uns sur les autres. Au moins, quand on était à l'intérieur, on avait plus chaud. Les autres sont restés dehors. Par ce froid polaire, c'était quasiment la mort assurée.

Nous sommes restés là, parqués, attendant un train qui devait nous évacuer. Et toujours rien à manger. Au bout de quelques jours, il n'y avait pas un mètre carré de neige sans cadavre. Autour des blocs, on marchait sur les corps gelés. Je me rappelle que plutôt que de m'asseoir sur la neige, je m'asseyais sur un cadavre, ou je m'allongeais dessus pour éviter d'être au contact direct de la neige.

A force d'être tassés dans le bloc, on était obligés de sortir pour ramasser quelques glaçons ou un peu de neige à manger, ou bien on était poussé dehors. Et une fois qu'on était sorti, on ne pouvait plus rentrer. J'ai donc couché dehors, sur la glace. On s'agglomérait par petits groupes, pour se donner un peu de chaleur. Le matin, je ne comprenais pas comment j'étais encore vivant.

"Et tout autour, la neige était rouge"

Comme le train n'arrivait toujours pas, on se préparait à reprendre la marche et ils ont recommencé à faire une sélection, pour voir qui avait la force de repartir et qui ne pouvait pas. On passait devant un SS qui disait: à gauche, à droite... Toujours pareil. Au bout d'un moment, j'ai réalisé que j'étais parqué dans un coin du camp, tout près des barbelés; nous étions quelques centaines, dans un état indescriptible. Des cadavres vivants. Et tous les autres, la grande masse, se trouvaient de l'autre côté. Là j'ai compris : le bon côté, c'était l'autre.

Quelques SS nous gardaient à distance, avec leurs mitraillettes. On avait déblayé les cadavres et tracé sur la neige une ligne que nous ne devions pas franchir. Je me suis dit : mon compte est bon, ils vont nous abattre. J'avais récupéré un petit peu, je me sentais capable de repartir. J'ai dit aux copains, nous étions une quinzaine : si on ne fait rien, ils vont nous massacrer ; foutu pour foutu, il faut tenter le coup. On fait comme si de rien n'était, on se rapproche de la ligne et, d'un seul coup, on fonce de l'autre côté pour se mêler aux autres. Ils vont nous tirer dessus, mais celui qui passera passera.

Nous nous sommes mis à courir. Ça a crépité de tous les côtés, je sentais les balles qui me frôlaient les oreilles... J'ai été arrêté par les kapos polonais qui nous flanquaient des coups de matraque sur le crâne. J'ai perdu connaissance. J'ai eu l'impression que mon cerveau éclatait, j'ai vu comme une lumière, et puis plus rien.

Je ne sais pas combien de temps je suis resté sur la neige, peut-être un jour, une nuit, je ne sais pas... Quand j'ai repris connaissance, je pouvais à peine bouger, j'avais le visage en sang. J'ai rampé sur la neige. Il y avait encore quelques copains autour de moi. Et tout autour, la neige était rouge.

"En voulant prendre ma place, le malheureux m'a peut-être sauvé la vie"

A un moment, j'ai réussi à me lever et j'ai aperçu de l'autre côté le professeur Robert Weitz, un agrégé de médecine de Strasbourg. C'était un médecin de renommée internationale, un des rares détenus que les SS respectaient. J'ai vu qu'il regardait dans ma direction. Je lui ai fait signe, j'avais compris qu'il allait essayer de me tirer de là. Je l'ai vu parler à un SS, l'autre a eu un mouvement d'acquiescement, puis Weitz s'est approché du barrage qui était gardé par les SS, il a tendu le bras. Le geste s'adressait à moi. J'allais sortir de ce petit coin où j'étais confiné, destiné à être massacré. Mais quelqu'un, près de moi, s'est précipité à ma place. Un SS l'a mis en joue et l'a abattu en disant : "Toi, espèce de cochon, est-ce que tu ne peux pas enlever ton chapeau ?" En voulant prendre ma place, le malheureux m'a peut-être sauvé la vie. Je ne sais pas si j'aurais pensé à me découvrir...

Alors je suis resté tranquille, je me suis présenté devant le SS, je me suis mis au garde-à-vous, j'ai enlevé mon chapeau, et j'ai commencé à marcher lentement. Je me disais : il va m'envoyer un pruneau, il va m'envoyer un pruneau... Je suis passé à sa hauteur, il n'a pas bougé. Dès que j'ai eu passé le barrage, je me suis mis à courir pour me fondre dans la masse. En fait, je l'ai appris par la suite, les autres, ceux qui étaient restés de l'autre côté de la ligne, n'ont pas été massacrés. Ils sont restés là. Et la plupart des camarades qui avaient voulu forcer le barrage avec moi avaient été tués...

Finalement, le train est arrivé. Enfin, si on peut appeler ça un train. Les wagons étaient de simples plates-formes découvertes qui devaient servir à transporter du sable. On nous a fait monter là-dessus, on nous a entassés, 120 à 130 par plate-forme, debout, plaqués les uns contre les autres. J'ai compris qu'il valait mieux se placer au milieu, parce que ceux qui avaient la malchance d'être contre les parois risquaient d'être écrasés. C'est ce qui s'est passé. Au bout d'un certain temps, ceux qui étaient contre les parois glissaient au sol et mouraient bientôt étouffés sous le poids des autres.

Bon, le train est parti. Nous avons voyagé plusieurs jours, plusieurs nuits, toujours sans être alimentés. Et petit à petit on se hissait sur les cadavres. Il y avait ceux qui mouraient d'inanition, ceux qui avaient attrapé la crève, ceux qui étaient à bout de forces et se laissaient tomber d'épuisement. Le froid faisait le reste. Je me suis retrouvé au sommet d'un wagon rempli de cadavres recouverts de neige.

"Nous étions à Buchenwald"

Un jour, le train s'est mis à ralentir et j'ai pu lire "Praha". Tiens, ai-je pensé, on passe à Prague, on est déjà en Tchécoslovaquie, on n'est plus en Pologne. Ce devait être tôt le matin ; sur les ponts, on voyait des civils à pied ou à bicyclette qui devaient se rendre à leur travail. Ces gens en nous voyant étaient totalement affolés. Moi, je ne comprenais pas. Je n'avais même plus conscience de l'état dans lequel nous étions. Il m'a fallu un moment pour réaliser que c'était nous qui produisions cet effet : des plates-formes entières remplies de cadavres et de moribonds, ils n'avaient jamais vu ça! Ils larguaient leurs vélos, ils s'approchaient du parapet et regardaient, épouvantés. Certains ont sorti des casse-croûte de leur sacoche et nous les ont jetés. Vous imaginez la bagarre... Cent mains qui se tendent... Un sandwich, mais on se serait tués pour ça ! Je crois me souvenir que j'ai réussi à saisir quelque chose, et puis des mains ont agrippé les miennes. Je n'ai rien eu... 

Notre train s'est arrêté en gare de Prague. Il y avait des gens qui allaient et venaient. De nous voir ils étaient comme fous. Alors nous nous sommes redressés, ceux qui étaient encore vivants, et nous avons crié pour dire qui nous étions : "Franzous, Franzous, Franzous..." Pour la première fois depuis longtemps, j'ai croisé le regard d'un SS, et j'ai vu qu'il était rouge de honte. Les SS ont chassé les civils. Et pour laver l'affront, ils se sont mis à nous cogner dessus.

Nous sommes repartis. A un moment, le train s'est scindé. Nous avons roulé, roulé... Une nuit, il m'a semblé que nous étions arrivés au terme de notre voyage. Plus grand-chose de vivant dans le wagon. Je ne savais pas où j'étais, je voyais des lumières avec des barbelés au loin. Nous étions à Buchenwald.

Quand on a déplombé les wagons, il n'y avait quasiment plus personne de vivant. J'ai eu l'impression que quelques personnes bougeaient encore dans ma plate-forme. J'ai senti qu'on me tirait par les bras, j'ai glissé sur les cadavres... J'étais incapable de marcher. Tout tournait autour de moi. Des soldats - c'était des détenus, qui faisaient partie d'une sorte de service d'ordre interne - m'ont attrapé et m'ont aidé à marcher.

Nous nous sommes retrouvés dans le camp, pressés, entassés. Dans la nuit, on voyait une grande bâtisse éclairée vers laquelle on dirigeait les gens. Et au-dessus, une grosse cheminée... Je croyais que c'était un crématoire, avec la chambre à gaz au centre. J'essayais désespérément de m'en éloigner. Je laissais passer les autres, je me faufilais, à reculons, en rampant. Et la foule qui me poussait vers l'entrée du bâtiment. J'étais terrorisé. La nuit, l'éclairage, les aboiements des chiens, les hurlements... J'étais en enfer !"

 

Hollande à Auschwitz pour le 70e anniversaire de la libération du camp nazi

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Le chef de l'État retrouve ce mardi en Pologne de nombreux homologues et responsables étrangers pour mettre en garde le monde contre la haine et l'intolérance.

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François Hollande célèbre ce mardi en Pologne le 70e anniversaire de la libération du camp d'extermination nazi d'Auschwitz-Birkenau. Ce déplacement du chef de l'État intervient trois semaines après les attentats parisiens dans lesquels quatre juifs ont été tués.

Avant de partir pour la Pologne, le chef de l'Etat s'est rendu mardi matin au Mémorial de la Shoah à Paris où il a rendu hommage, en présence d'une centaine de survivants des camps, aux 75.000 Juifs de France déportés, sous le régime collaborationniste de Vichy. 

Puis dans l'après-midi, les présidents français, allemand Joachim Gauck et ukrainien Petro Porochenko, le chef de l'administration présidentielle russe Sergueï Ivanov et le secrétaire américain au Trésor Jack Lew doivent notamment assister à la cérémonie principale devant le mémorial de Birkenau, lieu d'extermination d'un million de juifs européens. Le roi des Belges Philippe Ier accompagné de son épouse Mathilde et celui des Pays-Bas Willem-Alexander avec la reine Maxima y sont aussi attendus, avec une vingtaine d'autres présidents ou premiers ministres. Une centaine d'anciens prisonniers viendront d'Israël avec un ministre. Le cardinal archevêque de Cracovie Stanislaw Dziwisz sera là au nom du Saint-Siège. Des discours sont attendus.

Moscou a expliqué l'absence du président Vladimir Poutine par le fait qu'il n'avait pas été invité. En fait, aucune invitation officielle n'a été envoyée aux responsables politiques, le Musée d'Auschwitz-Birkenau ayant décidé d'axer ce 70e anniversaire sur les survivants dont beaucoup sont nonagénaires.

Dissolution progressive

C'est l'armée soviétique qui a libéré le 27 janvier 1945 le camp d'Auschwitz-Birkenau, où 1,1 million de personnes avaient été exterminées, dont un million de Juifs de différents pays d'Europe.

Le plus grand et le plus meurtrier de tous les camps d'extermination et de concentration nazis est le seul à avoir été préservé tel qu'il avait été abandonné par les Allemands en fuite devant l'Armée rouge. Cette libération a été précédée par la dissolution progressive du complexe, à partir de l'été 1944 et par l'évacuation de plus de 60.000 détenus. Lorsque les Soviétiques arrivèrent, ils ne découvrirent ainsi que 7000 prisonniers, incapables de suivre leurs camarades dans ce que l'on a appelé «les Marches de la mort».

La libération des camps a en effet débuté le 24 juillet 1944 avec celle du camp de Majdanek (dans la banlieue de Lublin, Pologne) par l'Armée rouge pour se terminer le 8 mai avec la capitulation sans condition de l'Allemagne. Avant leurs libérations, d'autres camps d'extermination nazis en Pologne, comme Sobibor, Treblinka ou Belzec, ont été complètement détruits par les Allemands pour en effacer les traces.

Traumatisme des attentats parisiens

«Dans les temps que nous connaissons, à un moment où il y a quelques jours, sur le sol de France, des juifs ont été de nouveau assassinés parce qu'ils étaient juifs, il était d'autant plus important que le président s'exprime pour rappeler à la fois la nécessité de se souvenir de l'Histoire et d'en transmettre le sens» pour éviter que «l'abominable» se reproduise, souligne l'entourage de François Hollande.

Près de trois ans après les tueries perpétrées en 2012 à Montauban et Toulouse par Mohamed Merah, qui avait assassiné sept personnes, dont trois enfants dans une école juive, les attentats parisiens des 7, 8 et 9 janvier derniers ont aussi provoqué un immense traumatisme dans la communauté juive, alors que depuis plusieurs années les actes antisémites se sont multipliés en France.

A tel point, qu'au lendemain de l'attaque meurtrière de l'Hyper Cacher porte de Vincennes, le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, rappelait «à tous les juifs de France» qu'Israël était leur «foyer», provoquant une vive réplique de son homologue Manuel Valls: «la France, sans les juifs de France, n'est plus la France».

Significativement, la France est en tout cas devenue en 2014, pour la première fois depuis 1948, le premier pays d'émigration vers Israël, avec plus de 6000 juifs (contre 3400 en 2013) ayant quitté l'Hexagone pour rejoindre l'Etat hébreu.

Auschwitz, Buchenwald, Dachau... Et le monde découvrit l'enfer

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En 1945, la libération des camps par l'Armée rouge provoqua une onde de choc. L'historienne Annette Wieviorka la fait revivre à travers le périple du reporter américain Meyer Levin, premier à prendre la mesure de l'univers concentrationnaire. À la mémoire des survivants succèdera, des années après, une mémoire de la Shoah.

Dachau: le premier camp de concentration ouvert en 1933. Ici, un Russe de 18 ans en 1945 photographié par Éric Schwab, compagnon de route du reporter Meyer levin

Dachau: le premier camp de concentration ouvert en 1933. Ici, un Russe de 18 ans en 1945 photographié par Éric Schwab, compagnon de route du reporter Meyer levin

Le 5 avril 1945, dans le Land de Thuringe, alors que le IIIe Reich, pris en tenaille par les Alliés et l'Armée rouge, s'effondre, deux journalistes au coeur aventureux s'écartent de la division américaine à laquelle ils sont rattachés pour prendre des chemins de traverse. Au volant, Meyer Levin (40 ans), originaire de Chicago, correspondant de la Jewish Telegraphic Agency, une agence de presse alimentant une presse juive alors dynamique et variée. Meyer, qui se fait aussi appeler Mike -plus yankee- est par ailleurs auteur de six romans. Quelques mois plus tôt, il loge à l'hôtel Scribe, à Paris, en compagnie de Hemingway et d'Orwell. C'est là qu'une jeune fille rangée nommée Simone de Beauvoir découvre le spam, le jambon épicé (spicy ham) des boîtes des rations américaines.  

A la droite du chauffeur, Eric Schwab (35 ans), photographe de la toute nouvelle Agence France Presse : un type "de la race des Capa, de ces reporters intrépides qui s'approchent au plus près du combat, au mépris de leur vie parfois", selon son acolyte. Avant guerre, Schwab est photographe de plateau pour le cinéma, puis de mode. En juin 1940, il est fait prisonnier dans la poche de Dunkerque. Il s'évade et rejoint Paris. On ne sait pas grand-chose de sa vie jusqu'à la Libération et son nouvel emploi. 

Des corps entassés comme des bûches

Ce 5 avril, les deux journalistes croisent "des squelettes au crâne rasé et aux yeux fiévreux enfoncés dans les orbites" : des "cadavres vivants", diront les premiers articles de la presse internationale. La Jeep débouche sans le savoir sur le camp d'Ohrdruf, près de la ville de Gotha. Au sol, des cadavres répartis en cercles, un trou laissé dans le crâne par la balle qui les a achevés. Dans un hangar, des corps entassés comme des bûches, à hauteur d'homme. Sur une colline, des cadavres brûlant sur une sorte de gril inséré dans une fosse de la taille d'une piscine. "Nous faisions des bûchers comprenant trois rangées de corps séparées par des couches de rondins, leur raconte un témoin. La première couche de rondins était disposée sur deux rails parallèles et nous arrosions avec du goudron avant d'y mettre le feu. Pendant la combustion, nous devions parfois retourner les cadavres pour n'avoir que des cendres une fois le feu éteint." 

 

Les généraux américains Eisenhower, Bradley, Patton et Eddy devant les restes d'un bûcher

Les généraux américains Eisenhower, Bradley, Patton et Eddy devant les restes d'un bûcher

Le 12 avril, le commandant en chef des forces alliées, Dwight Eisenhower, et les généraux Bradley et Patton visitent ce camp satellite de Buchenwald, passé à la trappe de l'Histoire. "On nous dit que le soldat américain ne sait pas pourquoi il se bat. Maintenant, au moins, il saura contre quoi il se bat", déclare "Ike". Patton, un "dur", s'éclipse discrètement pour aller vomir derrière un baraquement. 

C'est en quelque sorte "embedded" dans la Jeep des deux reporters que l'historienne Annette Wieviorka, grande spécialiste de la mémoire de la Shoah, fait revivre, soixante-dix ans après, la libération des camps, de Paris à Terezin en passant par Buchenwald et par Dachau. Son livre 1945. La Découverte mêle avec brio et concision choses vues, analyse du système concentrationnaire, confrontation des mémoires d'hier et d'aujourd'hui. Eric et Meyer, nous apprend-elle, ont chacun une mission cachée. Le premier est à la recherche de sa mère, une juive de Berlin, séparée de son père, un Français de Nancy. Le second veut témoigner de ce que le grand historien américain Raul Hilberg nommera "la destruction des Juifs d'Europe". Mais le sujet n'intéresse pas grand monde. 

Le premier reportage de Levin, daté du 18 septembre 1944, porte sur le nouvel an juif, Rosh Hashana, célébré dans Paris libéré. Ses dépêches sur la résistance juive et le sort des enfants sauvés par des Français de toutes conditions deviendront les thèmes de recherche des historiens vingt-cinq ans plus tard. Meyer-Mike est un précurseur. Mais, absorbé par sa mission, il néglige la libération des premiers camps : Lublin-Majdanek (24 juillet 1944) et Auschwitz (27 janvier 1945) côté soviétique ; Natzweiler-Struthof (23 novembre 1944), en Alsace, côté américain.  

Les camps sont libérés au hasard des opérations militaires. Les Alliés connaissent leur existence, mais en ignorent la réalité et, surtout, ne les considèrent pas comme un but de guerre. La priorité, c'est la capitulation du IIIe Reich. A l'exception d'Auschwitz, où se trouvent encore 7000 détenus (sur une population maximale de 130 000), parmi lesquels Otto Frank, le père d'Anne, et Primo Levi, futur auteur de Si c'est un homme, les camps sont vides. Les détenus ont été liquidés sur place, transférés dans d'autres camps ou envoyés sur les routes dans les "marches de la mort". Aussi les premiers reportages mettent-ils l'accent sur les "camps de torture" nazis, les "atrocités" allemandes. Rien sur un "univers concentrationnaire". La formule est utilisée pour la première fois un an plus tard par le résistant David Rousset, qui en fait le titre de son livre-témoignage, prix Renaudot 1946.

Environ 250000 personnes furent emprisonnées à Buchenwald et 56000 y trouvèrent la mort

Environ 250000 personnes furent emprisonnées à Buchenwald et 56000 y trouvèrent la mort

Terezin, l'ultime étape de nos reporters motorisés, a aussi ses particularités. C'est un camp ghetto réservé à certaines catégories de juifs du "Grand Reich" (Allemagne, Autriche, protectorat de Bohême-Moravie) : anciens soldats de Guillaume II, fonctionnaires, médecins, artistes, chercheurs, bref, le gratin du judaïsme germanophone. Terezin a une autre fonction : c'est un camp leurre, un outil de propagande qui a berné la Croix-Rouge. C'est là qu'Eric le photographe retrouve sa mère, "une femme frêle, aux cheveux blancs, un bonnet blanc d'infirmière sur la tête". 

La mémoire du génocide confinée aux survivants

De la destruction des Juifs d'Europe, de la "Solution finale", de ce que le langage commun nomme aujourd'hui Shoah, il n'est pas question dans l'immédiat après-guerre. Pas plus que d'Auschwitz. Ne serait-ce que parce que la majorité des témoignages viennent des camps de l'Ouest, alors que l'extermination a eu lieu dans l'Est, dans les camps polonais. La mémoire du génocide est confinée aux survivants. 

"Les rescapés sont certes accueillis, mais leurs récits sont inaudibles, remarque l'historienne. Et, aux Etats-Unis, en France, comme en Israël, on leur suggère de se taire. C'est le temps des combattants, des héros, et celui de la suspicion sur les victimes." L'image dominante est celle du déporté résistant héroïque, interné à Buchenwald, celle de Nuit et brouillard (1955), d'Alain Resnais, le film le plus projeté dans les écoles de la République. Même constat dans la littérature, où l'idée qui prévaut est que seuls les survivants peuvent témoigner. "Les hommes normaux, écrit David Rousset, ne savent pas que tout est possible. Même si les témoignages forcent leur intelligence à admettre, leurs muscles ne croient pas. Les concentrationnaires savent." 

L'interrogation morale domine -comment peut-on en arriver là, que signifie une telle déchéance sur la nature de l'homme? -chez Robert Antelme (L'Espèce humaine, 1947), mari de Marguerite Duras, et Louis Martin-Chauffier (L'Homme et la bête, 1947). Le journaliste Meyer Levin n'est pas en reste : "Les hommes avaient en eux ce qui leur a permis de faire cela et nous étions de la même espèce", écrit-il dans In Search (1951), récit de sa découverte des camps, doublé d'une réflexion sur l'identité juive, bien avant les écrivains de l'"école de New York", Malamud, Bellow, Roth (Philip). L'une des rares tentatives d'appréhender le système est celle d'Eugen Kogon, catholique autrichien déporté de 1939 à 1945, auteur de L'Etat SS, mi-témoignage, mi-enquête.  

Le changement d'angle s'opère en 1961, avec l'ouverture du procès d'Adolf Eichmann, ordonnateur de la "Solution finale", responsable du rassemblement puis du transport des Juifs vers les camps de la mort. Ce procès fait appel aux témoins, "seul moyen, de faire toucher du doigt la vérité", selon le procureur général, l'Israélien Gideon Hausner. Pour la première fois, le sort spécifique des Juifs et la distinction entre camps de concentration et camps d'extermination sont appréhendés. En 1973, les organisations juives américaines se fixent l'objectif de conserver la mémoire de l'"Holocauste" (étymologiquement, "sacrifice par le feu"), avec une majuscule. Les cours sur le sujet se multiplient dans les universités américaines. Quatre ans plus tard, le feuilleton hollywoodien du même nom, croisant le destin de deux familles allemandes, l'une juive, l'autre nazie, est vu par plus de 120 millions de téléspectateurs, ancrant un peu plus le terme dans le monde anglo-saxon. 

L'histoire des camps bascule vers celle de la "destruction des juifs"

En France, le passage du déporté-résistant au déporté "racial" s'opère par le biais des publications sur La France de Vichy (1973), titre du livre de l'Américain Robert Paxton, puis de Vichy et les Juifs (1981), coécrit avec Michaël R. Marrus. L'interview par L'Express, en 1978, de l'ancien commissaire général aux Questions juives Darquier de Pellepoix, puis, la même année, l'article du négationniste Robert Faurisson, enfin le procès de Klaus Barbie (1987) et celui de Maurice Papon (1998) font basculer un peu plus l'écriture de l'histoire des camps vers celle de "la destruction des Juifs d'Europe". Jacques Chirac, dans son discours de 1995 sur la rafle du Vel d'Hiv ("Oui, la folie criminelle de l'occupant a été secondée par des Français, par l'Etat français") officialise en quelque sorte ce glissement de sensibilité.  

Entre-temps, le mot hébreu "Shoah" (anéantissement), en usage en Israël, s'impose, avec l'imprimatur de l'Association des professeursd 'histoire-géographie, puis la diffusion du fil mde Claude Lanzmann, en 1985 : un documentaire de neuf heures trente minutes, l'un des plus longs de l'histoire du cinéma, refusant les images d'archives ("Elles pétrifient la pensée et tuent toute puissance d'évocation"), au profit des témoins rejouant leur "rôle", cheminot, coiffeur...  

Malgré les polémiques lexicales (un "holocauste" n'est-il pas un sacrifice offert à Dieu? "Shoah" n'est-il pas utilisé dans la Bible pour désigner des catastrophes naturelles?), l'extermination des juifs, de périphérique, devient centrale tandis que, dans les représentations, Auschwitz se substitue à Buchenwald. Quitte à absorber toute la criminalité nazie, au détriment de ses autres pans. Dans les années 1990, Meyer Levin a gagné son pari : "Faire reconnaître l'identité juive des victimes d'Hitler", conclut Annette Wieviorka. Mais, disparu en 1981, ce "don Quichotte" dont "les ailes du moulin" étaient en "forme d'étoile juive", selon l'expression de sa femme, Tereska Torrès, n'est plus là pour s'en féliciter. 

1945. La Découverte, par Annette Wieviorka. Seuil-AFP-Fondation pour la Mémoire de la Shoah, 284p., 19,50€. 

Du même auteur, Déportation et génocide. Entre la mémoire et l'oubli (Plon, 1992). 

Soixante-dix ans après l'horreur d'Auschwitz, « plus jamais ça »

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Le 27 janvier 1945, l'armée soviétique libérait le camp d'Auschwitz-Birkenau, en Pologne, où 1,1 million de personnes ont été exterminées par les nazis, dont un million de juifs de différents pays d'Europe.

Survivants de l'Holocauste et chefs d'Etat se réunissent à Auschwitz, pour lancer un nouveau « Plus jamais ça », sur fond de craintes de montée de l'antisémitisme en Europe

Survivants de l'Holocauste et chefs d'Etat se réunissent à Auschwitz, pour lancer un nouveau « Plus jamais ça », sur fond de craintes de montée de l'antisémitisme en Europe

Soixante-dix ans après, survivants de l'Holocauste, chefs d'Etat et têtes couronnées se réunissent, mardi 27 janvier, à Auschwitz, pour lancer un nouveau « Plus jamais ça », sur fond de craintes de montée de l'antisémitisme en Europe. Cet appel a retenti dès lundi, sous des formes différentes, lors de multiples rencontres de survivants, souvent nonagénaires, tenues à proximité de l'immense camp recouvert d'une épaisse couche de neige fraîche.

La cérémonie principale est prévue pour se tenir à partir de 15 h 30, sous une tente dressée à l'entrée du camp de concentration, en présence d'anciens prisonniers et prisonnières, ainsi que d'un représentant des « Piliers du souvenir » – les donateurs généreux du Musée. Les participants se rendront à pied jusqu'au monument aux victimes de Birkenau, distant de moins d'un kilomètre, pour y déposer des fleurs et allumer des cierges.

HOMMAGE À PARIS

Avant de se rendre en Pologne, François Hollande prononce depuis 10 heures, un discours au Mémorial de la Shoah à Paris, en présence d'une centaine de survivants des camps, en hommage aux 75 000 juifs de France déportés sous le régime collaborationniste de Vichy.

Lundi, la chancelière allemande, Angela Merkel, a tenu à s'exprimer à l'occasion d'une cérémonie organisée à Berlin par le Comité international d'Auschwitz. Vêtue de noir, elle a déclaré : « Auschwitz nous concerne tous, aujourd'hui et demain. Et pas seulement les jours de commémoration. »

Outre M. Hollande, les présidents allemand Joachim Gauck et ukrainien Petro Porochenko, et le secrétaire américain au Trésor Jack Lew, ainsi que les familles royales belge et néerlandaise, notamment, doivent assister à la cérémonie principale à Auschwitz mardi après-midi. La Russie doit être représentée par le chef de l'administration présidentielle Sergueï Ivanov. Le président Vladimir Poutine n'a pas souhaité se déplacer – alors qu'il l'avait fait en 2005 –, n'ayant pas été officiellement invité.

Si l'extermination organisée comme une industrie par les nazis s'est déroulée essentiellement en Pologne occupée, l'Holocauste a touché plusieurs autres pays européens où les juifs ont été arrêtés pour être déportés vers les « camps de la mort ». A Budapest, le premier ministre conservateur Viktor Orban a déploré lundi le rôle de « très nombreux Hongrois », pendant la seconde guerre mondiale, qui « avaient choisi le mal plutôt que le bien et avaient opté pour des actes honteux plutôt que pour une conduite honorable ».

Auschwitz, 70 ans après: Des survivants mettent en garde contre une «nouvelle vague d'antisémitisme»

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«Tout cela est frais dans ma mémoire. Mes proches ont brûlé. Même leurs photos», a raconté une ancienne prisonnière du camp d'extermination d'Auschwitz en Pologne. Témoins de l'horreur et puissants du monde ont rendu un hommage vibrant aux victimes des nazis, 70 ans après la libération du camp d'extermination. Des commémorations qui n'ont pas nié les craintes face à la montée de l'antisémitisme en Europe. «Antisémites, extrémistes radicaux et fanatiques religieux» commettent de nouveau des crimes», a averti le réalisateur Steven Spielberg qui participait à ces hommages. En marge de ces commémorations, François Hollande a annoncé mardi matin des mesures pour renforcer les sanctions et lutter contre les actes antisémites. Ainsi, le Président a souhaité «généraliser la caractérisation raciste et antisémite comme circonstance aggravante d'un délit».

 

Une perspective du camp d'Auschwitz, à l'occasion du 70e anniversaire de sa libération

Une perspective du camp d'Auschwitz, à l'occasion du 70e anniversaire de sa libération

19h25: Bobigny aspire à devenir un lieu de mémoire

Choisie par les nazis pour sa discrétion, la gare de déportation de Bobigny est longtemps restée un terrain en friche, abandonné à un ferrailleur et aux herbes folles. Elle aspire à devenir un lieu de mémoire, à l'image de Drancy à 3 km de là.

A partir de 1942, les Juifs sont internés au camp de Drancy et déportés depuis la gare du Bourget. Mais, en raison de la présence de voyageurs, les nazis lui préfèrent, dès l'été 1943, celle de Bobigny, désaffectée et peu visible. De là, les trains rejoignent le noeud ferroviaire de Noisy-le-Sec puis la voie de l'Est, en direction du Reich. Jusqu'à leur destination finale, 53 heures plus tard.

La gare de Bobigny est donc «la dernière image qu'ils ont emportée de la France», explique Anne Bourgon, chargée de mission sur le patrimoine à la mairie. «Le choix de Bobigny correspond à un moment de reprise en main de la "solution finale" par les nazis», qui décident de «déporter également les Juifs français, avec l'aide des préfets», poursuit l'historienne. «Dès lors, il y a un souci plus grand de cacher ces départs pour les camps d'extermination.»

17h55 : Un nouveau Mémorial à Londres

Londres va accueillir un nouveau mémorial de la Shoah, a annoncé le Premier ministre britannique. Le mémorial, dont l'emplacement reste à déterminer, sera construit au côté d'un nouveau centre pédagogique afin de «commémorer et instruire» l'histoire de la Shoah et faire en sorte qu'elle ne soit «jamais oubliée», a souligné David Cameron.

17h50 : Plus d'un million de personnes ont péri dans le camp

Auschwitz, 70 ans après: Des survivants mettent en garde contre une «nouvelle vague d'antisémitisme»

17h47 : Une bougie en mémoire des victimes

Les chefs d'Etats et de gouvernement déposent une bougie devant les plaques commémoratives.

17h32 : Les chefs d'Etat se dirigent vers le monument aux victimes

Ce monument est situé près des chambres à gaz. La nuit est tombée, les chefs d'Etat et de gouvernement présents aux commémorations traversent les fameuses voies ferrées d'Auschwitz, qui menaient les victimes vers la mort, pour se rendre jusqu'au monument.

17h17 : Prière pour les victimes

Une prière faisant partie du rite funéraire juif est faite en hommage aux victimes. Les camps d'extermination sont cités dans cette prière. Quelque 1,1 million de personnes ont été exterminées à Auschwitz-Birkenau.

17h06 : Barack Obama souligne «le devoir de condamner la résurgence de l'antisémitisme»

«Les récentes attaques terroristes survenues à Paris nous rappellent de façon douloureuse notre devoir de condamner et de combattre la résurgence de l'antisémitisme sous toutes ses formes, que ce soit par la négation ou la banalisation de l'Holocauste», a déclaré le président américain dans un communiqué. Il a appelé la communauté internationale à faire en sorte que ce génocide «ne se reproduise plus jamais».

16h59 : Il appelle à la tolérance

«Les lieux de culte doivent être des lieux d'amour, dit-il. On ne doit pas y prêcher le crime au nom d'un Dieu. Tous les pays doivent dire que la haine est un crime [...] C'est le silence et l'indifférence du monde qui ont permis l'existence d'Auschwitz. Ne permettez pas que cela se reproduise.»

16h53 : Un survivant affirme que «les gens ont peur de porter la kippa»

Faisant référence à l'attaque du supermarché casher à Paris il y a trois semaines, ce survivant affirme que «les Juifs en Europe, une fois de plus, sont attaqués parce que juifs. Petit à petit, la démonisation des juifs revient [...] et s'est insinuée dans le discours public. On a l'impression non pas d'être en 2015 mais en 1933. Les gens ont peur de porter la kippa, à Paris, Budapest ou Berlin.» Il dénonce «une nouvelle vague d'antisémitisme».

16h48 : Vidéo de la cérémonie au Mémorial de la Shoah

L'Elysée a mis en ligne l'intervention, en vidéo, du président ce matin au Mémorial de la Shoah, à Paris. 

16h28 : Le président polonais exprime «respect et reconnaissance» aux soldats soviétiques

Le président polonais Bronislaw Komorowski a exprimé mardi «respect et reconnaissance» aux soldats soviétiques qui ont libéré Auschwitz, tout en condamnant «les deux totalitarismes» nazi et soviétique. Ce camp, «c'est un lieu maudit, une plaie qui reste ouverte à jamais».

16h22 : Un de nos internautes rappelle l'existence du seul camp de concentration sur le territoire français

Notre internaute souligne : «A tous ceux qui ne peuvent aller en Pologne, il existe un camp en Alsace : le «Struthof» à visiter ! Sur ces massacres (comme pour beaucoup d'autres, le Rwanda par exemple), il y aurait probablement beaucoup à dire et à connaître, notamment pourquoi ils ont existé et perduré si longtemps sans intervention des Etats "libres"».

16h16 : Un ancien prisonnier témoigne

«Oublier ce que j'ai vécu ici, ne serait-ce qu'une seconde, est impossible. C'est ici que les Allemands accueillaient leurs «invités» pour les maltraiter. On séparait les familles, souvent à jamais. Les gardiens nous fouettaient, nous mordaient. 70 ans plus tard, cette cruauté quotidienne est toujours gravée dans mon esprit.»

«Il y avait des cavadres ambulants, cette puanteur dans l'air. Beaucoup d'entre nous sont venus ici et ont quitté le camp par les cheminées. Les pleurs déchirants des enfants séparés de leur mère... ces cris continueront à résonner dans mes oreilles.»

16h07: Valls «intraitable» face à l'antisémitisme

Le Premier ministre Manuel Valls a assuré qu'il fallait être «intraitable» sur les sanctions à opposer à l'antisémitisme et que «la loi permettra que la sanction soit beaucoup plus impitoyable car nous savons que les mots tuent».

«Que 70 ans après on crie de nouveau mort aux juifs dans les rues de Paris, que 70 ans après on tue des Français parce qu'ils sont juifs, 70 ans après que des enfants à l'école disent que leur ennemi c'est le juif, que 70 ans après malgré les témoignages et le travail de mémoire qui a été fait il y ait encore cet antisémitisme, que 70 ans après à l'antisémitisme traditionnel naisse un autre antisémitisme sur fond de misère, sur fond de haine d'Israël, sur fond de rejet de l'autre, c'est contre ça que nous devons nous rebeller», a-t-il déclaré lors des questions au gouvernement.

Auschwitz, complexe symbole du mal

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Quand le 27 janvier 1945 les troupes soviétiques du premier front ukrainien pénètrent sur le site d’Auschwitz, en Pologne, ils abordent un lieu presque déserté où errent, hagards, quelque 9 000 survivants – parmi lesquels Primo Levi ou le père d’Anne Frank, Otto. Ceux-là ont réussi à se soustraire à l’évacuation du camp, le 17 janvier, de 58 000 détenus, conduits par les Allemands dans les « marches de la mort ».

Des déportés derrière les barbelés lors de la libération du camp d'Auschwitz, le 27 janvier 1945

Des déportés derrière les barbelés lors de la libération du camp d'Auschwitz, le 27 janvier 1945

Le contre-modèle absolu de la démocratie

Si le nom « Auschwitz » va par la suite devenir synonyme de la Shoah (plus en Allemagne qu’en France), du mal absolu ou de la tuerie industrielle, et, le lieu, dès avant la chute du communisme, une destination de voyage mémoriel et cathartique, la plupart des historiens d’aujourd’hui le considèrent comme un symbole ambigu. Certes, il est celui de la mise à mort de plus de 1 million de juifs, notamment, principalement hongrois, polonais et de la quasi-totalité des juifs de France déportés (70 000 y périssent) ; mais son complexe d’asservissement et d’exploitation économique régenté par la SS rattache aussi la « zone d’intérêt » (dans le jargon nazi) à ce qu’on appelle le « système concentrationnaire ».

Auschwitz, parce que ses bâtiments n’ont pas été rasés, devient également la trace physique d’une fracture mémorielle, mettant à nu les potentialités criminelles de l’Europe, et se transformant lentement, après 1945, en contre-modèle absolu de la démocratie et de l’unité retrouvée du Vieux Continent. Cette leçon perdurera-t-elle, dès lors que s’éloigne la période de l’après-guerre ?

Si la prétendue lassitude du thème est un mythe, et si l’intérêt ne faiblit pas, « les usages politiques ne sont plus aussi évidents »

Pour l’historienne Annette Wieviorka, le temps où la mémoire de la Shoah cristallise le consensus du monde démocratique correspond à la décennie qui succède à la fin du communisme. Si la prétendue lassitude du thème est un mythe, et si l’intérêt ne faiblit pas, « les usages politiques ne sont plus aussi évidents ».

Imre Kertesz, Prix Nobel de littérature en 2002, qui a accepté de s’entretenir avec Le Monde, conteste cependant l’idée selon laquelle l’intérêt pour Auschwitz diminuera au fur et à mesure de la disparition des survivants, dont il est un des plus célèbres. Pour lui, la « culture d’Auschwitz » constitue une « expérience humaine universelle », celle d’une « faillite ».

« Tourisme mémoriel »

Troublée par les tensions actuelles entre Polonais et Russes à propos de l’Ukraine, la célébration des 70 ans de la libération du principal camp de la mort nazi, le 27 janvier 1945, s’accompagne d’une interrogation de plus en forte sur le sens des voyages, notamment scolaires, qui s’y multiplient et sur leur impact, alors que l’antisémitisme se réinstalle au cœur de l’actualité. Que vaut ce « tourisme mémoriel » ? Et cette mémoire est-elle de plus en plus difficile à transmettre en milieu éducatif, comme le décrivent nos journalistes Mattea Battaglia et Benoît Floc’h ? Le lieu même, visité par Florence Aubenas, grand reporter, est-il en mesure de tenir les promesses pédagogiques d’une éducation démocratique ?

Pour l’historien Tal Bruttmann, le pèlerinage demeure utile pourvu qu’il soit assorti d’un « projet de contenu », et qu’on n’en fasse pas « un voyage de purification » – tentation forte après les attentats de janvier à Paris, craint-il. La médiation des spécialistes comme des témoins reste d’autant plus nécessaire que les premiers ont rendu l’image du camp plus complexe. L’historien américain Timothy Snyder, qui y voit l’« apogée de l’Holocauste », constate ainsi que la plus grande partie des victimes de la « solution finale » ont soit été tuées dans leur ville d’origine, soit dans d’autres centres d’extermination (Treblinka, Chelmno, Belzec, etc.), déplaçant le regard savant sur les tueries du front de l’Est, qui ont laissé moins de traces ou de témoins.

Avec Auschwitz, on prend en outre conscience, non seulement de la dimension universelle que les bourreaux voulaient donner au génocide, mais aussi de ce qu’est un « écosystème nazi ». « La crise de 1929 avait montré le peu de respect qu’on avait pour la vie humaine en projetant sans secours des millions de personnes au chômage, remarque l’historien spécialiste du nazisme Johann Chapoutot. Les nazis ont conscience d’aller plus loin en degré, mais pas en nature. » La symbolique, on le voit, est loin d’être épuisée.

 

Hollande au Mémorial de la Shoah : « La République française n'oubliera jamais »

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Avant de se rendre aux commémorations de la libération du camp d'Auschwitz, en Pologne, François Hollande s'est adressé mardi 27 janvier, au Mémorial de la Shoah à Paris, aux « Français de confession juive ». « Votre place est ici, chez vous », a déclaré le chef de l'Etat face à une centaine de survivants des camps, dans un discours d'hommage aux 75 000 juifs de France déportés sous le régime collaborationniste de Vichy.

François Hollande au Mémorial de la Shoah mardi 27 janvier

François Hollande au Mémorial de la Shoah mardi 27 janvier

Le président a annoncé que le gouvernement présenterait d'« ici à la fin du mois de février un plan global de lutte contre le racisme et l'antisémitisme ». « Sécurité », « transmission » vers les jeunes générations et « régulation du numérique » seront les principes de ce plan. La Shoah « doit pouvoir être enseignée partout, sans aucune restriction ».

La hausse des actes antisémites est « depuis plusieurs années une réalité insupportable », a-t-il déclaré, avant d'ajouter que le « fléau » de l'antisémitisme « conduit certains juifs à s'interroger sur leur présence en France. Vous, Français de confession juive, votre place est ici. La France est votre patrie ».

Ces déclarations interviennent alors que le Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) a annoncé mardi que le nombre des actes antisémites a doublé (+ 101 %) en 2014 par rapport à 2013 en France, avec même une augmentation de 130 % des actes avec violences physiques.

Selon le CRIF, qui cite des chiffres du Service de protection de la communauté juive (SPCJ) s'appuyant sur des données du ministère de l'intérieur, 851 actes antisémites ont été recensés en 2014, contre 423 en 2013. « Ces actes antisémites représentent 51 % des actes racistes commis en France, alors que les juifs ne sont que moins de 1 % de la population française », a indiqué l'organisme.

« PLUS JAMAIS ÇA »

Le président prendra ensuite l'avion pour le sud de la Pologne où, soixante-dix ans après, survivants de l'Holocauste, chefs d'Etat et têtes couronnées se réunissent, à Auschwitz, pour lancer un nouveau « Plus jamais ça », sur fond de craintes de montée de l'antisémitisme en Europe.

Cet appel a retenti dès lundi, sous des formes différentes, lors de multiples rencontres de survivants, souvent nonagénaires, tenues à proximité de l'immense camp recouvert d'une épaisse couche de neige fraîche.


Auschwitz : qu'est-ce que la marche de la mort ?

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Le 27 janvier 1945, le camp de concentration d'Auschwitz est libéré par l'armée soviétique. Neuf jours plus tôt, les SS évacuaient 60 000 déportés vers d'autres camps alors que les alliés approchaient. La « marche de la mort » commençait.

 

 

Serge Smulevic, l'un des survivants d'Auschwitz, compare la marche de la mort à un « gigantesque mollusque »

Serge Smulevic, l'un des survivants d'Auschwitz, compare la marche de la mort à un « gigantesque mollusque »

C'était il y a 70 ans. Le 27 janvier 1945, les troupes soviétiques parviennent à libérer le camp d'extermination d'Auschwitz, en Pologne, un lieu devenu le symbole de la barbarie nazie. 7 000 personnes flirtant avec la mort sont retrouvées. Aujourd'hui, le monde se souvient.

À l'occasion de cette commémoration, nous avons décidé de revenir sur un épisode sombre de cette période, un événement survenu quelques jours avant la libération. Le 18 janvier 1945, alors que les alliés se rapprochent d'Auschwitz, 60 000 déportés sont évacués de force et envoyés à la hâte vers d'autres camps de concentration, comme Buchenwald et Dachau. C'est le début de la marche de la mort.

La marche de la mort : les SS tiraient sur les plus affaiblis

Vêtus d'un simple pyjama rayé, certains déportés font intégralement ou en partie le chemin à pied. D'autres sont placés dans des wagons ouverts. C'est l'hiver. Le temps est glacial. Nombre d'entre eux meurent de froid avant d'arriver à destination.

Quelques survivants sont revenus des années plus tard sur cette marche macabre. Leurs récits décrivent la faim et la soif, les maladies qui se propageaient d'individu en individu et le comportement de leurs bourreaux, qui n'hésitaient pas à frapper à coups de bâton les retardataires ou à descendre les plus affaiblis pour éviter de ralentir le groupe.

La marche de la mort : « Dès qu'ils tombaient, [ils] mouraient de froid »

Simone Veil a vécu cet instant terrible. Le convoi dont elle fait partie se dirige vers Gliwice, une ville qui se trouve à plus de 60 kilomètres d'Auschwitz. Seule la moitié des prisonniers rejoindra le camp. Dans une interview accordée à France 2 en 1995, elle fait revenir à la surface ce souvenir douloureux.

Elle se souvient de tous ceux, à pied, qui « dès qu'ils tombaient, mouraient de froid » et du trajet en train, relevant presque de la torture. « Je crois qu'il y a eu encore beaucoup plus de gens qui sont morts dans les wagons, les wagons ouverts dans lesquels nous avons circulé durant plusieurs jours, sans avoir pour la plupart ni à manger ni à boire sauf la neige, (...) quand les SS voulaient bien [en mettre] dans les gamelles que nous avions ».

Elle décrit aussi ce sentiment paradoxal qu'ils ressentaient, ce mélange d'espoir – ils savaient que les Soviétiques approchaient – et de crainte : seront-ils exterminés juste avant la libération ?

À l'arrivée, « la moitié des wagons était constituée de cadavres »

Dans cette même émission, le résistant Henri Krasucki raconte lui aussi l'horreur de ces marches et la terrible épreuve qui les attend en descendant à Buchenwald (voir vidéo en fin d'article). « Quand on a ouvert les portes des wagons, la moitié était constituée de cadavres. Et il nous a fallu, à nous, qui tenions à peine debout, contribuer à décharger ces wagons de cadavres. »

La marche de la mort, un « gigantesque mollusque »

D'autres rescapés sont passés par l'écrit pour décrire leurs impressions. L'un d'eux, Serge Smulevic, compare dans un texte aussi poignant que poétique sa marche de la mort à un « gigantesque mollusque ».

« Il fait très froid et une neige très fine tombe depuis des heures.
La nuit a déjà entamé son cycle.
Le gigantesque mollusque est formé d’anneaux bleus et blancs. Il est entouré de part et d’autre par des petites bêtes vertes, appelées SS, qui se déplacent sur le même rythme que lui et qui surveillent les neuf mille anneaux.
Il règne un silence mystérieux et angoissant.
»

Walter Otto

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Oberscharführer et Blockführer. Allemand né le 20 juillet 1906 à Wuppertal, électricien dans le civil. 

Walter Otto

Il a rejoint les forces allemandes le 15 octobre 1940, est entré dans la SS et a été envoyé à Auschwitz où il est resté jusqu’au 21 janvier 1945. Il était électricien à Auschwitz I sous la responsabilité de l'Oberscharführer Bohn. Il est arrivé à Belsen le 4 février 1945. Aucune question de la cour quant à Auschwitz. Jugé non coupable pour Belsen.

Auschwitz 70 ans après : donner tort à Marceline Loridan

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Marceline Loridan a bousculé la radio ce mardi matin. Ce petit bout de femme à la chevelure rousse, d’apparence si fragile, n’en a cure des convenances. Survivante d’Auschwitz, elle était l’invitée de la matinale de France Inter pour les 70 ans de la découverte du camp nazi. Elle y a dit ce qu’elle avait sur le cœur, et elle ne l’a pas tendre.

Marceline Loridan-Ivens, le 15 janvier 2015 à Paris

Marceline Loridan-Ivens, le 15 janvier 2015 à Paris

La cinéaste n’a ainsi pas pris de gants pour réduire en bouillie la chronique de Bernard Guetta, qui tentait de philosopher sur Auschwitz, et exprimer son pessimisme profond sur le fait qu’on n’apprend pas, que le monde reproduit l’antisémitisme depuis 2 000 ans et que ce n’est pas prêt de s’arrêter, et que c’est pour ça qu’elle n’a jamais voulu avoir d’enfant après son retour du camp de la mort.

Et s’il n’y avait eu que des victimes juives...

Marceline Loridan a parfois laissé Patrick Cohen sans voix, sans question prête pour enchaîner comme tout bon intervieweur ; et elle a posé une question taboue :

« Est-ce que les Français seraient descendus dans la rue s’il n’y avait eu que des victimes juives début janvier ? »

Poser la question, c’est y répondre. Les Français ne sont pas descendus dans la rue lors de la tuerie de l’école juive de Toulouse, en mars 2012, et il y aurait eu un grand émoi mais pas le même choc sans l’attaque sans précédent de la rédaction de Charlie Hebdo.

Des « lâches » dans les classes qu’elle visite

En décembre, j’ai eu la chance d’assister à un incroyable « spectacle » : Marceline Loridan était sur scène, au Forum des images de Paris, avec le cinéaste Yves Jeuland, qui, pendant trois heures entrecoupées d’extraits de films et de musique yiddish, a parlé de ses parents juifs polonais, de sa jeunesse française, du milicien vichyste qui a tenté de la violer en l’arrêtant mais qui a en a été empêché par un soldat allemand sous prétexte qu’on « ne touche pas à cette race-là »..., de son expérience des camps, et de la vie après Auschwitz.

"Servir le peuple" est devenu "Servir le RMB" (la monnaie chinoise), Marceline Loridan, le 29 mai 2014 à Paris

"Servir le peuple" est devenu "Servir le RMB" (la monnaie chinoise), Marceline Loridan, le 29 mai 2014 à Paris

La salle était pleine à craquer, et d’Auschwitz à la Nouvelle Vague ou à la Chine de Mao qu’elle a connue – et soutenue – de (trop) près avec son mari Joris Ivens, cette vie exceptionnelle a défilé entre larmes et rire, entre tragédie et parfois comédie.

Mais mardi matin, Marceline Loridan était en colère, ou peut-être pire, désabusée. Se demandant si ça servait réellement à quelque chose de témoigner sur Auschwitz à partir du moment où cette mémoire-là n’empêchait pas de nouveaux crimes, de nouvelles haines, n’empêchait pas des enfants d’être indifférents lorsqu’elle diffuse son film dans les écoles : des « lâches », dit-elle sans concession.

Et le pire, c’est qu’il s’est trouvé un auditeur de parents algériens, éducateur de son état, qui s’est senti obligé d’appeler pour dire l’importance du « devoir de mémoire » sur les camps, et l’importance de cette histoire tragique partagée. Comme s’il fallait montrer, au nom du politiquement correct d’aujourd’hui, que cette mémoire était véritablement collective, Arabes compris.

Concurrence mémorielle

Toutes les contradictions de la société française post-Charlie se retrouvaient dans ce qui aurait dû être une journée de commémoration comme la France en connaît tant.

Au même moment, les statistiques des actes antisémites, en forte augmentation en 2014, commençaient à circuler sur les sites d’info et les réseaux sociaux, comme en écho au pessimisme de Marceline Loridan.

Des statistiques qui en appelèrent aussitôt d’autres : il se trouva sur Twitter quelqu’un pour faire observer qu’il y a eu plus d’actes islamophobes depuis le début de 2015 que pendant toute l’année 2014...

Cette querelle victimaire fait partie du mal français, avec son corollaire, la concurrence mémorielle.

Les faiblesses de l’Histoire

Qui est le plus malheureux, qui est le plus persécuté, qui subit le plus dans la France d’aujourd’hui ? Cette question se pose depuis longtemps, et constitue le non-dit malsain d’une journée de commémoration d’Auschwitz.

Cette énergie négative empoisonne la société française depuis des années, et ressurgit à chaque tragédie : l’affaire Halimi, Toulouse, Gaza, Charlie Hebdo et Vincennes... De quoi donner raison au « pessimisme de la raison » de Marceline Loridan.

Comment transformer cette énergie négative en énergie positive ? Comment faire de ces faiblesses de l’Histoire, de notre histoire, de nos histoires entremêlées avec leurs parts d’ombre et de lumière, un facteur d’unité pour repousser la barbarie, sous toutes ses formes ?

Peut-être est-ce à cette question que devrait être consacrée la journée d’Auschwitz. Pour donner tort à Marceline Loridan.

PS : France Culture a eu la bonne idée de diffuser lundi en fin d’après-midi des archives INA sur la manière dont on parlait des camps en 1945-46. A écouter pour constater, justement, que le monde change, et pas qu’en mal.

Lew Jacob

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Jacob « Jack » J. Lew, né le 29 août 1955 à New York, est un homme d'affaires et homme politique américain, membre du Parti démocrate, actuel secrétaire du Trésor des États-Unis. Ancien chef de cabinet de la Maison-Blanche et Directeur du Bureau de la gestion et du budget sous l'administration Clinton et l'administration Obama.

Lew Jacob Lew Jacob

Il est diplômé de l'Université de Georgetown et de l'université Harvard. Il travaille au Capitole puis à la Maison-Blanche sous l'administration Clinton. Entre 2006 et 2008, il est le numéro 2 de Citigroup. Le 18 novembre 2010, il est nommé directeur du bureau de la gestion et du budget. Le 9 janvier 2012, Jack Lew est choisi par Barack Obama comme chef de cabinet de la Maison-Blanche, en remplacement de William Daley, démissionnaire en janvier 2012. Le 10 janvier 2013, il est nommé secrétaire du Trésor des États-Unis, en remplacement de Timothy Geithner. Sa nomination a été confirmée par le Sénat le 27 février 2013. Il est keynésien, et marqué à gauche.

Daley William

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William Michael Daley, né le 9 août 1948 à Chicago, est un homme d'affaires et homme politique américain, membre du Parti démocrate, ancien chef de cabinet de la Maison Blanche. Ancien secrétaire du Commerce sous l'administration Clinton, il est le fils de Richard Daley, qui fut maire de Chicago de 1955 à 1976 et le frère de Richard M. Daley, qui fut également maire de Chicago de 1989 à 2011, tous deux issus du Parti démocrate.

Daley William Daley William

Il est titulaire d'un baccalauréat en arts de l'université Loyola de Chicago, et d'un baccalauréat de droit obtenu à l'école de droit « John Marshall ». Il a ensuite accompli un carrière de juriste au sein du cabinet Daley & George, sauf entre 1977 et 1980, lorsqu'il était membre du conseil consultatif des possibilités économiques. Nommé premier vice-président de la banque Amalgamated Bank of Chicago en 1989, il en devient président-directeur général (PDG) dès l'année suivante, mais démissionne en 1993 afin de retourner pratiquer le droit en tant qu'associé du cabinet Mayer, Brown & Platt jusqu'en 1997.

Au cours de cette même période, il siège au conseil d'administration de Fannie Mae, sur nomination de Bill Clinton. En décembre 2001, il est choisi comme président de SBC Communications Inc., afin de participer à la réforme de la communication de l'entreprise. Il change d'employeur en mai 2004, lorsqu'il devient président pour le Midwest de JPMorgan Chase et Bank One Corp., afin de superviser les opérations post-fusion à Chicago. Il a par la suite faite partie du conseil d'administration de Merck & Co., de Boeing, de Boston Properties, Inc. et de son ancienne université.

Après avoir été conseiller spécial de Bill Clinton en 1993, chargé de la ratification de l'accord de libre-échange nord-américain (ALENA), William M. Daley est nommé, le 30 juin 1997, secrétaire du Commerce des États-Unis, un poste dont il démissionne en juillet 2000, afin de participer à la campagne électorale du vice-président. Suite à sa démission, il a en effet pris le poste de la campagne présidentielle du démocrate Al Gore, qui sera finalement défait par le républicain George W. Bush suite à un recomptage contesté des suffrages en Floride. Il se retire alors de la vie politique, mais y fait son retour le 5 novembre 2008, lorsqu'il est désigné membre du conseil consultatif de la transition présidentielle de Barack Obama, dont il avait été l'un des ardents partisans tout au long des primaires démocrates.

Le 6 janvier 2011, William M. Daley est choisi par Barack Obama comme chef de cabinet de la Maison Blanche, en remplacement de Rahm Emmanuel, démissionnaire en octobre 2010 afin de se présenter à l'élection du maire de Chicago le 22 février 2011. Depuis cette démission, l'intérim est assuré par Pete Rouse. Le choix de Daley a été condamné par les organisations progressistes, car il est un opposant déclaré à la réforme du système de santé et à la loi de régulation financière et de protection des consommateurs1. Il entre en fonction sept jours plus tard.

Il démissionne le 9 janvier 2012, il est remplacé par Jake Lew. Il est né à Chicago en 1948, étant le septième et plus jeune enfant de Richard J. Daley, maire de la ville entre 1955 et 1976. Sa famille est intimement liée à la politique locale, dans la mesure où deux de ses frères ont également occupé des mandats électifs : John P. Daley a été parlementaire de l'Illinois, et Richard M. Daley a été maire de Chicago de 1989 à 2011.

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